Violences intrafamiliales : "Il faut se donner les moyens d'endiguer ce fléau"

Mesures d'urgence, formation, "pôles spécialisés" dans les tribunaux… Eric Dupond-Moretti a présenté ce lundi une nouvelle série de mesures contre les violences conjugales. Entretien avec Emilie Chandler, co-autrice du rapport remis au garde des Sceaux.

L’objectif du rapport parlementaire remis à la Chancellerie : améliorer le traitement judiciaire des violences intrafamiliales. Le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti a détaillé ce lundi de nouvelles mesures pour lutter contre ces violences, via des décrets ou des projets de loi ces prochains mois lors d'un déplacement à la Maison des femmes de Saint-Denis.

Le gouvernement veut notamment créer un "pôle spécialisé dans les violences intrafamiliales" dans 164 tribunaux français, mais aussi permettre à un juge de prononcer une ordonnance de protection en 24 heures, autorisant l'éviction du conjoint violent ou une interdiction de contact, en cas "d'urgence extrême".

Missionnée par la Première ministre Elisabeth Borne dans le cadre de son plan en faveur de l'égalité femmes-hommes, la député Renaissance du Val-d’Oise, Emilie Chandler a co-signé le rapport à l’origine des mesures, avec 59 propositions présentées sur plus de 200 pages.

Emilie Chandler explique avoir travaillé "en refaisant le parcours de la victime" du signalement des faits jusqu’à la prise en charge de la victime, en passant notamment par le travail des médecins et les différentes étapes de la procédure judiciaire ; mais aussi en retraçant le parcours du côté des auteurs des violences, "afin d’éviter la récidive".

Féminicides, suivi des conjoints violents, récidives… Dans le rapport, vous appelez à plus de "coordination". Selon vous, contre quelles défaillances faut-il lutter en priorité ?

Emilie Chandler : Le problème principal, c’est celui de la circulation de l'information, quand un dossier qui a fait l'objet d'un signalement va se retrouver sur un bureau alors qu'il y avait une situation de grand danger. Comment fait-on pour que l'information circule mieux, de manière transversale et transdisciplinaire ?

Il y aussi la question de la circulation de l'information au sein du tribunal. Par exemple, quand un homme passe en comparution immédiate pour des violences sur sa compagne, c'est en général l'avocat qui vient expliquer qu'il y a une procédure de divorce en cours… Si l'information circule mieux, les dossiers sont traités beaucoup plus rapidement.

Quelles autres défaillances pointez-vous du doigt ?

Il faut plus de moyens pour l'ensemble des acteurs : pour la police et la gendarmerie, la justice, et le financement des associations. Et il faut une formation plus poussée, notamment sur les mécanismes de l'emprise, du contrôle coercitif, qui sont des choses qui ne sont pas connues par tous les policiers ou gendarmes. Ça doit permettre à la personne qui vient déposer une première plainte d'être prise au sérieux dès ce moment-là, même si elle décrit un mécanisme qui ne semble pas 'grave'. Il faut que l'ensemble des professionnels soient habilités à identifier ces 'bas bruits'.

Il faut aussi une meilleure formation pour la prise en charge psychologique. Il y a une manière particulière de prendre en charge une victime de violences intrafamiliales. C'est un type de violences qui ne ressemble à rien d'autre. Ces violences se passent dans un endroit fermé, avec beaucoup de silence à l'extérieur. Nous soulignons aussi l’importance de la spécialisation.

Avez-vous été entendues par le gouvernement ?

Oui, les grandes recommandations de notre rapport sont reprises, pour un traitement judiciaire plus rapide et plus efficace. Il faut se donner les moyens d'endiguer ce fléau des violences intrafamiliales. Lorsqu'on est dans son foyer, ça doit être le premier lieu de sécurité, tant pour les adultes que pour les enfants. C'est une priorité pour le gouvernement et le président de la République, les mesures seront mises en œuvre avant la fin de l'année.

Avec Emmanuelle Hunzinger.

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