Les Séquano-Dionysiens sont appelés aux urnes les 20 et 27 juin pour renouveler le Conseil départemental. Fief historique de la gauche, le département peut-il basculer à droite ? La question se pose. Des candidats de Seine-Saint-Denis débattaient sur l'antenne de France 3 Île-de-France ce lundi.
Les 20 et 27 juin prochains, les 765 174 électeurs, selon les chiffres de la préfecture de Seine-Saint-Denis, sont appelés à voter pour renouveler leur Conseil départemental. 42 conseillers y siègent. Le budget total s’élève à plus de 2 milliards d’euros. Dans ses compétences : la gestion des écoles, des collèges, de la petite enfance, le versement du RSA ou encore la gestion de l’eau et l’entretien des routes.
► REPLAY. Revoyez le débat des candidats aux élections départementales en Seine-Saint-Denis :
Première thématique abordée lors de ce débat : l'emploi et la formation. Philippe Dallier candidat LR-UDI, veut "donner une chance à chacun de s'en sortir. Cela passe par la formation". Il souhaite ainsi lutter contre l'échec scolaire et promouvoir l'accompagnement.
Stéphane Troussel, candidat PS-Union des gauches et actuel président du département, affirme vouloir doubler les crédits d'insertions pour les faire passer à 50 millions d'euros. Il souhaite la renationalisation du RSA qui, actuellement, coûte un quart du budget au département. "Je n'accepte pas que les jeunes soient les grands oubliés de la crise actuelle. La France est l'un des rares pays à ne pas avoir de revenu social pour les jeunes", a-t-il déclaré.
Patrice Anato, candidat LREM et député dans le département, ne pense pas que la renationalisation du RSA soit une solution. Il aimerait "un concourt de l'État sur le budget pour que le département continue à assumer cette responsabilité". Il veut accentuer la formation pour les jeunes et les demandeurs d'emploi.
Le candidat du Rassemblement national, Sébastien Jolivet, fait le constat d'une inadéquation entre les offres d'emplois proposées (des emplois trop qualifiés selon lui) et la population.
"À la place de M. Troussel, avant de demander de l'argent à l'État, je demanderais d'appliquer la loi et d'expulser les centaines de milliers de clandestins en Seine-Saint-Denis. À l'origine de beaucoup de maux de la Seine-Saint-Denis, il y a le fait que l'État ne connaît pas le nombre d'habitants en Seine-Saint-Denis. Il faut couper toutes les pompes aspirantes de l'immigration", a-t-il déclaré.
Pour Bally Bagayoko, candidat LFI, l'État doit rendre l'argent qu'il doit au département : "L'État doit 2 milliards d'euros dans le cadre des transferts de compétences". Il souhaiterait adopter un plan pour la garde d'enfants et engager des moyens financiers dans des moyens de construction en Seine-Saint-Denis.
Enfin, Fabien Gay, le candidat PCF, parle lui d'une somme de 3,5 milliards d'euros. Il a souligné que seuls "deux départements ont des crèches départementales. Le Val-de-Marne et la Seine-Saint-Denis, c'est l'héritage communiste". Il veut aussi "se battre pour que les entreprises qui agissent embauchent des Séquano-Dionysiens", soutenir l'économie sociale et solidaire et créer une agence départementale de l'insertion professionnelle.
Des mesures pour la jeunesse
Autre thématique discutée lors de ce débat : la situation de la jeunesse. Avec une proposition qui divise, la création d'un RSA jeune. Le candidat LFI, Bally Bagayoko, veut une allocation d'autonomie "pour faciliter les premières étapes de la vie" et dit vouloir allouer un milliard d'euros dans les collèges. Ces établissement relèvent en effet de la compétence des départements pour les infrastructures.
Patrice Anato, candidat LREM, veut un revenu universel d'activité pour les jeunes : "un droit qui accompagne le jeune jusqu'à ce qu'il s'insère professionnellement accompagné d'un droit à l'erreur". Il aimerait aussi la création d'établissements d'excellence dans le département.
