Découvert avec son tube Attitude, Lewis Ofman est la nouvelle coqueluche de la pop. Après quelques mois de tournée américaine, le jeune producteur est de retour avec un nouvel album, Crystal Medium Blue et s'accompagne désormais d’un groupe sur scène. Nous l'avons rencontré en pleine résidence au plan de Ris-Orangis où il prépare sa nouvelle tournée.
Solène Lescouët, Mohamed Bourouissa, Clarck Ayessa, Kevis Manzi et Jean-François Chaput, cette semaine, dans Toki Woki, les artistes et les grands noms sont légion. Parmi eux, Lewis Ofman, en veille de tournée à Ris-Orangis où il finit la résidence de Cristal Medium Blue.
Ton nouvel album qui vient de sortir ?
Ouais, mais qui est aussi le nom du spectacle qu'on est en train de mettre en place. Je suis entouré de Cristal Medium Blue Band.
Robinson Robert, le bassiste. Avec Robinson, on se connaît depuis tout petit. C'est mon voisin d'en face. And the drums, Adrian Libeyre Ramirez. Évidemment pas que drummer, mais qui fait tout. C'est lui qui fait tout ce qu'on voit derrière la fumée, les lumières. C'est lui qui a tout organisé. Celui qui a organisé aussi les arrangements du live, toute l’organisation, tout le truc. The brain is here. Ensuite, il y a un magicien. Straight from New Jersey, Jon Evers. Claviériste. L’une des personnes les plus fortes que je connaisse. Je ne sais pas si vous pouvez voir, mais à ses pieds, il y a dix pédales. Il peut tout faire. Ensuite, Ann que je ne vous ai pas présenté, Ann Liu Cannon. Straight from London. Qui est à la guitare et qui est au chant. Vous allez voir, il y a beaucoup de frissons. C'est très émouvant quand Ann joue.
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Direction la grande salle. Comment est-ce que tu te sens en ce moment, à la veille d'une nouvelle tournée ?
Très focus, plus ou moins excité, plus ou moins stressé. Mais surtout, je ne sais pas ce que ça fait d'être sur scène avec un groupe et avec autant de choses. C'est la première fois que ça va arriver. Moi, si j'ai fait de la musique toute seul, c'était que je puisse décider de tout. Et donc d’un coup, c’est assez marrant de faire l'inverse, de déléguer toute une confiance. C'est pour ça que c'était aussi super intéressant de trouver ces humains-là qui avaient des émotions, qui rejoignaient les miennes et de pouvoir créer ensemble quelque chose de sublime.
Tu viens de sortir ton nouvel album. C’est le deuxième mais par contre, tu as sorti une pléthore d’EP.
Oui et j'ai travaillé sur des albums d'autres gens, Vendredi sur Mer, sur Rejjie Snow. Et oui, donc, j'ai sorti deux EP avant le premier album. Mais la différence, c'est que le premier album, il a pris trois ans, il est long. Il y a eu le covid. J'adore cet album, mais c'est un album qui a été beaucoup moins rapide, beaucoup moins spontané. Cristal Medium Blue, rien à voir, easy. Pendant la première tournée américaine, je me suis retrouvé à un moment avec Empress Of. Il se trouve qu'on a réussi à trouver ce studio qui s'appelait Honeymoon. C'est là qu'on a fait Highway. Et à ce moment-là, il n'y avait rien. Il n'y avait pas encore de Cristal Medium Blue, vraiment.
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Je n'avais pas encore vraiment assumé ce truc-là et c'est en faisant Highway que je me suis dit OK, il y a quelque chose avec ce nouveau son qui est plus acoustique, qui est plus sixties. Je crois qu'il faut aller par là donc j'ai décidé d'aller enregistrer dix jours dans le même studio. Et c'est là en fait, j'ai fait OK, let's go ! J'ai commencé par la batterie dans la vie, je remets des vrais drums dans tous les morceaux. Clac. J'ai enregistré toutes mes drums. J'étais tout seul dans le studio donc j’appuyais sur espace après je courais pour enregistrer. Et c'est aussi le moment où j'ai commencé à vraiment, vraiment aller dans l'univers. Guitare, batterie, piano et à abandonner quasiment les synthés quoi tout ce truc.
