Coronavirus : en Loire-Atlantique, les Gîtes de France hébergent des soignants et des femmes victimes de violences

Une trentaine de propriétaires ont répondu à l'appel lancé par les "Gîtes de France"de Loire-Atlantique. En cette période désespérement creuse, où les annulations s'enchaînent, les hébergements sont mis gratuitement à disposition des soignants et des femmes victimes de violences conjugales.

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

On le sait, la pandémie va coûter cher aux professionnels du tourisme. Certains, pourtant, ont choisi de ne pas se lamenter et d'aller de l'avant.

Les gîtes de France ont ainsi décidé, comme tant d'autres, de jouer à fond la carte de la solidarité, en mettant gratuitement à disposition des hébergements pour les personnels soignants et les femmes victimes de violences conjugales.

L'idée était de mettre à disposition des chambre d'hôtes ou des logements dans un rayon de 10 kilomètres autour des hôpitaux, cliniques et maisons de retraites du département.

"C'est n'est pas parce nous sommes touchés de plein fouet qu'on ne doit pas penser aux autres et qu'on ne doit pas agir. Notre réseau est basé sur des valeurs sociales, des valeurs humaines. Il fallait garder ça à l'esprit. On est dans une situation financière très incertaine c'est vrai, mais si le Covid-19 ne permet pas aux gens de se serrer les coudes c'est qu'on aura pas compris grand chose", explique Michel Laur, directeur des gîtes de France de Loire-Atlantique.
 

"Un sas de décompression"

"Rapidement on a compris qu'on allait annuler des séjours à la pelle. Qui dit annulation de séjour, dit gîtes qui se libèrent. On s'est demandé ce qu'on allait faire de tout ces hébergements vides. Et puis ont a immédiatement vu que certains personnels soignants avaient besoin de sas de décompression entre leurs familles et l'hôpital, ne serait-ce que pour ne pas trop véhiculer le virus et pouvoir se reposer et se ressourcer à l'écart", précise Michel Laur. Les gîtes de France ont donc lancé un appel aux 500 adhérents du département. Sur la base du volontariat, le principe est d'accueillir des résidents gratuitement.

" Tout le monde n'a pas répondu parce certains de nos propriétaires sont des personnes âgées donc potentiellement à risque. Ceux là ont fait le choix de prendre un peu de distance au vu de la situation sanitaire. D'autres plus sensibles et qui ont la fibre ont tout suite dit ok pour mettre leurs gîtes à disposition", explique Michel Laur.

35 structures ont ouvert gratuitement leurs portes

Pour ce qui est de la mise à l'abri des femmes victimes de violences conjugales, c'est la préfecture qui a directement sollicité les gîtes de France. Michel Laur, n'a pas hésité une seconde.

Aujourd'hui, une trentaine de propriétaires ont ouvert leurs portes et six structures peuvent accueillir des femmes en détresse. "Nous nos métiers c'est du loisir, du marchand, mais on a des convictions, alors on essaye de faire les choses à notre niveau. Moi je suis quelqu'un d'engagé ça me semble naturel".

Je ne peux pas rester insensible à ce qui vivent les femmes victimes de violences en milieu confiné. Je n'ose imaginer ce qui se trame dans certains foyers. Ce qui se passe derrière les portes c'est monstrueux. Les personnels soignants eux sont confrontés à l'enfer. On ne peut rester sans rien faire, les héberger c'est notre rôle aujourd'hu i- Michel Laur

Le système fonctionne bien, impossible en revanche de savoir combien de personnes sont actuellement hébergées. "Les hôpitaux, les structures médicales et les ehpad, appelent directement les propriétaires", précise Michel Laur.

A la tête de deux gites à la Chevallerais en Loire-Atlantique, Ginette Delanoë a été l'une des premières à ouvrir ses portes. Agée de 70 ans, cette ancienne exploitante agricole vit sur une maigre retraite.

Alors les locations à l'année lui permettent d'améliorer un peu les fins de mois. Cette année, comme beaucoup, elle va perdre de l'argent. Cela ne l'a pas empêché de donner les clés.
"Ici c'est la campagne. Les deux gîtes de 9 et 5 couchages sont loués à l'année, souvent à des ouvriers, avec des tarifs entreprise. Là je n'ai plus personne.  Je suis dans l'année de mes 70 ans. Quand j'ai entendu Emmanuel Macron dire que les ainés devaient rester cloîtrés, j'ai pris un coup de massue ! Je me suis dis je peux encore faire quelque chose quand même" , raconte Ginette Delanoë.

