TEMOIGNAGE. Charges policières à Nantes : "une réponse complètement démesurée" estime Jérémy, tombé dans la Loire

Jérémy est l'un des 14 teufeurs tombés dans la Loire, samedi matin lors de l'intervention des policiers quai Wilson à Nantes. Il témoigne.

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"Le dernier DJ qui mixait était juste là près du bunker", sur le quai Wilson, se souvient Jérémy, "les policiers sont arrivés par la rue (qui longe le quai Wilson), ils étaient tout le long. Moi j'étais un peu en retrait sur la bande de béton", toute proche du bord du quai.

"Je suis arrivé à deux heures du matin, c'était ambiance bon enfant", raconte Jérémy, "c'est vers 4 heures que les forces de l'ordre sont arrivées pour demander aux sound systems (les DJ) de couper, vu que c'était l'heure du couvre-feu".

Tous ont coupé, sauf un, près du bunker.
"Les forces de l'ordre sont allés le voir pour les faire couper, ce qu'ils ont fait une première fois", poursuit le jeune homme de 24 ans, "les forces de l'ordre sont reparties un peu plus loi. Là le sound system a remis du son".

Les forces de l'ordre sont alors revenues "et ont commencé à gazer sans sommation".

Selon Jérémy, les policiers n'auraient, à ce moment-là, pas encore reçu de projectiles, "de là où j'étais je n'ai rien vu voler".

"Quant bien même il y aurait eu des tirs de projectiles, pour moi c'était une réponse complètement démesurée",
explique-t-il.

Sortir les lacrymos à 5-10m de la Loire, sortir les chiens, les matraques, les LBD (...) c'est pas réfléchi - Jérémie, l'un des rescapés de la Loire

"Dès qu'ils ont lancé les lacrymogènes, j'ai voulu me décaler, le problème c'est que je suis parti dans le sens du vent, donc les gaz lacrymo m'ont suivi" , explique le jeune homme, "c'était des fumées assez denses, j'avais les yeux qui me brûlaient, donc je ne voyais rien, je ne voyais pas à un mètre devant moi".

Au bout d'un moment, j'ai mis le pied dans le vide et je suis tombé à la renverse dans la Loire - Jérémy

"J'ai eu un peu peur, le fait de tomber comme ça de si haut, je ne savais pas trop s'il y avait des obstacles dans la chute, je ne voyais rien", se remémore le jeune homme, "quand j'ai mis le pied dans le vide, je me suis dit "et merde, je vais tomber", je m'entends encore le dire"

"Une fois que j'étais dans l'eau, j'ai tout fait pour sortir la tête de l'eau le plus vite possible (...) puis j'ai cherché de quoi m'accrocher en attendant les secours", poursuit-il.

Treize autres personnes ont fini dans l'eau comme Jérémy. Toutes ont été secourues par les pompiers.

Manque à l'appel Steve, un jeune homme de 24 ans, lui aussi présent sur les quais lors de l'intervention. Nul ne sait où il se trouve aujourd'hui, même si la thèse de sa chute dans l'eau au moment de l'intervention des forces de l'ordre semble la plus plausible."J'ai de la peine, j'aimerais bien qu'on le retrouve. Je me dis que ça aurait pu être moi", "ma mère, quand je lui en ai parlé, elle était effondrée", explique Jérémy, "elle s'est dit la même chose que moi, qu'elle aurait pu perdre son gosse. Je pense aux parents de Steve cela me fait mal pour eux".

Si Jérémy a fait le choix aujourd'hui de témoigner c'est pour ne pas "que ça reste impuni". "Je veux que tout le monde soit au courant de ce qui s'est passé" et que les gens "comprennent que ce n'est pas normal, que les forces de l'ordre ont abusé".

"Colère, incompréhension, c'est un mélange de plein de sentiments",
conclut Jérémy.

► Le témoignage de Jérémy
Le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner n'a pas écarté ce mercredi que la disparition de Steve soit "peut-être" liée à l'opération policière controversée, sur laquelle le ministre a dit vouloir faire "toute la transparence".

"Un jeune homme a disparu et peut-être est-ce lié à une opération, à une intervention de la police sur laquelle j'ai demandé des explications à la police des polices pour y voir plus clair",
a déclaré le ministre de l'Intérieur lors des questions au gouvernement, à l'Assemblée nationale.

Mardi, Johanna Rolland, la maire de Nantes a écrit à Claude d'Harcourt, le préfet de Loire-Atlantique, demandant à ce que "la lumière soit faite extrêmement rapidement, sur les circonstances de cette intervention, la vérité doit être connue, sur la stratégie de sécurité adoptée à cette occasion et sur les responsabilités qui doivent être clairement établies".


 
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