Avec un thermomètre à plus de 45 degrés cet été, la flambée des prix des intrants et une facture énergétique multipliée par trois, les maraichers nantais font face à de multiples difficultés au point que certains craignent pour la survie de leur entreprise.
Sur son exploitation de maraichage, située au sud de Nantes, Patrice Rouillard produit en moyenne entre 75 et 80 tonnes de fraises par an. Mais cette année, la sécheresse a ruiné sa saison.
"Avec des températures qui montent à 46 degrés à l’extérieur, en serres le plan de fraisier se rétracte sur lui-même et donc il produit beaucoup moins, explique le gérant de la Fraiseraie du Lac. On a perdu 30% de rendement."
Et sa production de légumes, radis noir, panais et rutabagas n'a pas mieux résisté. Le maraicher regarde avec dépit le stock de ses frigos. "Ça devrait être plein, mais c’est vide. Il devrait y avoir 400 palox de radis noirs, il en reste une cinquantaine. Le panais, c’est terminé."
D’ici quinze jours, fin janvier, les frigos seront vides définitivement
Patrice RouillardMaraicher
Indépendant depuis 2017 après avoir racheté les parts de ses associés, Patrice Rouillard était loin d'imaginer qu'il serait au bord de la faillite cinq ans plus tard. "Janvier, février, mars, ce sont les trois mois où on refait notre trésorerie. Ce sont les mois pendant lesquels les gens mangent des légumes, mais là, il n’y en a pas !", s'alarme-t-il.
(Reportage de Céline Dupeyrat, Vincent Calcagni et Nathalie Saliou-Tendron)
Il espérait un chiffre d'affaires d'environ 1,5 million d'euros en 2022. Au final, il affiche un manque à gagner de près de 450 000 euros. "J'ai vendu deux tracteurs, deux enrouleurs, une herse, on a vendu ce qu’on pouvait pour ramener de la trésorerie."
Contraint par sa situation financière, il va licencier quatre de ses quatorze salariés. Cinq autres vont basculer en activité partielle.
Pour l’instant on a payé tout le monde, les salaires, les fournisseurs, mais fin janvier ce ne sera plus possible. S'il n'y a pas d'aides de la part des banques ou de l’Etat, beaucoup d’entreprises vont tirer le rideau, ça va être terminé.
Patrice RouillardMaraicher
Malgré l'épisode caniculaire exceptionnel à l'été 2022, la profession n'a pas obtenu la reconnaissance de calamité agricole. Pour tenter de s'en sortir et sauver l'entreprise fondée en 1968, il a décidé de changer de modèle économique. Il va réduire de moitié ses surfaces de culture et se concentrer désormais sur des productions moins gourmandes en eau.
La filière maraichage compte 200 entreprises en pays nantais et emploie 3 000 personnes en CDI et 2 500 en CDD.