La gare du Nord va être rénovée et deviendra en partie une grande surface. Un projet qui divise. Les syndicats de cheminots craignent une privatisation de la première gare d'Europe au profit d'un géant de la grande distribution.
Le projet de rénovation de la gare du Nord est spectaculaire : un triplement de la surface, 600 millions d'euros d'investissement, des espaces verts, des équipements sportifs dont une piste d'athlétisme sur le toit mais surtout une très grande zone commerciale.
Problème, "Gare et connexion", l'entreprise de la SNCF, qui gère les gares, va confier le projet a une filiale d'Auchan. Pour les spécialistes de la grande distribution, l'intérêt d'un site très passager en centre-ville est évident.
"Le modèle des hypermarchés où l'on demandait aux consommateurs d'aller jusqu'au magasin n'est plus vraiment ce qui correspond à la demande alors que le fait de trouver tous ces emplacements commerciaux sur leurs trajets quotidiens est vraiment quelque chose qui est demandé et fait sens. Pour la grande distribution, c'est très important de se rapprocher de ses consommateurs", explique Pauline Garnier, directrice marketing et communication C.A. Com.
Vente du domaine public ?
Après l'agrandissement de la gare, la SNCF ne gérera que la partie circulation, l'accueil et l'accès direct aux voies. Pour la partie commerciale, beaucoup plus grande, elle a créé une société commune avec Ceetrus, une filiale d'Auchan, dans laquelle elle ne détiendra que 34 % des parts. Une concession pendant 35 à 46 ans que certains assimilent déjà à une vente du domaine public."Les sociétés privées n'investiront pas dans la gare. Elles continueront à développer tout ce qui est marchandage mais surtout à aucun moment, elles voudront investir dans la gare qui ne leur appartiendra pas. Avec cette réforme, vous privatisez les bénéfices et vous laissez public ce qui va perdre de l'argent", affirme Bruno Poncet, secrétaire fédéral Sud Rail.
Entretenir les petites gares
Première gare d'Europe avec 700.000 passagers par jours, la croissance la Gare du Nord va continuer jusqu'à 900 000 passagers prévus en 2030. La SNCF met en avant l'impossibilité pour elle de trouver des financements sans passer par le privé. Selon elle les bénéfices attendus serviront à tout le réseau."On a besoin de gagner de l'argent ici pour entretenir les petites et moyennes gares. Dans les trois ans qui viennent, nous allons investir 700 millions d'euros dans 600 petites et moyennes gares en France. Et pour investir dans ces petites gares, nous avons besoin de gagner de l'argent dans les grandes gares", indique Patrick Ropert, directeur général Gares et Connexions SNCF.
D'autres projets de concession comparables sont prévus à la Gare Montparnasse. Les grands travaux de la Gare du Nord doivent commencer l'an prochain. Tout doit être fini avant les jeux olympiques de 2024.