Les lycéens ont repris l'école avec une heure de retard ce lundi 4 novembre. Plus d'un mois après l'arrestation et la mise en examen d'un élève pour "menaces de mort" envers une de leur collègue, les professeurs du lycée Jean Perrin dénoncent un dialogue rompu avec leur cheffe d'établissement.
Les salles de classe du lycée Jean Perrin sont restées closes ce lundi matin. Pourtant, les professeurs étaient bien là, dès 8 heures. Mais, ils ont commencé ce jour de rentrée en troquant leurs fiches de cours par les tracts syndicaux.
"Tout le personnel de l'établissement a été invité à une heure d'information syndicale. Les élèves ont été prévenus en amont", informe une enseignante de lettre et d'histoire. Au cours de cette réunion, une majorité d'enseignants, mais également des agents administratifs du lycée, sont revenus sur les récents événements qui ont bousculé la cité scolaire.
Le 17 septembre dernier, un lycéen a été mis en examen pour "apologie publique d’un acte de terrorisme" et "menaces de mort" contre une enseignante de l'établissement ligérien. Quelques jours auparavant, sur l'application Telegram, l'adolescent affirmait vouloir "planter à la jugulaire" cette professeure. Le message a été repéré par les services de renseignements.
On ne se sent toujours pas soutenu par notre direction et l'ensemble de l'Éducation nationale
Une professeure de lettre et d'histoire
"Ce fut un choc pour nous. Maintenant, ça va bientôt faire deux mois que ça s'est passé et on ne se sent toujours pas soutenu par notre direction et l'ensemble de l'Éducation nationale", confie la professeure de lettre et d'histoire, le visage fermé et les yeux fatigués, à la sortie de la réunion.
Un dialogue rompu avec la proviseure
À l'origine de cette heure d'information syndicale, une phrase prononcée par la proviseure du lycée dans les colonnes de nos confrères de Ouest-France. "Personne n’avait vraiment vu de signaux faibles", avait-elle déclaré au sujet de l'adolescent mis en examen.
Un 'signal faible' est par définition "une information précoce de faible intensité annonciatrice d'une menace".
"Ses termes laissent à penser que rien n'aurait pu prédire ce qui allait se passer. Peut-être, mais deux jours avant le message sur Telegram, ce même élève avait pointé notre collègue en mimant un tir d'arme à feu. Un rapport d'incident avait donc été envoyé à la direction du lycée dans la foulée. Et ça faisait déjà suite à des signalements de l'année dernière…", précise une enseignante d'histoire géographie.
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Pour elle, la sortie de sa proviseure dans le quotidien régional est un signe de désaveu. "Ça signifie qu'elle ne nous soutient pas", appuie-t-elle. Avec une centaine d'autres professeurs et membres du personnel du lycée, cette enseignante a signé une lettre adressée à la rectrice d'Académie, avant les vacances de la Toussaint.
On veut aussi préserver nos élèves de tout ça
Une professeure d'histoire et géographie
"On lui demande de mettre en place une médiation pour rétablir le dialogue avec notre cheffe d'établissement. On attendait une réponse aujourd'hui", précise-t-elle. En cas de refus, les signataires menaçaient de se mettre en grève.
Et ce lundi matin, ils n'ont eu comme réponse que l'absence de leur proviseur : "Elle n'est pas venue, à cause d'un rendez-vous médical. Puis, le rectorat annonce lui chercher un remplaçant. Donc, on pense qu'elle ne reviendra pas tout de suite", informe la professeure. La cheffe d'établissement devait être de retour d'un premier arrêt maladie de près de trois semaines ce lundi matin.
Pour le moment, la direction du lycée Jean Perrin est assurée par intérim et le corps enseignant assure ne pas faire grève dans les jours à venir. "On veut aussi préserver nos élèves de tout ça", ajoute l'enseignante d'histoire et géographie.
Une situation insécurisante
À quelques minutes de retourner dans leurs classes respectives, les deux enseignantes se disent inquiètes pas la situation. "Au moment même où s’ouvre le procès de Samuel Paty, on sait qu'on n'est soutenu ni par notre direction, ni par notre institution. On ne se sent pas en sécurité", affirme l'une d'elles.
Toutes deux professeures depuis plus de 10 ans dans l'établissement rezéen, elles assurent aimer leurs métiers et leurs élèves. "Mais après l'épisode des menaces de morts, on a eu accès à une cellule psychologique. La psychologue a conseillé à certains de nos collègues de changer de métier… Voilà le seul soutien qu'on a eu et ce n'est pas encourageant", déplorent-elles.
Quant à leur collègue victime des menaces de mort, elle attend toujours un retour du rectorat pour savoir s'il lui valide le statut "d'accident de service". "Et on ne lui pas apporté automatiquement la protection fonctionnelle à laquelle tout agent public a le droit", ajoutent les enseignantes qui attendent désormais des réponses concrètes de la part du rectorat.
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