Alors que l’accord de cession entre les Chantiers de l’Atlantique et l’Italien Fincantieri arrive à échéance ce 31 octobre prochain, la commission des Affaires Economiques du Sénat se prononce en faveur d’un nouveau projet industriel et économique.
"La cession envisagée présente des risques avérés pour les savoir-faire, la souveraineté et l’emploi français", souligne la sénatrice Sophie Primas, présidente de la commission des Affaires Economique au Sénat, à l’occasion de la présentation du rapport de la commission à la presse."La stratégie d’expansion et d’acquisition de chantiers" par l’industriel italien Fincantieri, aujourd’hui propriétaire de treize chantiers en Italie et de douze autres dans le monde, interroge notamment sur ses motivations. "Le groupe possède déjà son propre tissu de fournisseurs et sous-traitants italiens, ce qui suggère un risque de rupture de la chaîne économique des Pays de la Loire", souligne le rapport de la Commission sénatoriale.
Le risque de transferts de technologies et de savoir-faire vers CSSC, le géant public chinois de la construction navale et partenaire de Fincantieri, est également jugé dangereux.
Signé par le gouvernement en février 2018, l’accord de cession prévoit que Fincantieri détiendra 50 % du capital des Chantiers de l’Atlantique et que l’Etat lui prêtera 1% supplémentaire afin qu’il détienne le contrôle opérationnel.
Cette cession est cependant soumise à l’autorisation de la Commission européenne au titre du droit de la concurrence. Toujours dans l’attente de précisions par le groupe italien sur son projet industriel et commercial, la Commission Européenne n’a toujours pas pris sa décision.
Associer l’écosystème local et les collectivités territoriales
Alors que l’accord arrive à échéance samedi 31 octobre, la commission sénatoriale s’interroge sur la décision du gouvernement. L’accord sera-t-il reconduit ou est-ce l’opportunité de repenser l’avenir de ce fleuron industriel ? "Bien que l’État se soit efforcé de renégocier les conditions de la vente pour instaurer certains garde-fous, force est de constater que les garanties apparaissent insuffisantes. Il serait curieux que nous bradions cet actif industriel important", relève la sénatrice Sophie Primas.
"Au vu du manque d’adhésion des acteurs locaux à ce projet de fusion", la commission préconise "la co-construction d’un véritable projet industriel pour les chantiers de l’Atlantique et l’adhésion du tissu économique local". Plus de 500 entreprises locales travaillent aujourd'hui avec Les Chantiers de l'Atlantique, soit 9000 emplois. La sénatrice rappelle également que 60% des achats nécessaire à la construction des paquebots sont réalisés en France et 90% en Europe.
Elle est favorable à l’ouverture du capital à un nouveau partenaire privé, engagé sur le long terme et "capable de répondre aux aléas conjoncturels". Selon la commission, l’enjeu n’est pas financier mais industriel, économique et militaire. Plusieurs repreneurs potentiels seraient déjà identifiés en Europe, selon la sénatrice.
La commission préconise le maintien de l’Etat au capital des Chantiers de l’Atlantique à hauteur de 33%. "La présence de l’Etat doit mener un rôle stabilisateur. Nous souhaiterions qu’il garde une minorité de blocage".
La commission souhaite également encourager un "capitalisme territorial" en renforçant la part des entreprises locales au capital. Aujourd’hui actionnaires à hauteur de 1,7%, leur part pourrait monter à 7%.
Les collectivités territoriales et en particulier la Région pourrait également entrer au capital, par l’intermédiaire d’une société d’économie mixte (SEM).
Le carnet de commandes des Chantiers de l'Atlantique est rempli jusqu'en 2026, avec notamment la construction de dix paquebots de croisière, de deux sous-stations électriques et la commande par la Marine Française de quatre pétroliers ravitailleurs.
Dimanche 25 octobre, Florence Parly, la ministre des Armées a également confirmé que le futur porte-avion français serait construit aux Chantiers de l'Atlantique. Le Pang devrait être livré en 2038.