Le musicien nantais est programmé dans le cadre de la Folle Journée en Région qui doit se dérouler, si les conditions sanitaires le permettent, le week-end du 30 et 31 janvier. Le virtuose agé de 26 ans ne comprend pas la gestion de la crise sanitaire dans les lieux culturels
Ne l'appelez pas virtuose, pourtant à 26 ans Raphaël Sévère en a bien le parcours précoce.
Né de parents musiciens, le Nantais remporte le concours international de musique classique de Tokyo à l’âge de 12 ans, joue pour la première fois à la Folle Journée à 13 ans, intègre le Conservatoire de Paris de 14 ans , est nominé aux Victoires de la Musique Classique à 15 ans.
Depuis, il s'est affirmé comme le plus jeune représentant de l’école française de clarinette et donne de multiples concerts dans le monde entier.
Une obsession de remonter sur scène
Son dernier concert ? C'était à la mi-octobre "au Grand Théâtre d'Aix-en-Provence, dans le cadre d'une initiative appelée "Nouveaux Horizons" lancée par Renaud Capuçon" se souvient le clarinettiste.
Et s'il est bien un horizon qui se dérobe sans cesse pour le jeune musicien au fur et à mesure qu'il avance, c'est bien celui de son retour sur scène.
Malgré une envie plus que jamais présente.
"Ça devient vraiment une obsession" confie le jeune homme.
Quand il aperçoit dans des films ou des documentaires des scènes qui se passent dans des salles de concert ou des pièces de théâtre c'est à chaque fois le même manque.
"Ça me manque réellement l'ambiance de la scène", confie Raphaël Sévère, "le fait d'arriver avec plein de monde, d'être dans la file d'attente puis de rentrer sur scène avec l'orchestre qui s'accorde".
"Même l'odeur de la salle, le fait que lorsque la lumière s'éteint et le rideau se lève il y a une atmosphère quasi-électrique où tout le monde se tait afin de concentrer l'attention sur scène" poursuit, presque lyrique, le virtuose.
Une folle attente pour la Folle Journée en Région
Raphaël Sévère doit rejouer à la fin du mois dans les Pays de la Loire pour une édition un peu particulière de la Folle Journée en Région, resserrée sur deux jours et au programme bouleversé pour se plier aux contraintes sanitaires.
Le musicien nantais, désormais installé à Paris, doit jouer à plusieurs reprises des oeuvres de Mozart avec le quatuor à cordes Modigliani et la flutiste Juliette Hurel.
Des musiciens avec lesquels il a l'habitude de jouer, ce qui limite les répétitions dans ce cas précis.
"On a rendez-vous à Paris pour deux dates à la fin du mois pour bien travailler le programme pendant deux après-midis, puis le jour même on a une répétition dans la salle où on va jouer" détaille Raphaël Sévère.
Il n'empêche. Ces derniers mois, le musicien a dû annuler une vingtaine de concerts, souvent au dernier moment, au gré des adaptations sanitaires changeantes pour les lieux culturels.
Il y a une formule qui circule entre les musiciens : on prépare des concerts qui vont être annulés
Le musicien nantais explique que ce flou dans une date de reprise effective des concerts est pire que tout.
"Ça nous empêche de nous inscrire dans une perspective de long terme" détaille Raphaël Sévère.
"Le bruit qui court en ce moment c'est que la reprise des salles de spectacle c'est pour le mois de mai. Ils auraient le courage de nous dire "Bon vous reprenez au mois de mai" et bien ça change tout" appuie le concertiste.
"Là on peut s'organiser différemment, on s'oriente vers des projets à long terme. On ferait par exemple des enregistrements, on ferait d'autres festivals, on organiserait des partenariats avec des chaines numériques".
"Mais là on nous dit sans arrêt :" ça va peut-être rouvrir dans trois semaines ou dans un mois" , on se maintient donc dans cet état d'alerte, dans cette énergie où l'on fait comme si tout allait se passer. Et ca ne se passe pas. Il y a, à chaque fois, une déception."
Je suis d'avis qu'il vaut mieux une grande déception, on ne joue pas pendant quatre mois, mais on s'organise derrière
Comme la proverbiale musique adoucit les moeurs, qui en ont bien besoin en cette période troublée, terminons sur une note allègre....
Quel morceau de musique nous recommandez-vous d'écouter Raphaël ?
La réponse fuse : "Pour contrer le désespoir il y a des compositeurs qui sont très lumineux comme Weber ou Mendelssohn. Ecoutez-les et vous êtes vraiment ensoleillés pour la journée".
De notre côté, ajoutons, dusse la modestie naturelle du musicien en souffrir, une oeuvre personnelle de Raphaël Sévère.
Qui permettra à l'internaute profane de se familiariser avec l'art subtil du concertiste, également compositeur.
Sa "Légende pour clarinette et orchestre", commande de l'Orchestre National de Bretagne, créée le 12 Mars 2020 à l'opéra de Rennes.