Ce rapport devait initalement être remis par Claude Chéreau au Premier ministre, Jean-Marc Ayrault. C'est finalement au ministre délégué chargé des Transports, Frédéric Cuvillier, que le dossier sera donné.
Le débat sur le projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, près de Nantes, devrait rebondir mardi avec la remise à Matignon du rapport de la Commission de dialogue, dont les travaux se sont accompagnés d'une relative "trêve" de quatre mois sur le terrain cet hiver.
Créée fin novembre par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, ancien député-maire de Nantes et fervent partisan du projet, pour tenter d'apaiser les esprits après de violents affrontements entre opposants et forces de l'ordre à l'automne, cette commission n'a jamais eu pour mandat de remettre en cause le futur aéroport.
Dans un entretien publié vendredi dans le quotidien Presse-Océan, le président de la commission, Claude Chéreau, a d'ailleurs réaffirmé qu'il n'avait "aucun doute sur la pertinence du projet", consistant à transférer l'actuel aéroport de Nantes-Atlantique, situé au sud de l'agglomération, vers le site de Notre-Dame-des-Landes, une trentaine de kilomètres plus au nord, à l'horizon 2017.
"Pour l'heure, nous ne constatons pas une situation de saturation de l'aéroport de Nantes-Atlantique. Mais la saturation peut être effective dans cinq ans, ou dix ans", a-t-il estimé. "Or on ne construit pas un aéroport en cinq minutes. Il faut s'y prendre à l'avance", a-t-il ajouté.
Claude Chéreau s'est toutefois bien gardé de dévoiler les conclusions finales de sa commission, dont il réserve la primeur à Jean-Claude Ayrault.
Car ses recommandations pourraient offrir au gouvernement l'opportunité de reporter de quelques mois, sans perdre la face, cet épineux dossier, dans un contexte politique et économique déjà passablement chahuté. A moins que Matignon ne choisisse, coûte que coûte, la reprise immédiate des travaux et donc des expulsions.
Sur le terrain, toujours occupé, selon les moments, par 100 à 300 opposants, anticapitalistes qui ont reconstruit de nombreuses cabanes ou agriculteurs qui refusent de laisser leurs fermes et occupent celles vouées à la destruction, le programme de "travaux préparatoires" a en effet pris du retard.
Le défrichement prévu en janvier a été reporté de six mois, les transferts d'espèces protégées prévus en février n'ont pas eu lieu, et seule une partie des diagnostics archéologiques, en bordure de la zone, a été menée à bien.
Lors du lancement de sa commission à la mi-décembre, Claude Chéreau avait prévenu que toute opération d'évacuation du site nuirait au dialogue qu'il était censé promouvoir. Au total, une centaine d'entretiens ont été menés sous son égide jusqu'à mi-mars.
La remise du rapport de la commission peut donc signifier la fin de la trêve qui s'était instaurée durant quatre mois et au cours de laquelle gendarmes et CRS se sont abstenus d'interventions massives.
Des repérages répétés et prolongés d'hélicoptères de gendarmerie, observés ces dernières semaines, pourraient accréditer cette thèse.
Mais l'impopularité des interventions de l'automne, qui avaient contribué à médiatiser le combat des opposants à l'aéroport, pourrait s'avérer compliquée à gérer pour le gouvernement, déjà empêtré notamment dans l'affaire Cahuzac.
Outre la commission de dialogue, deux autres commissions devaient rendre leurs rapports au gouvernement début avril: la "mission agricole", chargée d'évaluer les pertes et compensations en terres agricoles liées au projet, et la commission d'évaluation scientifique du système de compensations environnementales proposé par le groupe Vinci, exploitant du projet. Certains proches du dossier jugeaient possibles fin mars que leurs conclusions soient groupées avec celle de la commission de dialogue.
Une éventuelle demande de "compléments d'études", réclamés par l'une ou l'autre des commissions avant que la préfecture ne délivre l'autorisation finale d'entamer les travaux, pourrait constituer un répit supplémentaire pour JM Ayrault, tout en lui épargnant de prononcer le mot de moratoire et sans annuler le projet.
Cette hypothèse est toutefois vivement rejetée par les partisans de l'aéroport, des élus socialistes qui se trouvent à la tête des collectivités locales concernées à l'UMP et aux décideurs économiques, tant dans les Pays-de-la-Loire qu'un Bretagne.
Source AFP