Saisi par 203 ex-salariés CGT de l'usine PSA d'Aulnay-sous-Bois qui contestaient le motif économique de leur licenciement en 2013, le conseil de Prud'hommes de Bobigny a donné raison mardi à 55 d'entre eux et débouté les autres.
Selon le jugement consulté par l'AFP, le conseil a requalifié le licenciement économique de 55 demandeurs en "licenciement sans cause réelle et sérieuse" et condamné le constructeur automobile à leur verser une indemnité qui s'élève, en moyenne, à 12.000 euros.
"Ils ont considéré que PSA n'avait pas rempli son obligation de reclassement et c'est pour cette raison qu'ils ont requalifié le licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse", a expliqué à l'AFP Me Marie-Laure Dufresne-Castets, l'avocate des 203 salariés.
Lors de l'audience le 8 décembre, elle avait plaidé que les licenciements réalisés par PSA dans le cadre de la fermeture de cette usine au nord de Paris étaient en réalité des "licenciements d'économie" et soulevé le fait que le groupe n'avait pas rempli ses obligations en matière de reclassement des salariés.
En revanche, les conseillers ont débouté les 148 autres ex-salariés, qui ont en commun d'avoir participé à la grève de quatre mois contre la fermeture de l'usine et touché en mai 2013 une prime exceptionnelle de fin de conflit de 19.700 euros. Car pour percevoir cette indemnité, ils devaient s'engager à renoncer à poursuivre leur employeur en justice.
Toutefois, en application d'une décision récente de la cour d'appel de Paris, le tribunal a condamné PSA à verser cette prime exceptionnelle aux 55 anciens salariés qui n'avaient pas pris part à la grève, au nom du principe d'égalité de traitement.
Au total, 550 salariés-grévistes avaient touché cette prime exceptionnelle. "On va faire appel pour ces 148 qui sont déboutés", a annoncé l'avocate, relevant "un manque de cohérence" dans une décision qui "dit que cette prime doit être attribuée à tout le monde et que ceux qui ont signé cette transaction ne sont pas recevables". "Sur le principe, PSA est condamné, c'est quand même une victoire", a expliqué Philippe Julien, secrétaire général CGT d'Aulnay-sous-Bois, à une cinquantaine d'ex-salariés présents dans l'enceinte du tribunal à Bobigny.
"C'est une victoire d'autant plus importante qu'ils sont encore en train de faire reculer la loi sur le licenciement", a renchéri Me Dufresne-Castets en référence à la loi El Khomri, qualifiée de "mauvaise loi, contre les salariés". Pour les déboutés, "on a de très bonnes chances de gagner en appel car la jurisprudence de la cour de cassation dit très clairement qu'un patron n'a pas le droit de demander à un salarié de renoncer à ses droits pour pouvoir bénéficier d'une mesure comme une prime", a souligné de son côté Philippe Julien. "PSA prétendait avoir des difficultés financières (...) alors que la preuve est établie que la décision de PSA de fermer Aulnay a été prise l'année (2010) où le groupe a battu tous ses records de ventes avec 3.200.000 véhicules vendus", a réagi la CGT de PSA dans un communiqué.
"Ce jugement doit encourager tous les salariés de ce pays à se joindre aux manifestations du 9 mars pour exiger le retrait total du projet de loi El Khomri qui ferait revenir le monde du travail 100 ans en arrière, en supprimant tous les droits acquis par la lutte des travailleurs", a-t-elle ajouté. Interrogé sur place par l'AFP, l'avocat de PSA n'a pas souhaité faire de commentaire.
Mi-décembre, des anciens salariés de Sud, représentés par Me Fiodor Rilov, avaient obtenu l'annulation de leur licenciement économique, ce qui implique qu'ils vont devoir restituer à PSA les indemnités transactionnelles qu'ils ont perçues, sans garantie d'en obtenir de supérieures.
► Un reportage de Valentine Ponsy et Louise Simondet