Coronavirus et discothèques : un été sans danser en Loire-Atlantique

Les professionnels se sont fait une raison : les boîtes de nuit ne rouvriront pas de l’été, victimes de la circulation du virus et des réticences du gouvernement. A défaut de clients, ils vont recevoir des aides financières supplémentaires après presque 6 mois d’inactivité totale.
 

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Elles s’appellent : Niagara, Pili-Pili, Papa Tango, Macadam, Loft, Mid’Star… Et leur seul nom suscite déjà des envies de déhanchement sur les pistes de danse. Mais cet été, leurs parkings sont déserts, les videurs sont absents et aucun son ni lumière ne filtrent des portes closes, l’intégralité de ces établissements est fermée.
 

"On nous interdit de faire notre métier"

Par la force des choses, le quotidien des propriétaires et autres gérants a bien changé. Plutôt que de se morfondre dans leurs locaux, Jérôme Guilbert et Christian Jouny, tous deux installés depuis plus de 20 ans dans les Pays de la Loire, ont accumulé ces dernières semaines les allers-retours à Paris pour défendre au nom de leurs syndicats respectifs les intérêts de l’ensemble de la profession, soit 1 600 établissements en France.

Leur espoir, raconte le Nantais Jérôme Guilbert, président national des discothèques au sein du GNI, "obtenir la réouverture le 10 juillet juste avant le week-end du 14 juillet auprès des représentants de plusieurs ministères dont la santé et Bercy.

Nous étions sur le point de signer un protocole d’accord garantissant toutes les règles en matière d’accueil du public et répondant aux enjeux de maîtrise sanitaire du virus. C’était juste avant le remaniement ministériel

Jérôme Guilbert, propriétaire de discothèque

Alors que l’état d’urgence sanitaire prenait fin, les discothécaires perdaient là leurs dernières illusions sur un retour des platines et des laser shows au cœur de l’été.
Malgré tout,  Christian Jouny, son confrère de Guérande, en Loire-Atlantique, et à la tête de la délégation du syndicat national des discothèques (SNDLL) retient : "Nous qui étions jusqu’alors une profession atypique, isolée voire inorganisée par rapport aux restaurateurs ou aux cafetiers, nous avons enfin réussi à démontrer notre unité au plus haut niveau face à des ministres alors que d’habitude, nous traitons nos situations au cas par cas devant une préfecture pour des histoires de dérogation sur nos horaires par exemple. Il faut bien comprendre que nous restons aujourd’hui le seul secteur marchand fermé par décision administrative !".
 

Des problématiques différentes des cafetiers ou restaurateurs

La profession n’a pas tout perdu dans ces négociations épiques. Le 24 juillet, Alain Griset, le ministre délégué aux PME, a annoncé le déblocage d’un fonds de solidarité à hauteur de 50 millions d’euros.

Parmi les nouvelles mesures, une indemnisation des charges fixes porté à 15 000 euros par mois maximum (contre 5 000 ou 10 000 euros dans les entreprises d’hôtellerie restauration) et ce pour les mois de juin, juillet et août.

"Les charges fixes sont très élevées entre les loyers et les assurances multirisques dans nos métiers, précise Christian Jouny. Et qui donne l’exemple de l’une de ses boîtes de nuit bien connue, Villa La Grange à La Baule, ouverte uniquement en saison d’avril à fin août.

"Cela représente normalement entre 65 et 68 soirées. J’ai déjà perdu 100 % de mon chiffre d’affaires, soit 1 million d’euros. Pire, l’établissement qui avait fermé en septembre 2019 ne pourra rouvrir peut-être qu’en avril 2021, vous imaginez, 19 mois de fermeture !".
Christian Jouny est propriétaire de 3 discothèques dans la presqu'île guérandaise. "Les pertes devraient s’élever à 2,2 millions d’euros. J’ai mis une dizaine de CDI au chômage partiel. Malheureusement faute de travail, je n’aurai signé aucun contrat en CDD cette année, contre 108 à 111 l’an passé".

Le chef d’entreprise, qui officie dans le monde de la nuit depuis plus de vingt ans, a aussi une pensée pour les Dj’s et les artistes qu’il invite à se produire dans ses clubs chaque été.

A quelques dizaines de kilomètres de la côte, Jérôme Guilbert dirige 4 discothèques à Nantes et emploie 130 personnes. 

On arrive bientôt, à la rentrée, aux 6 mois de fermeture

Jérôme Guilbert, propriétaire de discothèque

Mon prévisionnel court jusqu’à la fin de l’année car en ville, le mois de décembre est le plus fort en terme d’activité avec les salons professionnels et les repas d’entreprises qui se terminent en boîte. Les pertes cumulées pourraient avoisiner les 8 millions d’euros d’autant que rien actuellement ne garantit que nous serons ouverts en décembre".

Certains syndicats professionnels alarmistes prédisent une rentrée noire avec 20 ou 40% de discothèques qui baisseraient définitivement le rideau.
 

Et je coupe le son (sur un air de Philippe Katerine)

Le monde de la nuit et de la fête s’est immobilisé d’un coup en mars. "Et je coupe le son !" chantait le Vendéen Philippe Katerine dans son tube Louxor, en hommage à la boîte de nuit de sa folle jeunesse.

Pas sûr que les clubbeurs reviennent de sitôt.

Il n’était pas raisonnable de rouvrir vu le contexte sanitaire

Jérôme Guilbert, propriétaire de discothèque

"Nous acceptons le maintien de la fermeture car il est vital pour nos entreprises de continuer à dialoguer et à travailler avec le gouvernement, les préfectures et les villes dans la perspective d’une reprise, note Jérôme Guilbert. En attendant, il ne faudrait pas que d’autres en profitent pour faire notre métier".

Une menace à peine voilée qui s’adresse à des bars, restaurants ou autres collectifs qui organisent des soirées dansantes - les vidéos sur les réseaux sociaux se multiplient - au mépris parfois des règles de distanciation et de port du masque obligatoire.

"Il ne faudrait pas que les dérives de quelques-uns rejaillissent sur nous et empêchent toute tentative de réouverture des discothèques à l’avenir, le rejoint Christian Jouny. Nos établissements ont prouvé qu’ils savaient accompagner et sécuriser la jeunesse qui fréquente les lieux grâce à du personnel présent et formé. En étant ouverts, nous sommes là pour éviter les regroupements trop massifs constatés cet été sur les plages ou dans les villes".
 

Nouveauté : on danse jusqu'à... 21h

Dans cet été si différent des autres, les fermetures administratives pourraient donc frapper les lieux trop permissifs face à la circulation du virus. Ce ne sera pas le cas de Transfert, un lieu culturel alternatif et artistique installé sur le site des anciens abattoirs de Rezé, près de Nantes, et encore plus fréquenté cet été en l’absence de festivals et de lieux pour faire la fête dans l’agglomération.

Ici, les vendredi, samedi et dimanche sont réservés à la musique mais les conditions ont subitement changé depuis le 24 juillet. 

"Nous avons démarré début juillet nos Dj sets aux horaires habituels 21h-1h, précise Agathe Violain à la communication de Pick Up Production, mais vu l’affluence des premières soirées transformées en dance-floor (jusqu’à 1 500 personnes sur l’immense site), nous avons revu notre dispositif à la baisse."

Aujourd’hui, on vient profiter de la musique en toute tranquillité et en petit comité à l’heure du thé (et de la bière) entre 17h et 21h. Assis devant des tables façon cabaret ou debout avec le masque, une autre façon de se remettre de la fermeture des discothèques.



 
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