C'est une étape très importante dans l'affaire Troadec. Hubert Caoussin suspecté d'avoir assassiné les quatre membres de la famille Troadec à Orvault (Loire-Atlantique) en février 2017, est entendu ce mardi 6 février à 14 heures par un juge d'instruction nantais.
Hubert Caouissin a été extrait de la maison d'arrêt en début d'après-midi, direction le palais de justice de Nantes. Il sera entendu pour la quatrième fois depuis sa mise en examen début mars 2017.
Une reconstitution à la maison d'Orvault, le lieu des crimes aura lieu à l'automne. Le procès n'est pas attendu avant le second semestre 2019.
► Les réactions de Thierry Fillion et Patrick Larvor, avocats d'Hubert Caouissin au sortir de l'audition de leur client ce mardi 6 février.
UNE AFFAIRE HORS NORME
Le 16 février 2017. Pascal, Brigitte Troadec, et leurs deux enfants de 21 et 19 ans, sont assassinés dans leur maison d'Orvault, dans la banlieue de Nantes. C'est le début de l'affaire Troadec. Elle va mener les enquêteurs de la Vendée au Finistère, avec des fausses pistes et des indices retrouvés dans une zone de 300 km.
Quand il s'adresse aux journalistes, au tout début de l'affaire, le procureur de la République de Nantes, Pierre Sennès, ignore encore presque tout de ce drame. "C'est incontestablement une scène d'une grande violence, déclare-t-il à l'époque. On a du sang en haut. On a du sang dans l'escalier. On a du sang au rez-de-chaussée. Et on a du sang dans le garage. Donc on peut penser logiquement qu'il y a peut-être des personnes qui sont décédées".
"On est parti sur toutes les hypothèses"
Finalement, le 5 mars, un homme est interpellé. Il s'agit du beau-frère de Pascal Troadec. Hubert Caouissin, 46 ans, reconnaît avoir tué les quatre membres de la famille. L'homme explique qu'il a démembré et brûlé une partie des corps dans sa propriété du Finistère. C'est la fin d'une affaire hors norme, un casse-tête pour les enquêteurs. Car au départ, la police ne disposait que de très peu d'éléments : "On a quelques traces de sang dans la maison, on n'a aucune autre trace, on n'a aucun corps, on ne sait absolument pas ce qui s'est passé. Donc toutes les hypothèses sont ouvertes, confie Pierre Sennès. Est-ce que c'est un drame familial ? Est-ce qu'un tiers est intervenu -par exemple un cambrioleur- qui a surpris la famille ? Est-ce que toutes les personnes membres de la famille sont mortes ? Est-ce que certains n'ont pas été séquestrés, enlevés dans une maison dans une cave, ligotés, blessés en train d'attendre qu'on vienne les secourir ?"
"On est parti sur toutes les hypothèses", raconte le procureur. "Donc, vous imaginez bien qu'au début ça a quand-même été assez complexe et on a mis le paquet pour explorer toutes les pistes et ne rien laisser au hasard", poursuit-il. Pour les enquêteurs, pour un procureur, la hantise reste le spectre de l'affaire irrésolue. "C'est angoissant parce que nos concitoyens attendent légitiment de leur justice qu'elle élucide les affaires. Et plus le temps va passer, plus il va y avoir une attente et une légitime interrogation sur le travail judiciaire", explique Pierre Sennès.
Dans cette affaire, les enquêteurs ont semblé suivre au départ la piste du fils, Sébastien Troadec. L'enquête a démontré ensuite que le jeune homme de 21 ans figurait parmi les victimes également. S'agit-il d'une fausse piste volontairement avancée pour laisser le champ libre à la police ? "Non", assure le procureur : "À aucun moment il n'y a eu de ballon d'essai lancé par la justice pour essayer de détourner l'attention. Je vous assure que ce n'était absolument pas notre façon de faire et notre objectif. Je ne vous dirai pas toujours tout mais ce que je vous dirai c'est établi, c'est objectif".
Le drame d'Orvault est une affaire hors norme, le terme a d'ailleurs été utilisé à plusieurs reprises lors de l'enquête. Confirmation du procureur, confronté là à l'une des plus singulières affaires de sa carrière. "Ce n'est pas tous les jours qu'un procureur de la République peut être amené à enquêter et diriger la police judiciaire dans une affaire aussi grave, avec une famille massacrée. C'est une affaire comme on en a une dans sa carrière. Cela fait 30 ans que je suis magistrat du parquet, c'est la première fois que j'ai une affaire de cette nature, d'une telle gravité".
Pendant son audition, le meurtrier présumé a évoqué un conflit à propos d'un trésor qui n'aurait pas été partagé lors d'un héritage. Mais, jusqu'à présent, aucune trace de ce magot maudit n'a été retrouvée par les enquêteurs. Les funérailles des quatre victimes ont eu lieu trois mois après le drame, dans le Finistère.