Après deux ans d'apprentissage intensif de la musique classique, les jeunes musiciens de l'orchestre Démos de Paris vont se produire à la Philharmonie pour un week-end de concerts. L'occasion pour ces jeunes issus des quartiers prioritaires de montrer tout leur savoir-faire. Nous les avons rencontrés pour leurs ultimes répétitions.
En ce jour de fête de la musique, la Philharmonie de Paris prend des allures de ruche. Dans la grande salle Pierre Boulez, les 105 enfants de l'orchestre Démos de Paris sont réunis pour la dernière répétition générale, avant leurs trois grandes représentations qui auront lieu ce vendredi, samedi 24 et dimanche 25 juin.
Première étape pour ces musiciens en herbe : apprendre à entrer sur scène. "Qui entre du côté jardin, et qui entre du côté cour ?", demande une musicienne en charge du groupe. Après quelques minutes laborieuses, tous les enfants sont prêts en coulisse à faire leur apparition.
Et c'est sur le canon "le cœur des gens" de Daniel Beaume qu'ils font finalement leur apparition. "Écoutez le cœur des gens, comme il bat tout doucement. Il bat comme ça, tout bas, tout bas. Mais le cœur d'un enfant, va toujours de l'avant. Lui, il n'a pas le temps, pas le temps…" Un chant à l'image du projet Démos, qui permet depuis 2010 de faire découvrir la musique classique à des enfants qui en sont éloignés pour des raisons géographiques, car trop loin des institutions culturelles, ou qui s'en sentent éloignés pour des raisons économiques et sociales.
Trois ans d'enseignement classique
C'est pourquoi Démos, acronyme pour Dispositif d'éducation musicale et orchestrale à vocation sociale, cible les enfants âgés de 7 à 12 ans venant de zones rurales éloignées ou issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QQPV).
"Après plusieurs expérimentations dans des écoles, nous avons constaté que les initiations ponctuelles à la musique n'avaient pas le même impact que les projets de longue durée", explique Gilles Delebarre, directeur du projet Démos à la Cité de la musique - Philharmonie de Paris. Un travail de longue haleine en effet puisque les enfants sélectionnés pour intégrer Démos apprennent à chanter et à jouer d'un instrument de musique trois heures par semaine, pendant trois ans.
Former de futurs citoyens par la musique
À la suite de quoi, environ la moitié d'entre eux poursuit la musique et intègre le conservatoire. Mais qu'importe dans le fond, l'essentiel n'est pas là : "Ces trois années ont un impact fort pour eux, en tant qu'être humain mais également en tant que citoyen. Ils gagnent en aisance sociale, puisqu'ils sont en contact régulier avec des musiciens professionnels, en confiance en soi, en expression orale et obtiennent souvent de meilleurs résultats scolaires", confie Gille Delebarre, à la tête du projet depuis sa création.
Lors de leurs cours hebdomadaires, les musiciens de Démos sont répartis par groupe de quinze, en fonction de leur famille d'instruments. Puis, ils se retrouvent en orchestre complet toutes les six semaines afin de se mettre au diapason. Dans cet orchestre parisien, les jeunes sont issus des XIe, XIIe, XIVe, XVIIIe, XIXe et XXe arrondissements.
Hanane a 11 ans, elle est en CM2 et ce vendredi soir, elle montera sur scène après deux ans d'apprentissage de la clarinette. "J'aime bien faire de la musique car c'est joli, c'est doux", confie-t-elle. Pour Aya, 8 ans, cette représentation à la Philharmonie de Paris est une première. Malgré le public nombreux, la jeune harpiste n'est pas stressée. Pour elle, la musique est un bon moment, même si "c'est difficile parfois de tout comprendre, et de réussir à suivre", raconte-t-elle.
Une approche multiculturelle
Sur scène, un musicien venu du Rajasthan, un Etat du nord de l'Inde, fait chanter les enfants au son de ses tambours et de sa flûte. Un accompagnement peu conventionnel voulu par Démos, afin de parfaire leur éveil : "Ils apprennent certes la musique classique, mais pour former des citoyens du monde il faut en avoir la connaissance, au-delà de notre seul patrimoine."
Ce programme est financé principalement par des acteurs publics. Ainsi, l'Etat, le ministère de la Culture, de l'Education nationale, la région, les départements et les collectivités locales y contribuent majoritairement. Tout comme la CAF, la Caisse mais également le mécénat qui compte pour un tiers du budget. Une diversification des ressources financières qui permet au projet d'être totalement gratuit pour les bénéficiaires, alors que la prise en charge d'un seul enfant coûte environ 2 500 euros par an.
Au total, quatorze orchestres Démos sont déployés en Île-de-France. D'autres vont également se produire sur scène ce week-end, c'est le cas des ensembles du Grand Paris Grand Est et du Centre Val-de-Marne qui seront à la salle des concerts de la Cité de la musique le dimanche 25 juin.
Toute la programmation à retrouver ici.