Nantes : il y a un an, les quartiers s'embrasaient après la mort d'Aboubacar Fofana

Le 3 juillet 2018, des violences urbaines éclataient en soirée à Nantes dans plusieurs quartiers de la ville, après la mort du conducteur d'une voiture, tué par balle lors d'un contrôle de police au Breil. 

Le 3 juillet 2018, un jeune conducteur était tué par balles lors d'un contrôle de police, dans le quartier du Breil à Nantes. Le début de plusieurs nuits d'émeute qui toucheront les quartiers nantais.
 

"Ça a été brûlé parce qu'on avait la haine contre la police"

Au coeur des Dervallières, le centre commercial brûlé l'année dernière. Comme d'autres commerçants, le coiffeur a été relogé, mais ne sait pas quand il retrouvera une boutique à lui.

"Depuis un an on attend de retourner là-bas en face, mais on n'a pas de nouvelles, il n'y a rien. On ne sait pas comment ça va être après, si on va attendre longtemps ou pas. Il y en a qui disent un an, d'autres 4-5 ans, on ne sait pas", déplore Youssef El Alami.

Il a d'abord fallu faire venir les experts,  puis contacter tous les propriétaires, mais le dossier avance. Ici, la ville a obtenu 10 millions d'euros d'une agence de l'Etat pour rénover, finalement, l'ensemble du quartier.
Au Breil, un centre médical et une association ont brûlé. La mairie n'avance ici aucun calendrier, aucun budget pour des travaux.

Il n'y a rien qui avance par rapport à tout ce qui a été brûlé - Gisèle Griselhuver, habitante du Breil 

Par rapport aux Dervallières, "nous, il n'y a rien qui a bougé, il n'y a rien qui a été fait par rapport à tout ce qui a été brûlé. Aux Dervallières, ça a été beaucoup plus vite." déplore Gisèle Griselhuver, qui habite le quartier depuis 39 ans.

L'investissement le plus visible au Breil, c'est la nouvelle aire de jeu ouverte cet automne mais que les usagers jugent mal conçue.

"Ils nous ont laissé un parc en plein soleil avec des structures qui ne sont même pas adaptées aux enfants, aux tout-petits", déplore une habitante du quartier du Breil.

Ces quelques investissements et ces projets n'ont pas changé le sentiment d'abandon que ressentent la plupart des habitants du Breil.

Parmi les avancées, un local, attribué le soir aux jeunes du quartier, mais qui n'a rien changé à leur profonde colère.

Ça a été brûlé parce qu'on avait la haine contre la police - un jeune du Breil

"On a encore la haine, c'est des assassins", explique un jeune du quartier, "quand il y a des trucs, ils sont pas là, mais quand y'a des courses poursuites avec la police, des scooters volés, ils sont là. Quand on se fait tirer dessus, ils sont jamais là, mais quand nous on va tirer dans d'autres quartiers où il y a des problèmes, ils sont toujours là, par contre"...

 

Le 3 juillet 2018, les quartiers de Nantes s'enflamment

Il est aux environs de 20h30 ce mardi 3 juillet 2018. Aboubacar Fofana, 22 ans, est contrôlé par la police dans le quartier du Breil, au volant de sa voiture. 

Le contrôle policier tourne mal, le jeune homme décline une fausse identité. Il refuse également d'obtempérer.

Le conducteur "faisant mine de sortir de son véhicule, a fait une marche arrière et a percuté un fonctionnaire de police, le blessant légèrement aux genoux", indiquera Jean-Christophe Bertrand, le directeur départemental de la Sécurité publique, "ce qui a entraîné immédiatement une réplique d’un de ses collègues, qui était en sécurisation du contrôle et qui a utilisé son arme, blessant grièvement le chauffeur du véhicule", expliquera Jean-Christophe Bertrand, le directeur départemental de la Sécurité publique (DDSP).

Aboubacar Fofana décède des suites de ses blessures. Le CRS, auteur du tir, est immédiatement placé en garde à vue. Il invoque d'abord la légitime défense, avant de parler de tir accidentel.
 

"Je suis ici depuis 16 ans, c'est incompréhensible"

Dans la soirée, le quartier du Breil s'enflamme. Des affrontemernts démarrent entre jeunes et forces de l'ordre. Jets de cocktails molotov, de projectiles, voitures brûlées. Un centre médical est également incendié.

"On est encore sous le choc" explique, le matin du 4 juillet, Jérémie Boyer, kinésithérapeute au Breil, "on est trois kinés. Avec mes collègues orthophonistes, on a perdu notre lieu de travail, tout notre matériel, le coup est rude".

"Ça n'a aucun intérêt de détruire les lieux où on soigne les gens, les anciens, les jeunes... toutes les générations"
 renchérit Stéphane Baraton, infirmier, "je suis ici depuis 16 ans, c'est incompréhensible".

Au cours de la nuit, la violence saisit également les quartiers de Malakoff et des Dervallières.La mairie annexe des Dervallières est détruite. A Malakoff, c'est  la maison des Haubans qui est ravagée par les flammes.

La famille d'Aboubacar Fofana appelle alors au calme. Mais la marche blanche, qui rassemble un millier de personnes au Breil le jeudi 5 juillet, ne ramène pas de sérénité dans les quartiers, qui vont connaître deux autres nuits tendues.
Les émeutes s'étendront aux quartiers de Beaulieu, Port Boyer, le Bout des Pavés ou encore la Bottière.

Un an après, une plaque à la mémoire d'Ababoucar Fofana a été installée dans le quartier du Breil, rue des Plantes, sur les lieux du drame.

Ce mercredi en fin d'après-midi, une marche pacifique, à l'initiative des jeunes du Breil, a eu lieu. Environ 200 personnes y ont participé.

"Une mémoire disparait forcément avec le temps qui court" - Franck Boëzec, avocat de la famille d'Aboubacar Fofana

"Normalement, un juge d'instruction doit entendre une personne tous les quatre mois, au regard de ce qu'est la pratique judiciaire dans les dossiers criminels", explique l'avocat Franck Boëzec, présent ce mercredi soir à la marche pour Aboubacar Fofana "on sait que depuis 12 mois la personne pricnipale mise en examen dans ce dossier n'a toujours pas été questionnée par le magistrat instructeur sur ce qu'est sa vérité".





 
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