Sébastien Jolivet, candidat RN, veut surtout développer l'apprentissage. "Le département doit agir pour valoriser l'apprentissage et les travaux manuels", a-t-il affirmé. Il s'est prononcé pour un RSA jeune "dans le cadre de l'apprentissage". Il a également abordé le thème de la sécurité dans les collèges. Il souhaiterait qu'un plan d'un milliard d'euros baptisé "sécu-collèges" voit le jour.
L'actuel président du département, Stéphane Troussel (PS - Union des Gauches), veut expérimenter le RSA jeune en affirmant que la France est "l'un des seuls pays de l'Union européenne qui n'ait pas étendu ses minimas sociaux aux jeunes. Il est temps de faire cette proposition". Il voudrait lancer une expérimentation pour les jeunes en formation ou les étudiants pendant une période restreinte.
Alors que de nombreux candidats ont déploré la dégradation des collèges en Seine-Saint-Denis, ce dernier veut mettre 1 milliard d'euros, notamment sur la rénovation des bâtiments et défend son bilan et la création de 26 collèges : "Nous sommes le département qui a créé le plus de collèges neufs", a-t-il déclaré.
Son adversaire de la droite et du centre-droit, Philippe Dallier (LR-UDI), rejette l'idée d'un RSA jeune mais veut "mettre le paquet sur la formation, pas de verser des allocations". Il pointe le financement du RSA jeune alors que "le département est le plus endetté de l'Île-de-France".
Selon lui, la sécurité dans les collèges, mais aussi dans leurs abords, est un problème et il aimerait que le Conseil départementale lutte contre le trafic de drogue et propose de créer des équipes de préventions qui pourraient intervenir à la demande des chefs d'établissement.
Fabien Gay, candidat du Parti communiste, soutient un plan d'un milliard d'euros pour rénover et construire des collèges. Il voudrait financer un ordinateur pour chaque collégien qui rentre en 6e, renforcer la carte Imagine R et construire un observatoire de lutte contre toutes les discriminations.
21 cantons, 112 binômes
Pour ces élections, 112 binômes mixtes, composés d’une femme et d’un homme et leurs suppléants se présentent pour l’emporter dans les 21 cantons que compte le département.
Le département est actuellement aux mains du socialiste Stéphane Troussel qui termine son deuxième mandat. Lors des précédentes élections, la gauche a remporté 12 cantons, 7 pour l'alliance PS-EELV-PRG-MGC et 5 pour le Front de gauche contre 9 pour la droite et le centre. Le Front National (RN) lui n'a pas d'élus, battu dans l’unique canton où il avait pu se qualifier pour le second tour.
Un fief communiste et socialiste…
Depuis la création du département en 1968, communistes puis socialistes se sont succédés à sa tête. La droite gaulliste ou libérale n’a jamais accédé aux commandes de ce territoire traversé par de nombreuses fractures, sociales, économiques mais qui est aujourd’hui en pleine mutation. Des nouveaux quartiers comme les Docks de Saint-Ouen sont sortis de terre. Des barres HLM ont été rasées, un grand hôpital de l'AP-HP pourrait voir le jour, le Conseil régional s’y est installé. Sans parler du Stade de France inauguré le 28 janvier 1998 par Jacques Chirac ou des JO de 2024 qui seront accueillis en grande partie sur les terres du 93.
Aujourd’hui le département qui compte 1 632 677 habitants reste encore un des plus pauvres de France mais il tend à montrer un visage bien différent des clichés du "9-3", attirant une nouvelle population, dont le vote n'est plus forcement à gauche. En témoigne les dernières élections municipales.
… qui pourrait basculer à droite
La droite peut-elle ainsi gagner les élections départementales ? Voici l’enjeu de ses élections. Le duel pourrait être serré. Plusieurs cantons sont susceptibles de faire basculer la majorité compte tenu de la percée des voix de droite en 2020 :
Le canton de Saint-Ouen actuellement à droite où l’ancien maire William Delannoy, UDI, et l’actuel maire socialiste Karim Bouamrane, vont s’affronter.
