Ils ont préparé des banderoles, et se sont mis sur leur trente et un pour rendre visite à Manou, leur mamie. Toujours confinée dans son Ehpad de Pornic, elle fête ses cent ans ce dimanche. Le protocole des retrouvailles, forcément strict, n'a cependant pas gâché la fête qu'ils lui avaient préparée.
Quand ils débarquent dans la maison de retraite, pour rendre visite à leur grand-mère et arrière-grand-mère, ils ne passent pas inaperçus. Et cette fois encore, ils ont prévu de mettre le paquet, d'autant que cela fait trois mois qu'il ne l'ont pas approchée. Pour les cent ans de leur aïeule, 35 membres de la famille Clairouin ont fait le déplacement jusqu'à Sainte-Marie à Pornic.
Au début ils imaginaient pouvoir amener leur grand-mère sur la terrasse de la maison familiale, face à la mer. Mais les préconisations strictes du gouvernement, auxquelles se réfèrent les Ehpad pour organiser les visites "post-Covid", ont douché leur première envie.
Dix précieuses minutes…pas plus !
"Pendant le confinement on a fait des visios, on l'a vue aussi derrière la fenêtre de sa chambre mais ce n'est pas pareil "souffle Natacha, une des petites-filles de Manou.
"On s'est battus pour pouvoir venir la voir, pour obtenir 10 minutes avec elle. Il a fallu négocier. On a un peu harcelé la maison de retraite, mais finalement ça s'est fait, et c'était super !".
Pourtant, samedi soir, à la veille du rendez-vous, Natacha était partagée. Entre la joie de retrouver sa grand-mère bien-aimée et la crainte de la trouver fatiguée et éteinte.
"On l'a vu pendant nos visios, sa tête tombait, elle est affaiblie. Avant le confinement elle marchait, ce qui n'est plus le cas, nous allions à chaque visite faire quelques pas sur le chemin de côte. Tout le monde dans la famille savait qu'il fallait la stimuler. Elle qui a toujours été active, qui n'a jamais été malade, on a senti qu'en deux mois et demi elle a perdu ses capacités d'attention, d'audition..."
Un anniversaire, le jour de la fête des mères, impossible de rater ça !
Pour la famille Clairouin, pas question de faire l'impasse sur l'anniversaire de sa doyenne, qui tombe aussi, cette année, le jour de la fête des Mères.
"Manou c'est Sainte-Marie, la dernière grand-mère des villas". Autant dire un monument !
Manou s'appelle en fait Anne Clairouin-Hodubourg de Verbois. Elle a élevé 5 enfants.
Elle a passé sa vie entre Angers, où elle travaillait et résidait, et sa maison du bord de mer à Pornic.
C'est là, qu'elle veillait sur ses 15 petits-enfants et 36 arrières petits-enfants. "Elle a toujours été très volontaire très active, courageuse et forte". Manou jamais malade. Une grand-mère en granit.
Natacha raconte, les incontournables repas du 15 août, la fierté des enfants remontant de la plage que surplombe la maison. "On faisait toujours un coucou à Manou qui nous regardait depuis la terrasse et puis en remontant de la plage on lui montrait nos trésors, notre pêche, les coquillages que nous avions ramassé". Manou et sa maison, une bordée de souvenirs...
Quand l'âge est venu, et avec lui la fragilité, et les chutes et les maux, Manou a souhaité rejoindre l'Ehpad situé non loin de sa villa.
C'est devant une fenêtre de sa maison de retraite que les membres de sa famille ont entrepris de venir lui fêter son anniversaire.
"Pendant 10 minutes le covid n'existait plus"
"Ça s'est vraiment passé comme on le voulait! sourit Natacha, visiblement soulagée. On était rassemblés, à l'extérieur de la résidence, sur la place de l'église. Les dames de l'Ehpad avaient collé le fauteuil de Manou tout près de la fenêtre, on était à un mètre d'elle. On a chanté, elle était contente. On a tous été rassurés de la voir bien éveillée, bien en forme, on l'a vraiment sentie revivre".
Pendant dix minutes, la famille a pu profiter de Manou et elle des siens...
"C'était très émouvant, très humain, le personnel de la maison de retraite a tout filmé depuis son point de vue, je pense qu'ils ont compris qu'on avait besoin de partager ce moment avec elle. Pendant dix minutes il n'y avait plus de covid..."
Alors certes, il n'y a pas eu d'embrassades, pas de câlins, pas de mots doux glissés au creux de son oreille. "On avait envie de lui faire un gros bisou, c'est dommage...on se rattrapera cet été, quand on la serrera dans nos bras", glisse Natacha.
►Extrait d'un reportage réalisé sur la famille Clairouin