Six salariés ont été réquisitionnés à la raffinerie TotalEnergies de Donges vendredi 24 mars 2023 pour livrer du carburant en Ille-et-Vilaine. L'opération vise à pallier la pénurie de carburant, mais alimente aussi le ressentiment des grévistes du site.
C'est sous des chants militants que les salariés réquisitionnés à la raffinerie TotalEnergies de Donges (Loire-Atlantique) ont rejoint leur poste de travail ce vendredi.
Entre 200 et 300 grévistes les ont accompagné pour montrer que leur mobilisation se poursuit. "Même si Macron ne veut pas nous on est là. Pour l'honneur des travailleurs et pour un monde meilleur nous on est là", ont-ils entonné en chœur.
Six grévistes ont dû se résoudre à reprendre du service dans la raffinerie, en grève reconductible depuis le 7 mars, "pour envoyer du carburant par pipeline à Vern-sur-Seiche", un dépôt de carburant près de Rennes, selon la CFDT.
Cette reprise forcée a nourri la colère des opposants à la réforme des retraites, qui annoncent que la grève reconductible se poursuit jusqu'au 31 mars à 21h.
Aucune goutte de carburant ne sort, même avec les réquisitions
"C'est le droit de grève constitutionnel qui est remis en cause", lance Fabien Privé Saint-Lanne, délégué CGT de la raffinerie de Donges.
Selon lui, ces réquisitions "sont dans la continuité de ce qui est en train de se passer. Après le gazage injustifié d'une partie du cortège de Saint-Nazaire jeudi, on a une atteinte au droit de grève".
Ironie du sort, le délégué syndical affirme qu'il y aurait "une incapacité technique à livrer Vern, il y a de la maintenance à faire sur le pipe je crois".
L'exaspération monte d'un cran
"Le président perd pied et s'entête à s'opposer aux manifestants et aux grévistes. Mais loin d'être résigné, ce mouvement il prend de l'essor et il repart", conclut Fabien Privé Saint-Lanne.
Mathieu Pineau, délégué syndical de la CGT Mine Energie 44, est hors de lui. "Je suis remonté et fatigué", confie-t-il après une prise de parole enflammée auprès de ses camarades grévistes
"Depuis le 19 janvier on est dans cette lutte, raconte-t-il, il y a eu un mépris sur tout un tas de chose. Un mépris des organisations syndicales, des manifestations, du droit de grève maintenant…Ils rejettent tout en bloc, ils ne respectent plus rien ni personne. Je ne sais pas si on peut comprendre à quel degré d'exaspération on est rendu."
Il y a eu un mépris sur tout un tas de chose. Un mépris des organisations syndicales, des manifestations, et du droit de grève maintenant.
Mathieu PineauDélégué CGT Mine Energie 44
"Le droit de grève est constitutionnel, c'est grâce à lui qu'on a conquis notre socle social. Si on ne respecte plus ça dans un pays comme la France, on va où ? La réquisition, c'est dire au salariés 'Je vous prive de ce droit'", estime Mathieu Pineau. Et de conclure "Allez, aux travaux pratiques maintenant !"
Un chèque de 30 000 € pour la caisse de grève
Le député Nupes Matthias Tavel était présent en ce jour de réquisition pour soutenir les opposants à la réforme."Il n'y a pas de légitimité parlementaire à cette réforme. L'Assemblée nationale n'a pas voté cette réforme", a-t-il martelé devant les grévistes de la raffinerie.
L'Assemblée nationale n'a pas voté cette réforme.
Matthias TavelDéputé Nupes de Loire-Atlantique
"On a saisi le Conseil constitutionnel, a-t-il poursuivi, tous les parlementaires de la Nupes ont co-signé une proposition de loi pour aller dans la démarche de procédure de référendum d'initiative partagée, même si on sait que c'est un horizon plus lointain. On prend toutes les armes qui sont à notre disposition."
Le député a remis aux salariés grévistes de la raffinerie un chèque de la "caisse de grève insoumise" d'un montant de 30 000 €. De quoi permettre à la grève de perdurer un peu plus, et de continuer à faire ressentir ses effets.
Environ 15% des stations-service françaises étaient en rupture d'au moins un carburant ce vendredi matin. La Mayenne, le Maine-et-Loire et la Loire-Atlantique font partie des neuf départements les plus touchés, où entre deux et cinq stations sur dix sont à sec.