Le canton d’Aubervilliers où la toute nouvelle maire UDI, Karine Franclet, aimerait bien l'emporter forte de sa victoire sur les communistes aux municipales en 2020.
Le canton de Noisy-le-Grand pourrait faire lui aussi faire basculer la majorité. Battus de peu il y a 6 ans, l’actuelle maire Brigitte Marsigny (LR) et Eric Allemon (UDI) sont bien décidés à prendre leur revanche sur le duo sortant Emmanuel Constant (PS) et de Frédérique Denis (EELV).
Deux autres cantons sont à surveiller, celui de Tremblay en France et celui Sevran-Villepinte.
"L’Union des gauches"
Droite et gauche ont affiné leur stratégie. Stéphane Troussel lui a choisi "l'Union des gauches", qualifiée d'historique au vu des luttes fratricides entre socialistes et communistes dans l'histoire de ce département.
Pour contrer la montée de la droite et l’émiettement des voix de gauche, les socialistes, les écologistes d'EELV, les Radicaux de gauche, Générations.s et la Gauche Républicaine et Socialiste (GRS) ont fait liste commune dès le premier tour sur la totalité des 21 cantons.
Avec le Parti communiste, des accords ont été signés "au cas par cas" dans 15 cantons. A Saint-Ouen, canton actuellement à droite, le maire socialiste Karim Bouamrane se présente avec la communiste Emilie Lecroq. A Aubervilliers, c'est un duo socialiste et communiste qui se présente pour contrer la droite.
PS et PCF ne s'affronteront que dans des circonscriptions où la droite n'est pas susceptible de l'emporter comme à Saint-Denis ou Pantin par exemple.
La France Insoumise ne fait pas partie de cette "Union des gauches". Néanmoins, les Insoumis ont fait alliance avec le PCF sur la circonscription de Tremblay-Montfermeil. Le tandem est composé de Dominique Dellac (PCF) et Pierre Laporte (LFI). Un tandem soutenu par Stéphane Troussel où la liste d''Union des gauches" n'a pas présenté de candidat. Explication : il y a 6 ans dans ce canton, Jordan Bardella, tête de liste RN aux régionales, était arrivé en tête au premier tour.
A droite, des municipales aux départementales
La droite et le centre sont aujourd’hui à la tête de 9 cantons. Deux de plus, et ils pourraient remporter les élections départementales.
"Surfer sur la vague des municipales", voici la stratégie du LR, de l’UDI, et des Centristes en Seine-Saint-Denis. Parmi les 112 binômes, 9 sont des maires LR ou UDI. Aux dernières municipales, les villes d'Aubervilliers, Bondy ou Neuilly-sur-Marne ont basculé. Aujourd'hui, la Républicaine Brigitte Marsigny à Noisy-le-Grand, la Centriste Karine Franclet à Aubervilliers ou Pierre-Yves Martin (DVD) réélu au premier tour des municiaples à Livry-Gargan espèrent bien faire fructifier leur dynamique électorale en se présentant sur leurs cantons respectifs.
Le RN présente15 binômes soit 30 candidats. Ses cantons de prédilection sont Drancy et Tremblay-en-France .
Enfin "Maison Commune", la liste LREM présente des candidats dans 8 cantons seulement.
Dernière inconnue et pas des moindres, l’abstention. La Seine-Saint-Denis vote traditionnellement peu. En 2015, l’abstention a atteint les 65,5 % au deuxième tour.
Le débat sur France 3 Paris-Île-de-France
Sur notre plateau : Stéphane Troussel (Union des Gauches) candidat à La Courneuve
Philippe Dallier (LR) candidat à Bondy
Patrice Anato (LREM) candidat à Noisy-le-Grand
Sébastien Jolivet (RN) candidat sur le canton de Montreuil-1
Bally Bagayoko (LFI) candidat sur canton de Saint-Denis-1
Fabien Gay (PCF) candidat au Blanc-Mesnil