Dans la nuit du 21 au 22 juin 2019, des teufeurs tombent dans la Loire, suite à une charge policière, à l'occasion de la fête de la musique. L'un d'eux, Steve, un jeune homme de 24 ans, meurt noyé. Cinq après, s'ouvre à Rennes le procès du commissaire Chassaing, l'officier en charge de l'opération cette nuit-là.
Bientôt cinq ans depuis cette nuit de juin 2019. Le temps s'est écoulé comme la Loire, immuable au pied de ce quai tragique auquel il est désormais impossible d'accéder.
Fini les fêtes de la musique alternative tolérées ici pendant des années, fini l'insouciance d'amis qui ont perdu un des leurs. Il s'appelait Steve, Steve Maia Caniço et son prénom est partout, sur les murs, les quais, les panneaux.
Steve, c'était un garçon de 24 ans, animateur scolaire à Treillières au nord de Nantes et amateur de théâtre. Mais sa passion, c'était la musique. Techno surtout, lors de free parties qu'il rejoignait le plus souvent possible.
Chronique d'une nuit tragique
Le 21 juin 2019, Steve retrouve ses amis, quai Wilson à Nantes pour une fête de la musique parallèle, celle des teufeurs. Des centaines de personnes se massent sur cet espace en friche où l'accès à la Loire n'est pas barriéré.
Les années précédentes, tout s'est bien passé ici, mais pas cette fois.
À 4h31, la police, qui a subi une pluie de projectiles, selon le témoignage d'agents, décide de répliquer. Elle charge et lance des gaz lacrymogènes et des grenades de désencerclement.
Panique sur le quai où les fêtards perdent leurs repères dans le brouillard de gaz. Plusieurs personnes, entre 11 et 14, tombent dans la Loire. Elles sont rapidement secourues, toutes sauf une, Steve.
Une heure avant la charge, il est aperçu par des amis assis sur le quai Wilson, fatigué, comme il le signale dans un de ses derniers SMS.
"Où est Steve ?"
Mais après les heurts avec les policiers, plus aucune trace du jeune homme. L'inquiétude monte très vite, car Steve ne sait pas nager. Des recherches importantes sont lancées en Loire et sur la terre ferme.
C'est la colère qui déferle, dénonçant une intervention policière disproportionnée et inappropriée dans un lieu dangereux. Les manifestations se multiplient à Nantes et bien au-delà, autour de ces trois mots, "Où est Steve ?"
Une question sans réponse pendant cinq semaines et demi, jusqu'à ce que le corps soit retrouvé en Loire le 29 juillet. Le lendemain, l'IGPN, la police des polices, juge dans son rapport que ce décès n'est pas lié à l'intervention policière.
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Le portable a coupé à 4 h 33 et 14 secondes
Mais l'autre enquête, pénale cette fois, ne fait que commencer. Des centaines de personnes sont auditionnées, des témoins de la charge, des policiers, mais aussi la maire de Nantes, le préfet de l'époque et son directeur de cabinet.
Le timing de la nuit est étudié seconde par seconde. Et l'élément qui fait basculer l'enquête, c'est l'expertise très poussée menée sur le téléphone de Steve, car elle est formelle.
Le portable a coupé à 4 h 33 et 14 secondes au moment de sa chute dans la Loire. Deux minutes après le début de la charge policière ordonnée par le commissaire Chassaing, présent sur le quai Wilson la nuit du drame.
Fin 2023, il est renvoyé devant le tribunal correctionnel pour homicide involontaire, lui et lui seul. Les autres mis en examen ou témoins assistés bénéficient tous d'un non-lieu.
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Cinq jours de procès
"Le commissaire Grégoire Chassaing n'est pas un bouc émissaire. Il est un homme responsable et je pense qu'il sera déclaré coupable d'homicide involontaire", explique Me Cécile de Oliveira, avocate des parties civiles.
Mais pour l'avocat du policier, le procès montrera les failles de l'instruction.
"Il ressort également du dossier que monsieur Steve Maia Caniço n'a pas été exposé, n'a pas été affecté par du gaz lacrymogène avant sa chute" expliquait Me Louis Cailliez, dans une conférence de presse le 4 juin dernier.
Pendant cinq jours, une trentaine de témoins et d'experts vont être entendus devant le tribunal à Rennes. Grégoire Chassaing, qui vient d'être promu chef de la circonscription de police nationale de Lyon le 1ᵉʳ juin dernier, encourt trois ans de prison.
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