"Sauvage" le nouveau roman de la Nantaise Julia Kerninon

C'est le cinquième roman de Julia Kerninon. "Sauvage", édité chez L'Iconoclaste, sort en librairie le 17 août. Parfait pour passer un bon moment pendant les vacances... ou après.

Lorsqu’elle avait publié son premier roman, en 2009, la Nantaise Julia Kerninon (qui signait à l’époque Julia Kino), était encore étudiante.

"Stiletto" était un roman noir dont la maturité d’écriture étonnait déjà de la part d’une toute jeune femme de 22 ans.

Ottavia Selvaggio (sauvage, en Italien)

14 ans et cinq romans plus tard, à la lecture de "Sauvage" (Éditions l'Iconoclaste), on se dit que l’auteure a dû déjà vivre cent vies pour pouvoir, à ce point, entrer dans les détails de la psychologie féminine. Et c’en est presque inquiétant. Que reste-t-il à vivre quand on peut déjà décrire tout cela ? Et pourtant, Julia n’a que 35 ans.

Ottavia Selvaggio est une jeune femme qui se bat pour sa liberté, à commencer par la profession qu’elle choisit : cuisinière. Une cuisinière qui apprend des autres, mais qui travaille aussi ses plats à l’instinct. Comme on fait l’amour, en suivant ses désirs, ses plaisirs, avec gourmandise. 

Ottavia se fait très vite un nom à Rome où elle vit.

Elle est cuisinière, comme son père, alors que sa mère rêvait d’autres choses pour elle.

Ottavia cuisine avec passion et aime passionnément.

Les tourments d'une femme passionnée

Dans ce roman qui a donc pour décor l'Italie (pouvait-on choisir un autre lieu pour parler cuisine, fièvre et émotion ?), Julia décrit les tourments d’une femme qui devient une référence dans son domaine, qui ne laisse à personne le choix des mets et des condiments mais qui, dans sa propre vie amoureuse se heurte au défi de vouloir construire une relation à la fois durable et intense, tout en conservant une certaine liberté.

"On est là, mais on est toujours ailleurs dans nos têtes" dit à propos des femmes une des protagonistes de ce roman.

Une plongée dans l'intime féminin

"Sauvage" est comme une plongée dans les ambitions, les inquiétudes, les contradictions d’une femme du XXIè siècle. Mais ce n’est pas un roman seulement pour les femmes. Il est aussi, peut-être, un guide riche de réponses pour les hommes qui cherchent à comprendre la psychologie féminine. Même si, parfois, c’est sans concession : "Les hommes, c’est bien pour avoir des enfants. Après, on a le droit de reprendre sa vie."

Les mots sonnent juste. Les sentiments, les doutes, les instants de vie que traverse Ottavia sont subtilement décrits. Possible que Julia Kerninon prenne des notes en permanence pour pouvoir écrire avec autant de précision et d’efficacité. On suit Ottavia dans ses interrogations, ses révoltes, "J’étais fatiguée d’être tellement solide" dit-elle, ses affrontements, ses aventures qui vont et qui reviennent. On s’interroge sur soi-même aussi à l’occasion.

"Sauvage" se dévore. Comme un bon plat de pâtes all'amatriciana, accompagné d’un Valpolicella.

Julia Kerninon, est-ce que la psychologie féminine est une source d'inspiration porteuse ?

Plus je fais de livres, plus je comprends mes obsessions. Quand j'ai commencé à écrire, quand j'étais enfant, j'écrivais toujours des histoires de filles. Je cherchais désespérément les filles dans les fictions. Il y avait plus de garçons que de filles dans les dessins animés qu'on regardait, dans les livres qu'on avait à lire. Les hommes sont surreprésentés par rapport aux femmes dans tous les récits qu'on nous propose. Donc, quand j'ai commencé à écrire des livres, j'ai écrit surtout des histoires de filles. Je fais ça parce que ça m'intéresse et aussi pour repeupler la littérature de femmes. Nous, les femmes, les filles, on a été représentées dans la littérature par des hommes et, dans beaucoup de cas, ils ne savent pas vraiment ce à quoi on pense.

L'Italie, c'était l'idéal pour planter le décor de ce roman ?

J'ai vécu deux mois en Italie, il y a une dizaine d'années. Pratiquement tous les romans que j'ai écrit se passent à l'étranger. Je n'ai pas passé beaucoup de temps en France dans mon enfance. J'ai du mal à fantasmer le territoire français pour raconter des histoires. L'Italie, j'avais envie de m'en servir depuis longtemps. Au départ, je voulais faire un livre sur la cuisine. En écrivant le bouquin, petit à petit, l'Italie est revenue. Ça semblait une bonne idée de parler de cuisine avec ça. J'ai fait beaucoup de recherche pour écrire ce livre. Je ne connaissais rien à la cuisine professionnelle, à la cuisine italienne. Je me suis rendu compte que la cuisine française et la cuisine italienne étaient sœurs. J'aime bien faire la cuisine, je n'aime pas nécessairement la manger. Je voulais parler de la cuisine du côté où c'est fabriqué. Quand vous travaillez dans un restaurant, vous vous efforcez de fabriquer un truc délicieux mais ce n'est jamais vous qui allez le mettre dans votre bouche. Quand vous farcissez une dinde à Noël, vous ne pouvez pas la manger après. Tout le monde la trouve délicieuse, mais vous qui avez mis la main dans le cul de la dinde cinq heures plus tôt, pour vous, le repas, il n'existe déjà plus. C'est le travail qui m'intéressait là-dedans.

Je vais vous poser les questions que Bensch, un personnage du roman, pose à Ottavia : 

Votre recette préférée ?

C'est très embarrassant parce que ma recette préférée, c'est la blanquette de veau, mais je n'en fais plus.

Pourquoi ?

C'est peut-être le seul fragment de vrai dans cette histoire ("Sauvage"), une scène où on entend des vaches pleurer toute la nuit. Mes parents avaient une maison à côté de Blain. D'avoir entendu les vaches pleurer pour leurs veaux, ben, je ne peux plus faire de blanquette de veau.

Votre chanson préférée ?

En ce moment c'est "Stand by me", de John Lennon, qu'on écoute avec mes enfants dans la voiture.

Votre restaurant préféré ?

Chez Hami, à Berlin. Il fait de la cuisine asiatique à 5 euros le bol, c'est parfait.

 

Julia Kerninon est née à Nantes. Elle est docteure en littérature américaine. Elle a publié huit romans dont plusieurs ont été primés et vit aujourd'hui de ses productions littéraires.

Son précédent livre, Liv Maria (L'Iconoclaste), a été un succès, grâce notamment à sa sortie en format Poche chez Folio.

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