Les autorités sanitaires françaises ont autorisé mardi la société Carmat à mener à bien de premières implantations expérimentales sur l'homme de son cœur artificiel, ouvrant de nouvelles perspectives à des malades condamnés par la rareté des greffons disponibles
L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a permis à la société, créée en 2008 pour mettre au point une bioprothèse cardiaque, d'effectuer une première étude clinique de faisabilité, a indiqué l'entreprise française dans un communiqué. C'est "un chapitre fondamental de l'histoire de la société", a indiqué le directeur général Marcello Conviti.
L'autorisation porte sur quatre patients dans trois centres hospitaliers. "Nous sommes émus et enthousiastes de pouvoir proposer à un patient de remplacer son cœur malade par un cœur Carmat", s'est réjoui M. Conviti. L'entreprise fondée par le chirurgien Alain Carpentier, mondialement connu pour avoir inventé les valves cardiaques Carpentier-Edwards, veut pallier le manque notoire de greffons dont sont victimes des dizaines de milliers de personnes souffrant d'insuffisance cardiaque avancée.
Sa prothèse, fondée sur des bases scientifiques "solides", vise, selon Carmat, "une fonctionnalité et une durabilité exemplaires". "Elle mime totalement un cœur humain normal avec deux ventricules qui mobilisent le sang comme le ferait le muscle cardiaque, avec des capteurs qui permettent d'accélérer le cœur, de décélérer, d'augmenter le débit, de diminuer le débit. Le malade dort ça diminue, il monte les escaliers ça accélère, donc ça n'a rien à voir avec une pompe mécanique", indique Philippe Pouletty, co-fondateur de Carmat.
Un essai à Nantes
Les essais vont se dérouler dans trois centres: l'hôpital européen Georges Pompidou à Paris, le Centre chirurgical Marie Lannelongue du Plessis-Robinson en région parisienne et à l'hôpital Laënnec-Nord du CHU de Nantes. Les équipes de ces centres vont pouvoir débuter "immédiatement" le processus de sélection des patients, précise Carmat, qui dit ne pas anticiper de difficultés majeures pour cette première étude. Les patients implantés devront souffrir d'une insuffisance cardiaque terminale, avec un pronostic vital engagé et ne bénéficiant d'aucune alternative thérapeutique.Ces tests dans l'hexagone ne remettent pas en question les processus entamé en mai dernier à l'international, la formation des équipes sur place étant désormais "bien avancée". Quatre centres hospitaliers en Belgique, Pologne, Slovénie et Arabie Saoudite avaient en effet déjà obtenu les accords nécessaires pour procéder à l'implantation d'un cœur artificiel Carmat. Consciente des attentes, la PME française souligne que le succès des tests sera évalué par le taux de survie à 1 mois ou à l'aune de la conduite du patient vers la transplantation s'il est en condition d'éligibilité.
Prudente, elle fait remarquer que "comme pour tout dispositif médical très innovant, le développement clinique pourra connaître des aléas et guidera les progrès vers la mise sur le marché".
Un espoir valorisé un demi-milliard en Bourse
Pour autant, si les essais cliniques sont réussis, l'entreprise assure que son coeur artificiel pourrait sauver chaque année la vie de dizaines de milliers de patients tout en leur assurant une absence de risque de rejet et une qualité de vie sans précédent.Les résultats intermédiaires ou définitifs des essais devraient être communiqués après avis de comités indépendants d'analyse et de surveillance de l'étude ainsi que celui du comité scientifique de Carmat.
La société, qui pèse plus d'un demi-milliard en Bourse, veut être un "espoir" pour les 95% des malades, soit 100.000 en Europe et aux Etats-Unis, qui ne pourront pas recevoir une transplantation, selon M. Pouletty.
A la Bourse de Paris, le titre bondissait de plus de 15% à 131,98 euros en début des échanges dans un marché en hausse de 0,35%. Signe des espoirs qu'elle suscite, la PME a bénéficié d'une aide financière de 33 millions d'euros accordée par BpiFrance, soit l'aide la plus importante fournie par la banque d'investissements des PME. En tout, Carmat, qui s'est introduite sur le marché Alternext de la Bourse de Paris en 2010, a procédé à deux levées de fonds pour financer le développement de sa prothèse.
AFP