Si la retraitée a volu s'investir c'est aussi parce la crise sanitaire la touche de plein de fouet. Elle vit la situation de l'intérieur: "Mes enfants sont dans le milieu hospitalier. Mon gendre est en plein de dedans. Il est aide-soignant, il travaille au sein du service Covid-19 du CHU de Nantes. C'est dur, il y a des jours où c'est très pénible pour lui, il a failli craqué à plusieurs reprises. Ce qu'il vit en ce moment est insupportable. Des gens qui partent seuls...Ma fille, elle, s'occupe des petits vieux à domicile. Et ma petite-fille de 18 ans est élève infirmière mais on l'a réquisitionnée tout de suite. Ils sont épuisés moralement". 

Bien sûr, l'argent ne va pas rentrer, et la période des vacances semble compromise, mais Ginette ne se plaint pas.

Je ne suis pas la plus à plaindre. Loin de là. Les gîtes c'est un complément. J'ai une toute petite retraite, mais j'en ai quand même une de retraite. Par contre avec la pandémie il va y avoir des gens qui vont rester sur le carreau - Ginette Delanoë, propriétaire de gîtes.
 

Le manque à gagner ce n'est pas la priorité du moment

Depuis deux semaines déjà, Ginette héberge une jeune infirmière de la région : "Elle a l'air d'aller bien, Je ne veux pas trop la déranger, vous comprenez c'est génant...mais quand je la croise on discute, ça fait du bien. Et puis si elle a besoin de quoi que ce soit. Je suis là. Elle peut compter sur moi.

La soignante que Ginette héberge gracieusement, c'est Lucie Touin. Agée de 23 ans, la jeune infirmière est originaire du Maine-et-Loire. Après la fin de ses études en juillet dernier à Vannes dans le Morbihan, elle a été nommée début mars au Centre hospitalier Spécialisé de Blain en Loire-Atlantique.
La jeune soignante venait de prendre son poste, lorsque l'annonce du confinement est tombée. La location de son appartement a de fait été gelée. L' infirmière débutante s'est donc retrouvée sans logement du jour au lendemain. "C'était un coup de chance pour moi, j'ai appelé les gîtes et j'ai eu l'agréable surprise de trouver tout de suite", témoigne Lucie.

C'est une très belle initiative. Je pense que ça en arrange plus d'un. Moi je viens d'arriver sur la région mais cela permet aussi de trouver des solutions d'hébergement pour tous les personnels des structures extra-hospitalières qui viennent en renfort dans nos unités - Lucie Touin, infirmière.
 

Une respiration pour Lucie

Le service dans lequel travaille Lucie a été réorganisé. "Je ne suis pas trop fatiguée, des systèmes  e roulements ont été mis en place, des aides arrivent de l'extérieur. Cela permet de souffler un peu et de ne pas enchainer les jours de garde. On arrive à s'entraider. On fait avec."

Mais il y ce poids supplémentaire qui, forcément ,pèse sur les épaules au quotidien. "On est dans l'inconnu, on n'a pas toutes les informations. On se pose des questions aussi, et de la durée et de l'impact que le virus peut et pourra avoir à l'avenir".

Le Covid-19, a pour l'instant, épargné les patients du centre hospitalier spécialisé de Blain. Certains soignants en revanche sont atteints. Alors se retrouver en pleine campagne après 20 minutes de trajet, cela permet à Lucie de se poser quelques heures :" Le gîte est très bien, il y a un jardin. C'est vraiment très agréable de se retrouver dans ce cadre là. Cela permet de souffler".

Cet élan de solidarité est très touchant. Voir tout ces gens apporter leur aide comme ils peuvent, c'est très beau pour nous les soignants - Lucie Touin-Infirmière

Lucie devrait rester à la Chevallerais jusqu'au 11 mai. Le séjour lui aurait coûté 1 500 euros en temps normal, mais aujourd'hui c'est cadeau.

Elle reprendra la route après la levée du confinement et n'oublira sans doute jamais Ginette. Elle espère déménager au plus vite mais est comme tout le monde elle avance dans le flou, suspendue à cette date du 11mai.

En attendant, elle profite de ses journées de repos au grand air. Même si, chaque jour, elle peut être réquisitionnée pour remplacer un collègue malade au pied levé.







 
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité