Conducteur de tramway, c'est aussi un job d'étudiant à Nantes

Ils sont 40 étudiants embauchés comme conducteurs de tramway à la société des transports de l'agglomération nantaise, la SEMITAN. Et, chaque année, sept à huit jeunes sont recrutés pour les remplacements et compléter ce personnel. Un recrutement exigeant pour un boulot responsabilisant.

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Ils sont étudiants dans le secteur médical, la gestion, les maths ou encore le graphisme et ils se retrouvent régulièrement le soir pour prendre des cours de...conduite de tramway !

Un vrai job d'étudiant payé 40 % au dessus du SMIC, valorisant, mais attention, la sélection est sévère.

Cette année, plus de 300 candidats ont envoyé leur CV mais seuls huit ont été retenus au final pour suivre la formation.

"Lorsqu'un étudiant postule, explique Séverine Bodin, chargée de recrutement à la SEMITAN, on lui présente nos attentes, on parle du métier, des contraintes, de l'hygiène de vie, de la formation qui est assez énergivore, de l'organisation. On a déjà des personnes qui abandonnent à ce niveau."

"On aime bien qu'ils aient un projet d'études."

Aucun prérequis exigé pour ce job étudiant si ce n'est d'avoir le permis B. 

"On a un contrat moral avec les étudiants, précise tout de même Benjamin Peaudeau, autre chargé de recrutement à la SEMITAN. Les étudiants doivent s'engager à rester trois ans minimum pour ce CDI à temps partiel. C'est pour ça qu'on aime bien qu'ils aient un projet d'études, un projet bien réfléchi." Mais ce n'est qu'un engagement moral, rien d'écrit.

Lorsqu'ils sont recrutés, après avoir subi avec succès des tests sur leurs capacités d'analyse, de concentration, de réaction et leur sens des responsabilité, ainsi qu'une visite médicale, les étudiants suivent une formation théorique de 150 heures et 130 heures de conduite. Elle se déroule en cours du soir de mai à juin et à plein temps de juillet à fin août.

Ce mardi-là, les huit étudiants en formation avaient une formation de conduite au départ du dépôt de tramway de Saint-Herblain, au terminus de la ligne 3.

Après quelques minutes dans une salle de réunion, le groupe se sépare en deux. Hervé et Saad, les deux formateurs prennent chacun en charge quatre élèves-conducteurs et c'est parti pour une soirée de cours pratique de conduite sur le réseau nantais de tramway.

Mais pas question de mettre la clé de contact et d'enclencher la première, c'est un peu plus long et compliqué. Il faut d'abord préparer la rame.

Saad Chettoua, qui est le formateur de l'un des groupes, fait le tour de la rame avec les quatre jeunes. Tous ont en main la liste des points à vérifier, la procédure à suivre qui compte 40 opérations différentes.

Anouar, 22 ans, élève ingénieur, se met aux commandes en queue de rame et appuie sur le bouton de levée du pantographe, pour mettre la rame en contact avec le réseau électrique. Angèle, 21 ans, étudiante en mathématique, lui dicte la liste des opérations mais ils faudra qu'ils sachent tous faire cette checklist en autonomie.

Saad surveille les jeunes et leur rappelle certains point lorsqu'ils remontent la rame vers la cabine de conduite opposée. Vérifier les portes, les poignées d'alarme, les valideurs et composteurs. Jusqu'à la propreté de la rame et l'état des vitres. Signaler d'éventuels dégradations sur la feuille de route.

Puis Anouar prend les commandes avec Saad à ses côtés. Les trois autres étudiants suivent la manœuvre juste derrière la cabine.

Il faut d'abord sortir la rame du dépôt pour la mettre sur sa ligne. Un premier dialogue s'engage alors avec le poste de commandement. Premier stress.

"C'est angoissant, reconnaît Louise, 21 ans, étudiante en éthique médicale. Il y a vraiment un jargon particulier."

"Et le message ne doit pas dépasser 30 secondes, rappelle Saad, le formateur. Et on termine le message par : bien reçu !"

