Nantes : le chanteur Dominique A commence l'année 2013 dans la peau d'un héros de bande dessinée

Dominique A... Vous le connaissiez chanteur ? Vous allez le découvrir en héros de BD ! Un double graphique, chauve comme l'original, plongé dans une sombre histoire imaginée par Arnaud Le Gouëfflec et Olivier Balez. Rencontre...

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L'histoire commence par une lettre anonyme laconique mais ô combien explicite : "J'aurai ta peau Dominique A". Ainsi donc, un détraqué ou peut-être même un fan extrémiste voudrait attenter à la vie de notre chanteur nantais. Bien sûr, ce n'est que fiction mais quand même, ça fait un choc.

"Dans quel(s) guêpier(s) m'ont-ils fourré ?", s'interroge d'ailleurs le vrai Dominique A en préface de cet album paru aux éditions Glénat. Il a beau connaître et apprécier le talent des auteurs, Arnaud le Gouëfflec et Olivier Balez, à qui l'on doit notamment "Topless" et "Le Chanteur sans nom", il est effectivement en droit de se poser quelques questions.

C'est auprès d'un autre chanteur, Philippe Katerine, que le faux Dominique A tente de trouver un début de réponse. "Vingt ans de chansons d'auteur... ça a dû finir par énerver quelqu'un ! ", lui rétorque celui-ci. On peut toujours compter sur les amis pour avoir une analyse fine des choses ! "Ben, d'habitude, les dingues, ils s'attaquent aux stars, pas aux chanteurs plus... enfin, moins... C'est juste que t'es pas super super connu". Sympa le Philippe !

Et de suggérer finalement à Dominique A d'abandonner son style pour quelque chose de plus funk, plus coloré. Dominique A en rose et vert pomme chantant des reprises de Kool & The Gang. On croit rêver !

Bon en attendant, c'est la déprime totale ! Dominique A, le faux, ne comprend pas ce qu'on peut lui reprocher. Et s'il n'y avait que ça ! Mais non, un sosie un peu dingo lui court aussi après. Et si c'était finalement la rançon de la gloire ?

Ecrite par le Brestois Arnaud Le Gouëfflec et dessinée par le Niçois Olivier Balez, cette aventure nous entraîne mine de rien et avec beaucoup d'humour au coeur des tourments qui alimentent l'esprit créatif du chanteur. 

Mais au fait, Comment vous est venue cette idée saugrenue ? Et pourquoi justement Dominique A et pas Didier B ou Christophe C?

Arnaud Le Gouëfflec. L'idée nous est venue dans un café, à Olivier et moi, au fil d'une discussion, d'une divagation plutôt, qui nous a conduit à imaginer une histoire de chanteur menacé de mort. Et tout d'un coup, on a pensé à Dominique A. Et c'est là qu'on a ri car il est impossible d'en vouloir à Dominique A. C'est le contre-exemple même du chanteur qu'on imagine menacé de mort.

A partir de là s'est construit un scénario, en tirant sur le fil des idées. Alors pourquoi Dominique A plutôt que Didier B ? A l'époque, j'avais écrit avec le musicien John Trap un album pour la chanteuse ooTi, sur lequel elle chante deux duos avec Dominique A. J'étais donc en train de redécouvrir ses chansons et ses disques. J'avais adoré "La Mémoire neuve" et ses rythmes latinos décalés, et "Remué", plus expérimental, mais j'avais loupé les autres. J'étais donc en pleine écoute de "La musique" ou de "Tout sera comme avant".

Ses chansons sont très imagées, je trouve, elles suscitent des rêveries et j'étais là-dedans.  L'idée de plonger Dominique A dans une fiction dessinée a fait jaillir d'autres images : on l'a tout de suite visualisé, tout en sobriété, comme une silhouette immédiatement reconnaissable, comme un personnage de BD. Il y a aussi la puissance de la lettre A, ça évoque le K du Château de Kafka, un personnage qui déambule, qui se perd, qui se heurte à des obstacles.

Faut-il détester ou aimer Dominique A pour imaginer un tel scénario?

Olivier Balez. C'est Mel Brooks, réputé pour ses parodies de film au cinéma, qui disait qu'il fallait aimer son sujet pour réussir une bonne comédie. Et on aime Dominique A. Non seulement cela mais aussi on respecte son parcours et ses choix artistiques. On a donc préféré écrire sur ce chanteur plutôt qu'un autre. En plus, comme le disait souvent Arnaud qui a le sens du visuel, Dominique A est un personnage de BD avec son crâne rasé, ses sourcils et ses habits noirs. Un cadeau graphique pour un dessinateur en somme !


L'avez-vous rencontré ou contacté pendant la réalisation de l'album ? Et quelles ont été ses réactions?

A.L.G. Oui, on l'a rencontré pour son concert-anniversaire au théâtre de la Ville, à Paris. On a été frappés par sa disponibilité et par le détachement qui l'animait. Il ne semblait pas touché par la pression. Je dis "semblait" car c'est sans doute plus compliqué que ça, mais sa simplicité et son calme m'ont frappé. En discutant, on s'est aperçu qu'il était amateur de BD, et qu'il avait poussé le bouchon jusqu'à racheter des originaux de Bob Morane. Le genre de pathologie qui ne peut qu'inspirer de la sympathie ! Il nous a par ailleurs laissé une totale liberté, même si on lui a proposé de lui faire lire les planches au fur et à mesure. Ses propos : "si c'est une fiction, je n'ai pas à ramener ma fraise." De la part d'un chanteur qui souffle ses 20 bougies de carrière, ça dénote une fraîcheur et une certaine inconscience, intactes ! Il a insisté pour ne lire la BD qu'une fois imprimée.

