Procès de l'affaire Vanille à Angers : la jeune victime était devenue "un objet de vengeance" pour sa mère

Nathalie Stéphan comparaît depuis le lundi 6 février devant la cour d'assises d'Angers pour l'assassinat de sa fille Vanille en 2020, le jour de son premier anniversaire. Après avoir exploré le CV de l'accusée la veille, la cour a entendu ce mardi les proches et les experts psychiatres et psychologues. Ils ont étudié la personnalité de la quadragénaire.

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Dans son box, elle est immobile et taciturne, comme assommée par ses médicaments. Depuis qu'elle comparaît le 6 février devant la cour d'assises du Maine-et-Loire, Nathalie Stéphan peine à expliquer les raisons qui l'ont poussée à assassiner sa fille Vanille le jour de son premier anniversaire, le 7 février 2020.

En guise de réponse aux nombreuses questions de la cour et du ministère public, seule une phrase parvient à sortir péniblement de sa bouche, lorsque ce n'est pas simplement "oui" ou "non".

Vanille, devenue "objet de vengeance"

"Pourquoi avoir choisi d'ôter la vie à votre fille en lui entourant plusieurs fois le visage de scotch ?," tente l'avocate générale. "Pour que ça marche. Pour ne pas qu'elle me regarde. - Pour vous protéger, vous ? - Oui. - Pour vous venger ? - Oui."

Après une première journée d'audience dédiée au rappel des faits et à la personnalité de l'accusée, trois experts psychologue et psychiatres qui ont défilé à la barre ce 7 février 2023 - soit trois ans jour pour jour après les faits. Selon eux, Nathalie Stéphan ne souffre d'aucune altération ou abolition du discernement : elle aurait une personnalité borderline qui peut la rendre "dangereuse", qui lui fait rejeter systématiquement la faute sur l'autre. Ici en l'occurrence, les services sociaux.

[Pour Nathalie Stéphan,] la justice n'est pas compétente, car elle n'a donné qu'un unique rappel à la loi à son père incestueux. À l'école, ils l'ont "laissée", ils "s'en foutent d'elle", ce sont des phrases qui contaminent son discours. Elle se sent abandonnée des institutions, elle est animée d'une haine à l'encontre des services sociaux.

Dr Hélène Vergnaux

experte psychiatre

Selon la psychologue Claire Fichant, sa fille serait devenue un "objet de vengeance", ce qui pourrait expliquer pourquoi les experts n'ont pas décelé de traumatisme chez l'accusée après son acte inexplicable.

"Cet acte, elle l'a commis pour priver les autres de la présence de Vanille. Sa mort est comme une punition qui vise à pointer la défaillance des services sociaux, résume la psychiatre Hélène Vergnaux. Elle se défend avec un unique mécanisme de clivage : soit l'autre est tout bon, soit il est tout mauvais. Cela la protège d'un effondrement."

Peu d'entourage

Plus tôt dans la matinée, la cour a reçu les témoignages des peu de personnes qui ont composé l'entourage de Nathalie Stéphan avant les faits. Son ex-compagnon, D., a délivré un témoignage émouvant en tout début de journée, faisant couler une larme sur la joue de l'accusée. "Je suis marqué à vie, traumatisé à jamais," a-t-il confié à la cour. C'est avec lui que Stéphanie Stéphan avait eu une première fille, aujourd'hui âgée de 14 ans, et qui ne souhaite plus entendre parler de sa mère.

Il y a son frère aîné, Mathieu*, 47 ans, tout aussi réservé que l'accusée, qui confirme à la barre le caractère despotique de leur père, sourd et muet comme leur mère. "Ça complexifie la communication avec les autres," glisse-t-il, la tête baissée.

Puis arrive le benjamin de la fratrie Stéphan, Mickaël*, 40 ans, beaucoup plus éprouvé et accompagné d'un chien d'assistance judiciaire. L'accusée, il l'appelle  "la meurtrière de Vanille" et déclare avoir "honte d'être son frère". Lui se souvient des corrections de leur père, du frigo attaché par un cadenas pour que les enfants n'y ait pas accès.

Imprégnée des témoignages de la journée, la cour interroge à nouveau Nathalie Stéphan en fin d'audience. "Vanille pouvait-elle avoir un avenir sans vous ? interroge le président, très pédagogue depuis l'ouverture du procès. - Oui, soupire l'accusée. - Alors, pourquoi cet acte ? - Je n'ai pensé qu'à moi."

*Les prénoms des deux témoins ont été modifiés

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