"Et si on lâche le manipulateur ?"

Le feu passe au vert, Anouar pousse le manipulateur, la rame avance. Anouar donne un coup de gong. Il est très concentré. La vitesse augmente après quelques à-coups. 

"Et si on lâche le manipulateur en étant en accélération ?" demande Angèle. "Le manipulateur revient au neutre." répond Saad.

La rame arrive à son premier arrêt, quelques usagers attendent, espérant pouvoir monter.

"Tu fais une annonce pour dire qu'on ne prend pas de voyageur" dit Saad à Anouar.

Petite discussion entre les étudiants qui se demandent si sur cette tranche de la ligne on doit rouler à 30 ou 40 km/h.

Nouvel arrêt. "On va faire un haut le pied" annonce Saad. Ce qui signifie que la rame ne stoppera pas à cette station, elle ne fera que ralentir. Et il y a du monde. Anouar n'hésite pas et donne du gong à plusieurs reprises.

"L'entrée en station, c'est combien les amis ?" interroge le formateur. "35 !" répond Louise. "Max 35 !" confirme Saad.

Vers le rond-point de Vannes, la situation se complique. Un appel du poste de commandement signale une ambulance sur la voie. Il faut prendre le combiné, répondre à l'appel, freiner. Anouar tente de tout faire mais raccroche un peu au nez du poste de commandement qui ne sait pas s'il a bien reçu la consigne. Saad lui donne un coup de main pour passer ce moment un peu tendu. 

"Pour moi, c'est une expérience unique, déclare Jules,18 ans, le benjamin du groupe. Il est étudiant en gestion des entreprises. J'ai attendu d'avoir le permis pour postuler. C'est une manière de gagner en maturité." Il a bien l'intention d'aller jusqu'au bout de la formation et de faire ce travail pendant ses trois années d'études et plus encore s'il intègre ensuite une école de commerce à Nantes.

"On est prisonnier de notre rame."

A la station Tour Bretagne, Louise prend le relai. On est en centre-ville et même s'il est plus de 20h, il y a encore du monde aux arrêts. A Commerce, Louise insiste un peu sur le gong. Derrière, ses collègues étudiants sourient.

"C'est un peu stressant de gérer plusieurs choses à la fois avoue Anouar. Ça venir avec le temps. Mais ça l'est plus qu'en voiture. En voiture, on peut dévier, pas avec le tram. On nous a dit au début : on est prisonnier de notre rame."

L'étudiant apprécie de voir la ville sous un autre angle. "Il y a des tronçons où il y a de la verdure, dit-il. En tram, c'est encore plus beau qu'en voiture." Et lorsqu'il est piéton, Anouar s'intéresse maintenant aux signaux ou aux aiguillages.

►vidéo de Louise, étudiante, aux commandes du tramway avec Saad, le formateur.

durée de la vidéo : 00h00mn40s
Louise, étudiante, prend un cours de conduite de tramway sur le réseau de la TAN ©France Télévisions Olivier Quentin

Saad est tout a fait satisfait de ses élèves. "On a un public qui est dans une dynamique perpétuelle d'apprentissage, constate-t-il. Ça va vite pour les ancrages de savoirs. Même s'ils vont mettre plus de temps pour acquérir les gestes métiers. En interne, les conducteurs tram sont d'abord conducteurs de bus et ils ont déjà une expérience de la conduite, de l'espace public."

Le taux de réussite est maximal. Mais ça ne veut pas dire que la SEMITAN prend tout le monde par principe. "On ne prendra pas le risque !" nous dit-on

"Les phases de recrutement ont déjà bien sélectionné, fait remarquer Saad Chettoua. On a la crème ! Je suis surpris de la maturité qu'ils ont."

Pour la SEMITAN, ces contrats proposés aux étudiants qui s'engagent à prendre des services sur un certain nombre de week-ends et de vacances dans l'année est bénéfique. Les jeunes sont bien intégrés dans l'équipe de conducteurs titulaires qui est ainsi moins sollicitée sur ces périodes-là.

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