Moi, j'ai envie qu'on aille vraiment un peu dans ton intimité, tu as grandi où ?
J'ai grandi à Paris, mais j'ai eu la chance d'aller vivre à New York pendant un an quand j'avais dix ans. Et c'est là que j'ai découvert la batterie. Avant ça, j'étais un peu déconnecté. Il manquait un… C'est comme une caméra qui se doit se déflouter quoi. C'est vraiment la batterie qui m'a refixé. La première fois que j'ai vu quelqu'un en jouer dans la vraie vie. Je m’en souviendrais toute ma vie de l’avoir… Presque l'impression de voir un escalier se créer. Et après, quand je suis rentré en France, j'ai tout de suite un groupe et tout ça et j'ai eu mon premier clavier. Ce clavier, c'est le technics KN1000 qu'on voit sur la pochette de Yo Bene qui est mon premier EP où il y a flash où c’est le son qu’on entend là.
À 17 ans, tu abandonnes ton nom de famille pour devenir Lewis OfMan. Pourquoi as-tu choisi OfMan ?
Parce que les jeux vidéos encore. C'est mon grand frère qui jouait à PES 6 et qui avait créé son joueur et il l'avait appelé, Jose Del Hombre. D'accord. Et donc on avait traduit les noms. Ah, del hombre, il me disait en anglais c'est cool of man et tout. Je me fais un compte Soundcloud parce que je commence à faire des morceaux que j'ai envie de mettre en ligne et tout. Et là, Artist Name. Eh bien Lewis Ofman, that’s it.
Comment tu composes à l'époque ?
J’ai un petit iPad et c'est très, très bien GarageBand sur iPad. Il y a plein de synthés, il y a des violons, il y a des guitares électriques, il y a des drums. Enfin, tout est tactile hein, j’étais là et je sortais des morceaux. Mon père m’avait emmené voir une expo au Palais de Tokyo, j’avais fait des photos de l'exposition. J'avais une typo, je mettais ça avec des bandes blanches et il y avait une super esthétique. C'était ma cover et j'ai sorti un premier EP à cette époque-là, qui s'appelait Disconsolate.
Tu écoutes quoi à ce moment-là ?
J’écoute genre du SoundCloud. J'écoute XXYYXX qui était un producteur qui cartonnait sur Tumblr. C'est toute une espèce de mélancolie, de nostalgie d'Internet où c'était vachement ce genre de météo, ces espèces de tristesse romantique mais qui du coup étaient joyeuses. C'était pas mal. J'écoutais pas mal de French touch 2.0, j'écoutais Darius avec son son qui s’appelle espoir avec des très, très beaux accords. Je vibrais totalement. Beaucoup d'émoi teenage.
On te surnomme le roi de la mélodie. Est-ce-que tu assumes ce surnom ?
Bah c'est très gentil de dire ça. Moi, je sais que j’adore la mélodie, c’est sûr. C’est super une mélodie bien, tu la prends comme ça. C'est comme un éclair.
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Est-ce-que le Lewis Ofman de "Plein de bisous" et le Lewis Ofman d'aujourd'hui, c'est le même ?
Oui, oui, oui. En fait, je ne dis pas que ce que je fais maintenant ressemble à Plein de bisous. Mais c'est plus que Plein de bisous, c'était une chanson, en tout cas dans ce qui était de la partie composition, production, ça rejoignait vachement des influences que j'ai encore. Là où d'autres choses comme attitude que j'ai fait ensuite, c'est plus électronique.
Attitude, tu arrives en 2020 avec ce morceau et on l'entend partout.
Mais c'est marrant parce qu'il n'a pas pris tout de suite. Il a vraiment pris son temps. Il est sorti au pire moment possible, je pense, en 2020. Ensuite, il a juste fait sa route comme ça. Au début, il était un peu loki. Et puis après, il a commencé à se propager comme ça. Je me souviens, j'avais un ami qui m'avait dit c'est un morceau où quand tu le joues, tout le monde a l'air stylé autour.
