Coronavirus : un lundi 16 mars comme un long dimanche à Nantes

Dans le centre-ville de Nantes, l'atmosphère est calme. Pas de mouvement de panique dans les rares commerces encore ouverts mais les alimentaires sont en mode veille de Noël, sans les guirlandes. Il y a plus de monde que d'ordinaire aux caisses. Ambiance et témoignages.

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Dans le bus qui mène en ville, les quelques usagers sont disséminés. Chacun peut se trouver une place à distance des autres. Certains portent des gants d'hiver, un jeune homme a mis un masque. Personne ou presque ne se tient aux barres. Le fait qu'il y a peu de monde a au moins cet avantage : on peut s'asseoir.

Quand on descend du bus, on ne peut que constater le calme qui règne sur les boulevards du centre-ville. Mais ça circule encore. 

Près du château, un couple de jeunes. Lui a une valise à roulettes et un sac. Elle, un sac à dos. Ils sont Néozélandais. Fuient-ils Nantes ? La conversation se fera en Anglais. 
 

"Je ne pensais pas que ça irait aussi vite"

Nick et Ataly arrivent en fait de Marrakech où ils étaient en vacances. Et il sont restés coincés la-bas quand les frontières du Maroc se sont refermées. Finalement, ils ont pu prendre un avion pour la France, pas le choix, ce sera Nantes, ils vont maintenant prendre un train pour Biarritz où Nick joue dans une équipe de rugby professionnelle.

"Ça ressemble à une période de guerre, dit Nick. Je ne pensais pas que ça irait aussi vite."

Ils gardent néanmoins le sourire mais se doutent que ça va durer. "Il faudra probablement attendre plusieurs semaines ou mois avant que ça n'aille mieux" disent-ils.
Un peu plus loin, près des bars fermés, Marie-Paule rentre chez elle après avoir fait quelques achats en pharmacie. Elle porte un masque chirurgical pour se protéger. Elle a déjà un rhume, c'est suffisant.

Cette aide-soignante à la retraite ne fait pas confiance au gouvernement.
 

"Il fallait tout bloquer"

"Ça fait trois jours que je ne sors pas de chez moi explique-t-elle. Je n'ai pas vécu la guerre mais ça y ressemble. Quand on a su que ça commençait en Chine, c'était là qu'il fallait tout bloquer."

Sa fille travaille elle aussi comme aide-soignante au CHU de Nantes.

"Quand je suis partie à la retraite il y a 10 ans, raconte Marie-Paule, on m'a demandé si j'étais prête à revenir en cas de pandémie. J'ai dit non. Je regrette. Dans le service de ma fille, il y a des anciens qui sont revenus."
Sur le Cours des 50 Otages, l'une des artères centrales de la ville, les bus et tramways circulent. Il y a quelques voitures et des vélos. Un peu comme un dimanche qui ne serait pas passé au lundi. Bloqué.

La place Royale est, elle aussi, en mode jour non travaillé. Mais sans les touristes. Pourtant, il fait beau. Il ne pleut plus sur Nantes. Quel dommage de ne pouvoir en profiter. 

Pas le droit au chômage

Devant son salon de thé, Sébastien est dépité. Il a été, comme les autres, obligé de fermer. "Heureusement, dit-il, j'ai tout vendu samedi, j'ai senti le coup venir."

Et maintenant ?  Et l'avenir ? Sébastien essaie de ne pas trop y penser. En tant que gérant, il n'aura pas droit aux indemnités chômage. "Les charges ont été reportées, admet-il, mais les loyers ? On ne pourra pas les payer. Ça fait déjà quinze jours qu'on travaille moins. Et avant, il y a eu la crise des Gilets jaunes !"
Certains commerces ont créé une page facebook pour tenter de placer leurs invendus Solidarités Restos Nantais  Les retaurants ne peuvent plus ouvrir mais ils peuvent encore faire des plats à emporter ou de la livraison. Avant un éventuel confinement.C'est ce que va faire Edgar. Il est le gérant du restaurant du conservatoire sur l'île de Nantes. Le midi d'habitude, il faisait 200 couverts avec la clientèle des entreprises et administrations autour. C'est fini. Ce lundi matin, il se préparait à faire des plats à emporter. Mais il sait qu'il va perdre une partie de ce qui est stocké dans ses frigos. Même s'il en donne pas ci par là.

"Mes gars, mes filles vont être au chômage, s'inquiète t-il, mais moi ? En tant que gérant, je n'ai droit à rien. Il va falloir que Macron fasse une annonce !"
Aux abords des supérettes de quartier, ce n'est pas encore l'affuence mais à l'intérieur, les caisses sont toutes ouvertes. Et il y a plus de monde que d'ordinaire. 

Hermeline est allée faire ses courses. Son chariot déborde un peu. Elle dit ne pas être plus inquiète que ça. Mais elle fait ses courses quand même. Ils sont six à la maison. Et puis elle avait envie de voir comment ça se passait dans les commerces. 

"Il y a du monde, témoigne-t-elle. Il y a des gens qui sont très à cheval sur les précautions sanitaires, les distances à respecter..."
On entend quand même quelques sons de marteau-piqueur, des travaux continuent ici et là. C'est presque un son rassurant dans cette ambiance d'avant-catastrophe. 

Chacun attend maintenant de savoir quelles seront les prochaines consignes. Un stade 3 renforcé, un confinement total ?

Il va falloir pour certains apprendre à vivre ensemble 24h/24. Pas facile.

►Notre vidéo réalisée dans le centre-ville de Nantes ce lundi matin
 
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