"Je savais que je ne reverrais plus mon île" : Daisy témoigne de l'histoire tragique des enfants réunionnais déportés en France

"Je savais que je ne reverrais plus mon île" : Daisy témoigne de l'histoire tragique des enfants réunionnais déportés en France
Daisy Jamain fait partie des plus de deux mille enfants réunionnais arrachés à leur île pour repeupler des départements ruraux en métropole. Arrivée en France à l’âge de 13 ans, elle a vécu des décennies de déracinement et de souffrance avant de retrouver, après 56 ans de recherches, sa petite sœur perdue. Aujourd’hui, elle lutte pour la reconnaissance de cette déportation et réclame des excuses officielles et la transmission de cette histoire. ©Atlantic Télévision by Mstream

Daisy Jamain fait partie des plus de deux mille enfants réunionnais arrachés à leur île pour repeupler des départements ruraux en métropole. Arrivée en France à l’âge de 13 ans, elle a vécu des décennies de déracinement et de souffrance avant de retrouver, après 56 ans de recherches, sa petite sœur perdue.

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"Je savais que je ne reverrais plus mon île", raconte Daisy Jamain, alors qu’elle monte à bord d’un avion qui l’éloignera pour toujours de La Réunion.

Arrachée à sa terre natale

Ce jour-là, en 1968, elle quitte son enfance, ses racines, et tout ce qui lui était familier pour rejoindre la France métropolitaine, plus précisément à Saint-Étienne-de-Montluc, en Loire-Atlantique. 

Nos parents sont décédés et notre famille était trop dispersée, les grands-parents étaient pauvres, la famille était pauvre, les tantes, les oncles, ils avaient déjà des enfants, ils ne pouvaient pas nous garder.

Daisy Jamain

Déportée réunionnaise

Daisy et ses sœurs, Suzanne et Anne-Marie, sont placées au foyer des pupilles à Saint-Denis et la petite sœur Marie-Bénédicta qui avait neuf mois, à l’époque, est placée en pouponnière. Elle sera adoptée par une famille au Mans sans connaître l’existence de ses sœurs.

Une loi visant à repeupler la Creuse

Sous l'impulsion de Michel Debré, député de l’époque, l'État français décide d'envoyer des centaines d'enfants de La Réunion en métropole entre 1962 et 1984 pour repeupler la Creuse. La jeune réunionnaise fait partie des plus de deux mille enfants déracinés, avec sa sœur Anne-Marie, tandis que l’aînée, Suzanne, reste à La Réunion.

Abus et racisme

En France, Daisy Jamain est confrontée à une réalité bien différente de celle qu’on lui avait décrite. " On nous disait qu’en France, on marchait sur l’or ", se souvient-elle. Pourtant, la vie dans les foyers et les familles d'accueil est loin d’être idyllique.

Elle est souvent marquée par des insultes, du racisme et, dans certains cas, des abus. " Le monsieur venait dans ma chambre quand sa femme partait travailler " décrivant plusieurs épisodes d’abus dans une famille d’accueil pendant les week-ends et les vacances.

Dès 18 ans, elle travaille comme agent de service hospitalier au CHU de Nantes puis se marie et fonde sa famille en Loire-Atlantique. 

La recherche d'une sœur perdue

Pendant des décennies, Daisy Jamain cherche à retrouver sa petite sœur, Marie-Bénédicta, sans succès. Ses recherches prennent un tournant lorsqu’elle s’inscrit à la Fédération des enfants déracinés des départements et des régions d’outre-mer (Fedd), une organisation qui aide les victimes de cette déportation à reconstituer leur histoire et à retrouver leurs proches.

Suite à l’article d’un quotidien local, Daisy est contactée par un généalogiste, après 56 ans de recherche. " Ce monsieur a retrouvé ma petite sœur en 48 heures ".

Le jour où elle entend enfin la voix de sa sœur au téléphone est un moment bouleversant : " Bonjour madame, je suis votre sœur ", lui dit-elle, la gorge serrée par l’émotion. Sa petite sœur avait été adoptée au Mans et ignorait l’existence de ses sœurs. Elles se sont retrouvées lors d’une grande fête à Saint-Herblain. 

Un combat pour la reconnaissance

J’attends que notre histoire soit dans les livres.

Daisy Jamain

Déportée réunionnaise

Aujourd’hui, l’habitante de Saint-Herblain et d’autres enfants de la Creuse continuent à se battre pour la reconnaissance officielle de leur histoire. " J’attends que le président de la République s’excuse et mette notre histoire dans les livres d’Histoire de France ".

 

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