Pour vous, Dominique A est avant tout : A un fabuleux auteur, B un grand compositeur, C un immense interprète, D un vrai héros de papier?

O.B. Pour moi il est évidemment tout ça a la fois mais aussi "E comme Etc. " ; c'est à dire tout ce que j'ai découvert de lui en travaillant sur ce livre via des entretiens sur le web, son site Comme certains vivent, quelques échanges avec lui autour d'un verre après le concert ou encore des amis en commun.
Par exemple sa culture littéraire : sur son site comme certains vivent, il répond a une question sur ses livres de chevet… sur une liste de 10, je n'en connaissais aucun ! pourtant je ne me considère pas mauvais en la matière. Même en BD, il va citer des livres très précis. C'est un passionné d'une grande sensibilité.

Votre album n'est pas une biographie, pas totalement une fiction car les personnages, notamment Dominique A et Philippe Katerine, existent. Alors, à quel genre peut-on rattacher votre récit ? Si on peut le rattacher à quelque chose...

A.L.G. C'est un dérapage ! J'aime les histoires qui commencent dans un genre et qui dérapent ensuite !

"Topless", "Le chanteur sans nom" et aujourd'hui "J'aurai ta peau Dominique A"... ces trois récits baignent dans l'univers de la musique. Serait-elle votre carburant principal?

A.L.G. Exactement. Du matin jusqu'au soir. Je suis un passionné de rock garage, de krautrock, de dub et plus le temps passe, plus la curiosité me pousse à écouter d'autres choses. Le graphisme d'Olivier colle idéalement à l'univers de la musique.

O.B. Pour ma part, je ne connais rien a la musique !!! Enfin, je l'écoute mais c'est tout. En revanche, pour chaque récit, j'aime bien travailler son rythme au moment du découpage. Trouver la mélodie sous-jacente aux dialogues pour la servir au mieux visuellement. Cela passe autant par le jeu des cases, du nombre de strips par page, des marges blanches ou noires... que par le dessin.

L'un vit à Brest, l'autre au Chili, ne pouviez-vous pas faire plus simple ? Comment vous organisez-vous?

A.L.G. On s'est rencontré à Paris et on s'est plu tout de suite. Ensuite, l'amour a poussé Olivier jusqu'au Chili. Mais via Skype et les mails, on travaille tout aussi bien que si on vivait dans le même quartier. On se voit sur Paris quand il revient car, quand il revient, il s'avère que ce diabolique individu est de Nice, et moi de Brest...  Bref...

Olivier, on compare souvent votre style graphique à la sérigraphie. Comment le qualifiez-vous précisément ? Et quelles ont été vos influences?

O.B. Je crois que ce sont mes travaux d'illustrations qui m'ont permis d'évoluer vers une voie originale en BD, notamment le travail sur les couleurs. Effectivement, mes principales sources d'inspirations sont les affiches sérigraphiées et aujourd'hui l'ordinateur nous permet d'obtenir des résultats assez proche très facilement.
Je cherche la simplicité en général et donc je passe du temps a identifier le détail qui exprime l'ensemble. C'est vrai en affiche ou pour des couvertures de livres et c'est vrai aussi en BD. Quelques cases nécessitent des détails et d'autres non ; une question de rythme.

Après mes influences sont très variées ; parfois je coince sur des visages parce que je me trouve trop lisse, alors je vais piocher des gueules cassées chez Muñoz. Non pas pour les copier mais pour "huiler" un peu la mécanique du dessin et oser des choses que je ne ferais pas naturellement. Mazzucchelli, Blexbolex, Chris Ware (entre autres) agissent comme autant de gouttes d'huile sur mon travail… Des auteurs qui font des choix artistiques assez extrêmes et par conséquent, de magnifiques "lubrificateurs" pour mon travail si j'ose dire !

Arnaud, quel a été votre premier coup de coeur BD et quelle a été son influence sur votre travail ? D'où vous vient ce goût pour le surréalisme, le bizarre?

A.L.G. Enfant, j'ai lu tout ce que je pouvais trouver en matière de BD, et puis j'ai décroché. C'est en découvrant Lewis Trondheim à la fin des années 90 que je m'y suis remis. Il y avait dans son travail une énergie démentielle. Depuis, j'ai recommencé à lire beaucoup de BD. Pour ce qui est du bizarre, c'est comme ça, c'est un aimant.  Quand je tombe sur quelque chose d'inhabituel, de décalé, mon rythme cardiaque s'accélère. Ca vient de Picsou magazine, de Fantômas, du rock expérimental, de l'Art brut, du Grand Guignol, on trouve du bizarre partout.

J'aurai votre peau Olivier et Anaud ! Imaginez que vous receviez à votre tour cette menace. Que faites-vous ? A vous portez plainte contre Dominique A, B vous embauchez l'ex garde du corps de Sim que l'on croise dans votre récit, C vous vous exilez en Belgique pas loin de la frontière, D vous brûlez votre album et faites des excuses à la terre entière?

O.B. Je suis mal car tout comme Dominique A au sujet de la musique, je ne me suis jamais imaginé faire autre chose que de dessiner. Je crois que je serais même prêt a mourir pour ça !

A.L.G. J'embauche l'ex garde du corps de Sim ! Il doit avoir plein d'histoires passionnantes à raconter...

Interview réalisée le 28 décembre 2012. Sortie de l'album le 9 janvier 2013.

Toute l'info BD sur notre blog dédié BD et sur twitter (@ericguillaud)



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