C'est un nouveau scandale qui secoue l'Ehpad du Prieuré à Cordemais en Loire-Atlantique. Une résidente âgée de 78 ans, atteinte de la maladie d'Alzheimer, a été agressée sexuellement le 10 octobre, puis violement battue deux semaines plus tard par un résident de l'établissement. La famille n'a été alertée que le 7 novembre. Elle porte plainte contre la directrice de cette maison de retraite entachée par de sordides affaires.
La photo est insoutenable, le visage de Jeanne 78 ans, profondément tuméfié. Signe de la violence des coups reçus.
La première agression n'a laissé aucune trace mais les faits sont innommables.
Elle était couverte de sperme et ses habits étaient froissés. On a retrouvé un résident avec un pantalon baissé. C'est tout ce que l'on sait. Je ne sais même pas si c'était le matin ou le soir
Jocelyne FuretSoeur de la victime
Malgré la douleur, Jocelyne Furet a la voix posée lorsque qu'elle raconte les deux traumatismes subis par sa sœur : sexuel le 10 octobre, et physique, 11 jours plus tard, le 31 octobre.
La deuxième agression a été particulièrement violente. S'est-elle défendue sous les coups ? était-elle réveillée, consciente ? On ne saura jamais
Jocelyne FuretSœur de la victime
Aucune alerte, la famille n'est prévenue que bien plus tard, le 7 novembre.
Les médecins nous ont parlé de coups violents, elle avait des bleus sur les bras aussi, les mains griffées". Des jours après les faits, "sa mâchoire est encore marquée et violette. Elle a perdu toutes ses dents", précise Jocelyne.
"Quand je l'ai revue, je ne pas l'ai pas trouvée tellement diminué au point de physique. Elle marche toujours. Mais à côté de ça plus rien, plus rien. Avant je parvenais à lui faire dire quelques mots. Là rien ne sort", raconte-t-elle.
"Je ne comprends pas ce silence"
Jocelyne a décidé de porter plainte, "pas contre l'établissement qui est propre et soigné, mais contre la directrice".
Elle aurait dû aussitôt après la première agression, même si elle était en vacances au moment des faits, nous prévenir et faire en sorte que le résident responsable soit mis hors d'état de nuire.
Jocelyne FuretSoeur de la victime
"On ne sait pas si l'agresseur est toujours dans l'établissement aujourd'hui. Quand j'ai évoqué qu'il pourrait recommencer on m'a répondu : on va le descendre d'un étage", déplore Jocelyne. Avant d'ajouter, "c'est un beau cadeau pour les gens du dessous !"
"Nous n'avons eu aucune communication avec la directrice ni avec aucun responsable de l'établissement depuis ces agressions. Je ne comprends pas ce silence."
Si je porte plainte aujourd'hui c'est pour ma sœur mais aussi pour toutes les personnes qui vivent en Ehpad et pour les familles qui parfois tremblent pour leurs proches
Jocelyne FuretSoeur de la victime
"Je comprends que les familles soient affectées. C'est intolérable !". Le maire de Cordemais ne peut qu'être en colère face au nouveau scandale qui frappe l'Ehpad du Prieuré dans sa commune, en Loire-Atlantique. Il en est le président du conseil d'administration, donc directement concerné.
Ni signalement, ni alerte
"Il n'y a pas eu de signalement de la part de la soignante qui a constaté les agressions. Ça aurait du être fait", reconnait le maire de Cordemais.
"Je dis et je redis qu'il y a tellement de turnover, parce que c'est compliqué de recruter des salariés. Il y a des personnes qui viennent travailler une semaine et au bout de 8 jours ils vous disent : nous on en peut plus, on ne revient pas demain. On a même des personnes qui ne viennent pas, sans prévenir. La situation est extrêmement difficile", poursuit l'élu.
Je veux bien que l'on nous accuse, mais il n'empêche qu'il faut venir gérer l'établissement. Je préférerais que l'on me propose des solutions plutôt que de nous accabler en permanence ! On ne peut pas mettre un salarié derrière chaque résident.
Daniel GuilletMaire de Cordemais
"Des événements malheureux et déplorables"
"Sinon, l'établissement il peut passer dans les mains d'un privé. Moi je n'y vois pas d'inconvénient, c'est très simple à faire. On prend toutes les mesures et toutes les précautions. On essaie d'avoir du personnel qui assure une continuité de soins y compris le week-end. Et malgré tout, il y a des évènements très malheureux et déplorables", concède le maire.
Nous avons peut-être fauté dans la mesure où nous n'avons pas prévenu suffisamment tôt, il n'y a pas eu d'alerte. Mais la directrice n'y est pour rien. Elle n'était pas là.
Daniel GuilletMaire de Cordemais
L'élu rappelle que le personnel "a de nouveau été informé, il y a des outils pour cela. Nous allons les former à les utiliser. C'est comme partout, parfois il y a des erreurs mais les conséquences sont moins graves parce qu'elles ne touchent pas des individus. Personne n'est infaillible malheureusement."
"C'est l'omerta"
"C'est toujours la même chose il y a une sorte d'omerta dans cette maison. On n'arrive pas à savoir ce qui s'y passe vraiment. Les gens se taisent y compris les membres du personnel. Il n'y a aucune communication, pas de réponse aux lettres recommandées, s'emporte Brigitte de Saint-Martin du collectif des familles du Prieuré.
" Il y a eu des tentatives d'empoisonnement dont une qui est avérée, des agressions sexuelles par un aide-soignant, condamné par la justice le mois dernier. Ça fait beaucoup. Il n'y pas d'inspection dans cet établissement. Nous sommes devant une force d'inertie magistrale" , s'insurge la responsable du collectif des familles du Prieuré.
"La première affaire concerne un intérimaire qui n'a pas été recruté par la directrice actuelle. C'est facile d'incriminer les personnes en poste aujourd'hui", répond le maire et président du conseil d'administration de l'Ehpad de Cordemais.
Physiquement Jeanette a un peu repris le dessus mais vit désormais prostrée. "Elle parvient à se déplacer mais psychologiquement", conclut Jocelyne, "elle est terrorisée. On lit la peur dans ses yeux vides".