Les premières élections professionnelles des livreurs de repas et chauffeurs VTC débutent ce lundi. Deux organisations appellent déjà au boycott.
Ils travaillent avec les plateformes Uber, Bolt, Deliveroo ou JustEat. Les 125 000 livreurs de repas et chauffeurs de VTC peuvent voter, à partir de ce lundi et jusqu'au lundi 16 mai pour élire leurs représentants.
Seize listes (sept pour les véhicules de transport avec chauffeur (VTC), neuf pour les chauffeurs-livreurs) concourent pour représenter ces deux catégories de métiers. Un scrutin placé sous l'égide de l'Autorité de régulation des plateformes d'emploi (Arpe). "Ces élections sont le fruit d'un travail entamé il y a près de 2 ans et doit permettre un dialogue entre ces travailleurs et les plateformes", indique Bruno Mettling, président de la Arpe. (Ce dernier est mis en cause dans un article de L'Humanité pour ses liens avec Uber. Il reconnaît avoir produit une expertise utilisée par la plateforme, mais nie avoir été salarié de l'entreprise américaine.)
Trois thèmes seront abordés à l'issue de ces élections : l'instauration d'un revenu minimum, les conditions de travail de ces travailleurs et la question de la transparence algorithmes.
Renforcer le statut de travailleur indépendant
Selon Bruno Mettling, "c'est un signe fort pour la dignité et la reconnaissance des travailleurs. On sait que l'on est face à des travailleurs pauvres en situation de fragilité. La France fait le pari d'une troisième voie : en Angleterre et Italie, il n'y a pas le statut de salarié mais un statut dégradé de salarié. En France, il n'y a pas de tiers statut. Ce statut d'indépendant, il faut le fixer avec certaines garanties."
Les plateformes se réjouissent aussi de l'existence d'une sorte de troisième statut. "Ce processus est une innovation importante et une voie originale, qui reconnaît la singularité des travailleurs indépendants et leur accorde des droits nouveaux. Deliveroo s'est mobilisé aux cotés de l'ARPE pour faire connaître largement ces échéances et inciter les livreurs partenaires à y prendre part", indique un communiqué de Deliveroo à France 3 Paris Ile-de-France.
Même son de cloche auprès d'Uber qui espère "un premier accord sectoriel sera signé d’ici la fin de l’année."
Car ces négociations pourraient éviter aux plateformes de recourir au salariat, ce qui fragiliserait significativement leur modèle économique. En France, en mars 2020, la Cour de cassation avait reconnu l'existence d'un lien de subordination entre la plateforme Uber et un de ses anciens chauffeurs, jugeant que le statut d'indépendant du conducteur était "fictif".
Les plateformes ne veulent pas du salariat
Certains estiment d'ailleurs que ces élections professionnelles vont plutôt dans le sens des plateformes, alors que Bruxelles a proposé début décembre un arsenal de mesures pour renforcer les droits des travailleurs des plateformes numériques et contraindre ces dernières, en fonction d'un certain nombre de critères, à se soumettre aux obligations (salaire minimum, temps de travail, normes de sécurité...) imposées par la législation du travail du pays concerné.
Des acteurs majeurs et implantés de longue date ont refusé de candidater. L'intersyndicale nationale VTC (INV), le syndicat des chauffeurs privés (SCP) et le Clap (collectif des livreurs autonomes parisiens) sont les grands absents du scrutin.
Sayah Baaroun, secrétaire général du SCP, dénonce notamment l'absence de "contrainte pour les plateformes hormis celle de siéger" et redoute des négociations sans accords.