En amont de la journée du 25 novembre, journée internationale de lutte et de manifestations contre les violences faites aux femmes, la ville de Nantes et la gendarmerie travaillent main dans la main.
Il est 22h50, deux enfants sont enfermés dans une chambre et l'aîné téléphone pour signaler que leur mère appelle au secours. Comment réagir aux violences faites aux femmes ? À Nantes, la gendarmerie met l'accent sur la formation tandis que la mairie va ouvrir un centre d'accueil dédié.
Des cas comme celui-ci "sont des cas concrets qu'on voit régulièrement", expliquent les gendarmes à propos des mises en situation que la formatrice, également comédienne, leur propose pour travailler les émotions et les postures.
Les quinze participants de la session annuelle de quatre jours qui se terminait mardi sont tous volontaires. L'un d'eux indique qu'un meurtre conjugal l'an passé dans sa commune du sud du département "l'a marqué", tandis qu'un autre se voit déjà comme futur "trait d'union" capable de "rectifier le tir" si des collègues venaient à manquer de tact devant une victime.
Ils découvren, à l'occasion de cette session, un dispositif propre à la Loire-Atlantique et mis en place en 2016, qui consiste à rappeler les femmes victimes de violences dans un délai de 48 heures après les interventions.
Deux jeunes en service civique assurent ces appels "de manière à reprendre à froid la situation et à proposer aux gens une orientation", explique le lieutenant-colonel Laurent Kerdoncuff à l'origine de cette initiative mobilisant depuis plusieurs mois Élodie Thomas, 25 ans qui se dit motivée par "l'envie de se rendre utile".
Une vraie évolution
Emmanuelle Beauchêne, coordinatrice de l'association Solidarité Femmes, constate"une vraie évolution". "Il y a dix ans, vous n'auriez pas vu un gendarme ici" pour une rencontre interprofessionnelle, comme celle organisée mardi en amont du 25 novembre, journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes.
Emmanuelle Beauchêne salue également le projet de centre post-traumatique lancé par la mairie de Nantes et qui doit ouvrir en septembre 2019.
Cette structure sera une première car "c'est une ville qui la met en place", indique-t-elle, ajoutant que d'autres centres existent déjà en France mais émanent d'hôpitaux.
a "spécificité" sera d'apporter dans un même lieu "des réponses en matière de justice et au niveau médical", avec l'appui d'associations, poursuit Emmanuelle Beauchêne, qui a été associée à la genèse du projet.
Le but de ce projet, forgé à l'issue d'une concertation avec les différents acteurs sur plusieurs mois, est d'éviter aux victimes de devoir répéter inlassablement leur histoire et d'être orientées efficacement.
Lieu unique
En poussant la porte de ce centre qui sera ouvert en permanence, les femmes auront face à elles "l'ensemble des professionnels, à la fois sur le champ médical" , avec un psychiatre qui va pouvoir évaluer vraiment le trouble et les besoins, des infirmiers et des psychologues. Il y aura également un accompagnement social avec des travailleurs sociaux qui seront là pour accompagner sur l'accès aux droits", détaille Aïcha Bassal adjointe au maire de Nantes.
L'objectif est que les femmes identifient ce lieu unique pour y trouver l'information dont elles peuvent avoir besoin pour être accompagner dans un dépôt de plainte, des démarches auprès de Caisse d'allocations familiales ou encore pour connaître le soutien qu'offrent les associations.
Le centre pourra ainsi proposer des hébergements d'urgence pour une ou deux nuits, mais n'a pas vocation à se substituer à la mission des associations comme Solidarité Femmes, qui continuera de proposer des logements, à des adresses tenues secrètes, dans lesquelles des femmes et leurs enfants peuvent résider en colocation le temps de trouver des solutions pour échapper aux violences.
Ce samedi 24 novembre, une marche contre les violences sexistes et sexuelles partira à 14 h de la gare maritime de Nantes et arrivera au Miroir d’eau. Cette marche sera ponctuée d’interventions, de chants et d’une installation de chaussures rouges symbolisant les violences faites aux femmes.
Des chiffres inquiétants
Aujourd’hui,1 femme sur 3 dans le monde subit des violences. Ces chiffres montrent malheureusement que le chemin à parcourir pour éradiquer ces violences est encore long...Les violences faites aux femmes prennent plusieurs formes, mais chacune d’entre elle marque de manière indélébile. Qu’elles soient psychologiques, physiques ou sexuelles, qu’elles se produisent dans la famille, dans l’espace public ou au travail, elles ont les mêmes points communs : elles sont inacceptables, insupportables et participent de la volonté de dominer l’autre.
Violences conjugales :
Le ministère de l’Intérieur rapportait qu’en 2016, 1 femme meurt tous les 3 jours du fait de la violence de son partenaire ou ex-partenaire.
Le site du gouvernement a réalisé une enquête sur un panel de femmes âgées de 18 à 75 ans.
En moyenne, par an, 225 000 femmes âgées de 18 à 75 ans sont victimes de violences physiques et/ou sexuelles commises par leur ancien ou actuel partenaire intime. L’auteur de ces violences est le mari, concubin, pacsé, petit-ami - ancien ou actuel - cohabitant ou non.
3 femmes victimes sur 4 déclarent avoir subi des faits répétés.
8 femmes victimes sur 10 déclarent avoir également été soumises à des atteintes psychologiques ou des agressions verbales.
Comment avoir le courage ensuite de porter plainte ? La situation des violences conjugales est encore plus difficile à gérer et à dénoncer que les autres cas d'agressions commis pas des inconnus.
Parmi ces femmes victimes, 19 % déclarent avoir déposé une plainte en gendarmerie ou en commissariat de police suite à ces violences.
En 2016, 123 femmes ont été tuées par leur partenaire ou ex-partenaire intime "officiel" (conjoint, concubin, pacsé ou « ex ») ou non officiel (petits-amis, amants, relations épisodiques...).