DOSSIER. Saturation du réseau, satisfaction des étudiants, retards... Un an après la gratuité dans les transports, un premier bilan contrasté

Un an après les grandes festivités qui avaient entouré l'arrivée de la gratuité dans les transports de Montpellier, le bilan est plutôt en demi-teinte. Si la métropole se félicite de l'augmentation de la fréquentation, les syndicats de la TaM, l'opposition et certains usagers dénoncent une dégradation de l'offre.

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Les images de l'événement avaient marqué les Montpelliérains et avaient été relayées en masse sur les réseaux sociaux. Il y a un an, le 21 décembre 2023, la métropole fêtait le passage à la gratuité de ses transports en commun à l'occasion d'une édition hors norme de la Zone Artistique Temporaire (ZAT). Si la joie l'emportait pour beaucoup ce soir-là, de nombreuses questions restaient pourtant en suspens sur le fond du projet de gratuité. Comment allait évoluer la fréquentation des bus et tramways ? Comment combler le trou dans le budget de la TaM, causé par la suppression des abonnements et autres tickets ?

Toujours pas d'augmentation des impôts, promet Julie Frêche

Un an plus tard, Julie Frêche, vice-présidente de la métropole montpelliéraine déléguée aux transports et aux mobilités actives, se veut rassurante sur le premier bilan de la gratuité. Financièrement, l'élue indique que la métropole et la mairie "tiendront l’engagement de la non augmentation des impôts".

La mesure a également "permis d’augmenter la fréquentation de près de 30% depuis sa mise en place". Elle rapporte également que contrairement à ce que certains annonçaient avant la gratuité, les incivilités n'ont pas augmenté dans les transports montpelliérains. Mieux, elles auraient "baissé de 34% selon les chiffres du ministère de l'Intérieur".

Les étudiants satisfaits, la surfréquentation pointée du doigt par les usagers

Pour faire le bilan de cette première année de gratuité, nous vous avons demandé, sur nos réseaux sociaux, de témoigner en donnant votre avis sur le dispositif, inédit en France et en Europe pour une aussi grande métropole. Et les avis sont plutôt partagés.

Lucas, étudiant en communication depuis la rentrée de septembre à Montpellier, mais qui venait déjà de temps en temps dans la métropole avant la gratuité, estime que la mesure est "très utile pour nous, étudiants". Joint par téléphone, il explique que pour lui comme pour bon nombre de ses camarades, c'est "un stress en moins", qui "évite de devoir éventuellement frauder faute de moyens pour payer le tram. 1€ ça peut paraître bête, mais à force, c'est beaucoup". D'autres nous rapportent que c'est "top", "pratique", quand certains disent n'avoir "jamais autant pris le tram" depuis qu'il est gratuit, "un vrai soulagement financier".

Mais sous notre post Facebook, les retours sont plus négatifs. Julie estime que "les trams sont toujours pleins", notamment "pendant les vacances scolaires", "car les facs ne sont pas forcément en vacances". Selon elle, "il est horrible de monter dans le T1 aux heures de pointe". Ma Lali explique de son côté avoir des difficultés sur la ligne 15 de bus, qui fait le tour de la ville en reliant les lignes de tram entre elles : "On est entassés comme des sardines", et à cause du "manque de bus", "les gens ne peuvent pas monter dedans".

"On a fait la gratuité, mais avec zéro moyen supplémentaire", dénonce FO

Des plaintes que font également remonter les syndicats de la TaM à leur direction. Le 10 décembre dernier, une large majorité des conducteurs de bus et de tram étaient en grève "pour lancer une balise de détresse", s'estimant "en souffrance", rapporte Laurent Murcia, délégué Force Ouvrière à la TaM. Hasard du calendrier, au même moment, les conducteurs du réseau de Dunkerque, l'autre ville grande agglomération française à être passée à la gratuité, étaient également en grève, pour des raisons similaires.

