DÉCOUVERTE. La première brasserie artisanale d’insertion en France permet de garder "La Tête haute"

"La Tête Haute" est une brasserie installée au Cellier, près de Nantes. Sur les 20 salariés de l'entreprise, 8 sont en réinsertion professionnelle. Samuel et Fabien se sont lancés dans ce projet social il y a 5 ans.

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Samuel était conducteur de travaux dans le BTP et travaillait sur de très gros chantiers, Fabien était éducateur. Ils brassaient tous deux en amateurs dans leur garage.

En 2017, ils décident de se reconvertir et s'associent pour fonder la première brasserie artisanale d’insertion en France. 

"La brasserie trouve son nom "Tête Haute"  en référence au projet social, au houblon qui pousse à 7 m de haut et à nos bières de fermentation haute", expliquent les deux compères, qui démarrent leur activité en 2018.

Trois ans plus tard, Samuel et Fabien sont rejoints par Aude. Elle veut se reconvertir comme zythologue, qui est à la bière ce que l'oenologue est au vin.

"Quand j'ai décidé de faire ma formation de zythologue, j'ai cherché une brasserie qui puisse m'accueillir pour une alternance, explique-t-elle, j'avais envie de travailler avec l'équipe de la Tête haute pour la partie insertion, le projet m'intéressait plus que d'être simplement brasseur".

Petit à petit, l'équipe s'élargit, la brasserie s'agrandit. Il lui faut trouver un nouveau local, 1 000m² de bâtiment dans la ZI des Relandières au Cellier. Désormais ils sont 20 à y travailler dont huit sont en réinsertion professionnelle.

Des salariés au parcours cabossé

Marie-Françoise a été l'une des premières salariées en insertion à rejoindre l'aventure de la Tête haute.

Elle raconte son parcours, l'usine de chaussures dans laquelle elle travaillait et qui a brûlé, "l'année de (son) mariage, on avait des parts dedans"  puis les boulots qu'elle enchaîne.

Eté 2014, un gros pépin de santé lui tombe dessus, "juste après mes 50 ans". 

"Trois semaines à l'hôpital, je décide de sortir, je marche à peine", raconte Marie-Françoise. Elle arrivera finalement à retravailler.

"A 55 ans, la baisse de travail m'amène à rebondir". Marie-Françoise va voir son conseiller Pôle emploi qui l'informe que la Tête haute recrute. CV, entretien, essai. "Je ne voulais pas vraiment reprendre un travail aussi technique, je cherchais quelque chose d'un peu plus posé, un peu moins physique"

La bière, jamais je n'aurais pensé faire ça. Je n'aimais pas l'odeur

Marie-Françoise

Salariée de la Tête haute

Gaël a 20 ans. Il voulait être paléontologue mais " il y a eu une période de décrochage scolaire en arrivant au lycée".  Pourquoi ? "C'est complètement en rapport avec le système scolaire, l'espèce de territoire de compétition sociale qu'on a au collège et au lycée".

Il finira par s'engager dans la marine nationale, où il sera "le premier stagiaire de marine mineur sorti de lycée maritime". 

Du parcours de vie de Marie-Françoise et de Gaël on n'en saura pas plus. Question de pudeur.

Un tiers lieu

En septembre 2021, l'équipe de la Tête haute a ajouté une nouvelle corde à son arc, "Entre deux brassins, une idée germe. Et si, au lieu d'être un simple lieu de consommation, nous étions un lieu de brassage d'idées, un lieu ouvert aux initiatives solidaires et engagées, un lieu ancré sur son territoire ?".

La brasserie devient alors tiers-lieu, une asso est créée, TIPI voit le jour.

"C'est un lieu de concert et de différentes soirées" comme des soirées d'initiation à la zythologie, raconte Aude, en charge de l'organisation des événements.

Aude s'occupe également de la visite des lieux. L'occasion de voir comment fonctionne cette brasserie artisanale à la vocation sociale et qui privilégie les circuits courts.

Des houblons et malts scrupuleusement sélectionnés

Du côté des matières premières, la Tête haute produit localement 30% de ses houblons. Le reste provient de houblonnières implantées dans l'ouest et en Belgique.

Ce sont aussi les Belges qui fournissent en partie le malt, mais aussi des producteurs bretons.

Je déguste les différents brassins pour être sûre qu'on est bien sur le style qu'on a défini au départ.

Aude Foucher

Zythologue

La production annuelle de la brasserie se rapproche désormais des 3 000 hectolitres dont une partie en bio.

Avec un marché, pour l'instant, "local et régional". "Pour les années à venir, on est en train d'essayer de se développer, de sortir de la Loire-Atlantique, se félicite Aude, on nous trouve déjà un peu en Vendée, en Bretagne dans certains endroits, on a de la demande mais d'ici quelques mois on va essayer d'être distribués en France un peu partout". Les discussions sont en cours avec des distributeurs.

De la lager à la pale ale

A l'issue de la visite, Aude fait déguster quelques bières produites par la Tête haute. 

De la lager à la ale, elle explique avec passion les subtilités de chacune.

"Les lager on est sur des bières à basse fermentation, avec des levures qui vont travailler sur des durées un petit peu plus longues qu'une ale, explique Aude, ce sont des bières très maltées".

Il faut compter environ trois semaines de fabrication pour une lager, "la levure va se déposer en fond de cuve et va travailler entre 8 et 14 jours".

"Les ale vont travailler entre 15 et 23°, les levures, quand elles vont avoir fini de travailler,  vont aller se coller en haut", en deux semaines la bière sera prête.

Cuvée unique pour salarié unique

La brasserie propose trois gammes de bière dont la Pow Wow qui a la particularité de mettre en avant un salarié qui soumet une recette unique.

Un QR code sur la canette permet d'accéder à un podcast sous forme de portrait chinois "où parcours de vie et expertise sur la bière se marient".

Hamid, chauffeur-livreur à la Tête haute, a choisi un "

 Barley Wine (un "vin d'orge," une bière corsée) avec une robe blonde orangé, presque cuivrée. Sa mousse blanche est fine et peu persistante", peut-on lire sur la canette à son effigie.

Né à Casablanca au Maroc, il nous raconte ainsi dans le podcast qui lui est dédié son histoire familiale, lui qui a "grandi dans le normal, pas le luxe, dans le chaud familial", "6 filles et 4 garçons".

"Les enfants il faut les laisser grandir dans le mélange, dans l'amour d'être là où ils sont là", dit-il en parlant d'intégration, "tu sais en ce moment les discours à la télé ça fait un peu s'inquiéter, on ne peut pas se cacher derrière la réalité, il n'y a personne qui parle dans le sens des étrangers et l'immigration".

L'important c'est d'avoir mes gosses qui sont bien dans ce pays, ça c'est mon rêve !

Hamid

Chauffeur-livreur à la Tête haut

La brasserie la Tête haute est située sur la Z.I. des Relandières Nord au Cellier.

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