Des chefs tribaux et des miliciens chiites Houthis ont été sollicités pour obtenir la libération d'Isabelle Prime et de son interprète Yéménite enlevées mardi à Sanaa, mais l'absence d'autorités légitimes dans la capitale et le départ des diplomates occidentaux compliquent les recherches.
L'identité des ravisseurs de la Française Isabelle Prime, 30 ans, employée d'une société de conseil américaine, et de son interprète yéménite Chérine Makkaoui n'est pas connue et le rapt n'a pas été revendiqué.
La famille de la Yéménite a indiqué mercredi avoir sollicité l'intervention de chefs tribaux, du ministère de l'Intérieur et de miliciens Houthis pour obtenir la libération des deux femmes.
De son côté, le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a assuré que Paris mettait "tout en oeuvre" pour contacter les ravisseurs.
L'oncle de l'accompagnatrice yéménite, Yassine Makkaoui, a indiqué à l'AFP que la famille avait "contacté différents chefs tribaux (dans la capitale) Sanaa, dans les provinces de Jawf (nord) et de Marib (centre) pour (s')assurer de leur collaboration en vue de la libération des deux femmes".
"Nous avons également contacté, dans le même but, le ministère de l'Intérieur et les Houthis", ces miliciens chiites qui ont renforcé leur emprise sur la capitale en janvier, a-t-il ajouté.
"L'enlèvement s'est passé en plein jour dans le centre de Sanaa où les Houthis sont responsables du maintien de l'ordre", a dit Yassine Makkaoui. "Ils contrôlent à la fois les ministères de la Défense et de l'Intérieur et nous les rendons responsables" du sort des deux femmes, a-t-il ajouté.
Cependant, dans la confusion qui règne à Sanaa, rien n'indique de manière évidente que des Houthis ont été directement impliqués dans ce rapt.
"Rien de concret"
L'employeur de la Française a indiqué mercredi n'avoir rien appris de concret sur son sort ou sur l'identité et les revendications des ravisseurs, a indiqué à l'AFP le patron de cette société-conseil basée aux Etats-Unis et en Equateur.Les services du ministère de l'Intérieur du Yémen, "nous disent qu'ils s'occupent de l'affaire mais nous n'avons rien de concret jusqu'à présent", a déclaré par téléphone depuis l'Equateur Francisco Ayala, président de Ayala Consulting, ajoutant qu'à sa connaissance, aucun contact n'existait avec les ravisseurs.
"J'espère qu'ils (les ravisseurs) vont les contacter, ou nous, ou n'importe qui très vite pour que l'on sache ce qu'ils veulent et qui ils sont".
Isabelle Prime, 30 ans, et son interprète yéménite Chérine Makkaoui, ont été enlevées à Sanaa par des hommes déguisés en policiers alors qu'elles se rendaient en voiture au travail, selon Francisco Ayala.
Les enlèvements d'étrangers au Yémen ont souvent été le fait de tribus cherchant à faire pression sur les autorités afin d'obtenir des services, des infrastructures ou simplement la libération d'un de leurs membres.
Mais ces dernières années, des otages ont été revendus à Al-Qaïda et certains ont trouvé la mort.
Quitter le Yemen
Laurent Fabius a réitéré mercredi l'appel aux ressortissants français à quitter le Yémen, devenu "extrêmement dangereux".Mais la France n'a plus de diplomates au Yémen depuis qu'elle a fermé début février, comme d'autres pays occidentaux, son ambassade à Sanaa.
Le pays est "au bord de l'effondrement", selon les termes du secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon. Les Houthis, qui contrôlent la capitale, ont affirmé dans la nuit avoir lancé une procédure judiciaire contre le président Abd Rabbo Mansour Hadi, réfugié à Aden (sud).
Ce dernier, qui a réussi à leur échapper samedi à Sanaa, rejette leur coup de force et affirme être le chef d'Etat légitime du pays.
Afin de tenter de trouver une solution, le chef du Conseil de coopération du Golfe, Abdellatif al-Zayani, a rencontré Abd Rabbo Mansour Hadi mercredi et lui a réaffirmé le soutien des monarchies du Golfe, selon un communiqué de cet organisme régional.
Et a Sanaa, des milliers de manifestants ont exprimé leur soutien à Abd Rabbo Mansour Hadi et dénoncé les Houthis, avec lesquels ils se sont affrontés, selon des témoins. Au moins cinq manifestants ont été blessés.
Abd Rabbo Mansour Hadi a été élu en 2012 dans le cadre d'une transition politique après le départ d'Ali Abdallah Saleh, chassé par la rue en plein Printemps arabes. Selon un rapport de l'ONU publié mercredi, l'ancien président a accumulé entre 32 et 60 milliards de dollars de fortune par la corruption, en 33 années de pouvoir.
Le Conseil de sécurité de l'ONU a demandé mercredi aux protagonistes de la crise au Yémen "d'accélérer les négociations" pour un règlement politique dans le pays.