Un tramway qui charge 200000 voyageurs jours au lieu de 130000, il se fatigue plus vite. Et l’être humain aussi.

Laurent Murcia,

délégué syndical FO TaM.

À Montpellier, Laurent Murcia rapporte lui 38% de fréquentation en plus, "un chiffre dont on ne peut que se réjouir. Sauf qu'il n'y a que ce voyant qui est au vert, tous les autres sont au rouge", estime le représentant syndical. Selon lui, "on a fait la gratuité, mais avec zéro moyen supplémentaire", soulignant notamment l'absence de "renforcement des lignes depuis qu’on a cette charge supplémentaire".

Une situation qui risque de durer dans le temps, puisque Force Ouvrière rapporte que "dans le prochain contrat d’organisation des transports publics, qui commence au 1er janvier 2025, il n’y a aucun renforcement" de l'offre de prévu. Le syndicat redoute une nouvelle dégradation de l'offre dans les prochains mois, avec l'explosion du nombre de voyageurs : "sur la ligne 1, une fois l’extension ouverte, on pourrait atteindre les 200.000 à 250.000 voyageurs par jour". À titre de comparaison, en 2018, la ligne 1 transportait 126 800 voyageurs chaque jour.

"C'est gratuit, mais c'est pourri", juge Alenka Doulain

Du côté de l'opposition, les retours sur la gratuité sont à peu près similaires. Alenka Doulain, conseillère municipale et métropolitaine du groupe MUPES, considère que "la gratuité a dégradé le service public". En novembre 2023, elle craignait déjà auprès de France 3 "une paupérisation" des transports publics de la métropole. Selon elle, il aurait été préférable de mettre en place une gratuité "selon les revenus : pour les -18 ans, les étudiants, les chômeurs... Parce que là, on se prive de millions d’euros, ce qui a reporté la livraison des lignes de bustram."

Tant qu'il n'y a pas une offre satisfaisante, la gratuité loupe un peu sa cible.

Alenka Doulain,

conseillère municipale et métropolitaine d'opposition (MUPES).

L'élue voit aujourd'hui la promesse de campagne de Michaël Delafosse comme "une belle opération de communication qui coûte 30 millions d'euros aux métropolitains, et qui a mis fin à tous les projets structurants de transport public". Résultat, selon elle "aujourd'hui c'est gratuit, mais c'est tout pourri".

Les réponses de la métropole

L'augmentation du nombre de voyageurs dès la mise en place de la gratuité avait pourtant bien été anticipée par Montpellier Méditerranée Métropole. Et ce, dès la fin 2020 lorsqu'elle avait lancé un appel d'offres massif pour une commande de 77 nouvelles rames de tram, dont 17 doivent être dédiées au renforcement du réseau existant. Mais ces dernières vont se faire attendre : les premiers nouveaux trams qui arriveront en 2025 seront dédiés à l'exploitation de la future ligne 5.

Il n’y a pas de gratuité sans augmentation de l’offre

Julie Frêche,

vice-présidente déléguée aux transports.

Contactée ce jeudi 19 décembre, la métropole n'était donc pas en mesure de donner un délai de livraison pour ces rames supplémentaires. Alors pour décharger le réseau, et notamment la ligne 1, elle compte sur la ligne 5, "qui va désengorger la section entre le centre-ville et St-Éloi, en direction des facs".

Enfin, concernant la surfréquentation de la ligne 15 de bus, dénoncée à la fois par les usagers et les syndicats, la ligne a "déjà été renforcée en janvier 2024, avec 12 passages supplémentaires en heure de pointe", rappelle la collectivité. Avant de rajouter que "depuis la fin des travaux sur l’avenue de Vanières en septembre, il y a un peu plus de fluidité" sur la ligne.

Reste que Julie Frêche, la vice-présidente déléguée aux transports, assume : "si c'était à refaire, nous le referions. Lorsqu’on prend un engagement, la priorité c’est de le respecter".

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