Il a passé sept ans en prison pour des viols qu'il a toujours niés. Le 24 juin 2011 la justice l'innocentait. Il attend toujours que l'Etat répare le préjudice matériel dont il a été aussi victime.
Loïc Sécher s'est installé dans le Finistère, où il essaie de se reconstruire. Il n'a pas reçu d'indemnité pour l'erreur judiciaire dont il a été victime. Âgé de 51 ans, il vit du RSA de la CAF de Quimper: 417 euros par mois. L'an dernier il a dû se rendre aux Restos du coeur et faire la manche, des humiliations supplémentaires.Son avocat, Me Dupond-Moretti réclame plus de 2 000 000 d'euros, pour les jours passés en prison, pour le préjudice moral lié à la procédure judiciaire. Mais il s'estimera dit-il vraiment libre quand il aura obtenu un minimum d'argent, même pas de millions, juste de quoi vivre dignement.
Rappel des faits José Guédes
Audience devant la cour d'appel de Rennes
Son avocate a réclamé une somme de 2,4 millions d'euros, pour l'essentiel au titre des préjudices moral et matériel, alors que le défenseur de l'agence judiciaire du Trésor, Me Philippe Billaud, a proposé une indemnisation de l'ordre de 600.000 euros.
Me Alice Cohen-Sabban, du cabinet Dupont-Moretti, a appuyé sa demande de réparation en rappelant les conditions de détention très éprouvantes subies par son client qui s'est trouvé dans "une situation cauchemardesque (..) détruit, broyé, par le système", ainsi que par les failles de l'enquête et les défaillances des experts.
L'avocate, dont les propos n'ont été contestés ni par l'avocat général ni par Me Billaud, a retracé l'histoire de 3.856 jours, de l'accusation jusqu'à la reconnaissance de l'erreur judiciaire en juin 2011, marquée par une incarcération à l'ancienne
maison d'arrêt de Nantes dans une cellule où chaque prisonnier disposait de 3 m2, "alors que 5 m2 sont prévus pour les chiens en chenil". "Il restait assis par terre dans un coin à attendre que ça se passe", a-t-elle dit.
Ensuite, à la maison d'arrêt de Rennes aujourd'hui désaffectée, M. Sécher devait être victime du sort réservé aux "pointeurs", des violences et agressions à l'origine d'une tentative de suicide puis d'une grève de la faim et de la soif. En raison de contraintes judiciaires, "M. Sécher n'a pu être aux côtés de son père, mort de chagrin le 31 mars 2011", a poursuivi l'avocate, qui a étrillé la conduite de l'enquête ainsi que le rôle joué par les experts "qui l'ont considéré comme un pédophile pervers".
Depuis un an sans travail
"Aujourd'hui, il lui est impossible, même avec la meilleure volonté du monde, de trouver un emploi", a ajouté l'avocate qui a réclamé en outre une indemnisation pour la soeur et les deux frères de l'ancien accusé.
Me Billaud a justifié sa moindre proposition d'indemnisation au titre de la "rigueur budgétaire extraordinaire" tout en reconnaissant le "gâchis judiciaire" de l'affaire.
De son côté, l'avocat général a rappelé que M. Sécher n'avait "jamais été condamné, ce qui rajoute au choc carcéral".
Le premier président de la cour d'appel Philippe Jeannin a, lui, évoqué une "indemnisation qui ne sera jamais parfaite" et qui ne réparera pas "le prix de la liberté".
Loïc Secher dans l'attente urgente avant le délibéré du 25 septembre
"Je suis très déçu de ne pas avoir reçu de provision. Je vais continuer avec la survie", a déclaré à l'issue de l'audience Loïc Sécher qui avait entrepris, début juin, plusieurs actions publiques pour dénoncer ses conditions matérielles d'existence dues à l'absence d'indemnisation. La procédure ne permet pas l'octroi d'une provision, a rappelé le président.
Réaction de Loïc Secher