Dans ton nouvel album, il y a une chanson, ça s'appelle "Frisco Blues" et j'adore cette chanson. On se croirait vraiment dans les 70's, dans un San Francisco psychédélique.
C'est exactement ça l'esprit que j'ai voulu donner quoi. La façon dont j'ai eu envie de le faire, c'est que j'ai pris un Flixbus de Florence à Marseille. C'est une grande traversée, c’était genre toute la journée, départ à 6 h du matin.
Qu'est-ce-qui t’as pris de faire un truc pareil ?
Florence-Marseille, c'est une galère de ouf. Ben oui, il n'y a pas vraiment d’autres solutions. Il n'y a pas vraiment d'avions qui font ça. Mais, il y a un Flixbus et c'est magnifique. Tout le monde devrait faire ce trajet. Parce que ça permet des choses chouettes après. Et je me souviens, il y a un moment où on était au début du sud de la France, début décembre, et je me souviens des collines en contre-jour avec le coucher de soleil qui faisait comme la forme d'un visage, de quelqu'un qui dort et j'écoutais des interviews de Jim Morrison, les interviews très bizarre qu'il a fait chez lui. Je voyais dans le bus que des gens de mon âge quoi, ils jouaient aux cartes. Il y avait une vraie vibe. Après, quand je me suis retrouvé avec un synthé, je l’ai chopé à New York. À New York, j'avais aussi chopé un vinyle avec une compilation de break.
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Je me suis dit tu sais quoi ? Je n'ai jamais vraiment fait ça. Je vais sampler. Donc, j'avais trouvé ce sample qui s'appelle Frisco Disco de Eastside Connection avec une chorale. En pitchant, voilà, j'avais envie un peu de ce teint un peu plus ado comme des ados qui chantent, des ados américains qui ont genre 16 ans. Et j'avais ce sample qui tournait, j’avais ma guitare et j'ai joué et là, j'ai vu le paysage, Florence-Marseille, le flixbus, j'ai vu les collines avec le visage, le sunset et donc c'est comme s'il y avait eu une espèce de trigger où tout était revenu. Je ne sais pas, il y a une espèce d'explosion qui s'est passée. Ce qui a été fait quelques mois après, c'est moi qui chante à la fin. J’avais ces paroles déjà depuis longtemps où le manque qu'on peut ressentir sans vraiment savoir qui nous manque mais on ressent du manque. Quand moi, j'étais face au Sunset, avec les visages des Collines, je ressentais ça. Quelqu'un me manque, mais je ne sais pas qui c'est.
Est-ce que tu peux me raconter ta précédente tournée aux États-Unis ? Tu as fait le Saint-Graal Coachella.
Je me souviens du sentiment. Déjà, il faut le faire deux fois. C'est deux week-end. Premier week-end, voilà on fait le premier concert. Il y a une espèce de truc comme ça où on lévite légèrement et on se dit bon, ok, c'est ça. Et après, quand je le refais la deuxième fois, quand je suis arrivé au début sur scène, il n'y avait pas beaucoup de gens parce que c'était le début de la journée. Je me suis dit ah ok, bon ça va être un Coachella chill. En fait, genre littéralement j'arrive sur scène et là, c'est une foule de gens qui déboule. Je m’en souviens des gens qui couraient pendant que je jouais Attitude. Je suis très stressé parce que t’as Mac Demarco et Thundercat qui sont juste à côté. Littéralement, je passe entre eux deux. Quand tu joues, il y a un peu deux dieux qui sont à côté. C'est là que tu te prends le truc, tu fais ok putain. Ça y est, j'ai fait le dream. Et donc le sentiment que j'ai eu, c'était bon, je peux me détendre. Je me souviens particulièrement de la sensation d'être en lévitation légèrement, de planer un tout petit peu au-dessus du sol.
Retrouvez l'intégralité de l'interview de Lewis Ofman dans Toki Woki, ce soir à 23.50 sur France 3 Paris Île-de-France ou en replay sur france.tv/idf