Christiane Lambert a été élue ce vendredi 18 septembre, porte-voix des agriculteurs européens (COPA) à Bruxelles. Elle a gravi tous les échelons du syndicalisme agricole jusqu'à devenir désormais à 59 ans l'interlocutrice privilégiée des instances européennes.
Agricultrice âgée de 59 ans, Christiane Lambert exploite avec son mari un élevage de 230 truies dans le Maine-et-Loire à Bouillé-Ménard. Elle va cumuler la présidence du Copa avec celle de la FNSEA, comme avant elle Luc Guyau de 1997 à 1999 et Jean-Michel Lemétayer de 2007 à 2009.
Une interlocutrice redoutable
Dans une profession majoritairement masculine (un quart des chefs d'exploitation ou coexploitants sont des femmes en France), Christiane Lambert est successivement devenue la première présidente du syndicat des Jeunes agriculteurs (alors Centre national des jeunes agriculteurs, de 1994 à 1998), puis du syndicat majoritaire FNSEA depuis 2017, et désormais du Copa, qui regroupe les principaux syndicats européens."Le cumul des deux missions est le lot de tous les présidents du Copa", indique le syndicat agricole français, à la tête duquel Christiane Lambert a été reconduite sans surprise début juillet, trois ans après son élection consécutive au décès soudain de son prédécesseur Xavier Beulin.
"Un certain nombre de pays européens sont venus la chercher" pour présider le Copa, le Comité des organisations professionnelles agricoles de l'Union Européenne, convaincus de l'importance d'être représentés par une "femme à poigne" à l'heure des négociations sur la future politique agricole commune (PAC), estime le secrétaire général de la FNSEA Jérôme Despey.
Le viticulteur héraultais, que Christiane Lambert désigne chaleureusement comme son "binôme", ne tarit pas d'éloges sur celle qu'il côtoie depuis l'époque des Jeunes agriculteurs. Il décrit un "concentré d'énergie", une "bosseuse hors pair" ainsi qu'une "interlocutrice redoutable" pour ses contradicteurs.
"Etre à ses côtés, ça peut parfois faire peur, car c'est beaucoup d'exigence de sa part. Elle nous fait savoir que nos agricultrices et agriculteurs n'attendent pas."
Capitaine courageuse
Voix légèrement voilée, débit rapide, Christiane Lambert plaide inlassablement pour une meilleure rémunération des agriculteurs, préalable selon elle au verdissement des pratiques, et ne manque pas de dénoncer les "écologistes de salon" et l'"agribashing" qui les viseraient sans discernement.Dans le même temps à la FNSEA, elle a oeuvré afin de faire entendre les attentes sociétales pour une agriculture plus respectueuse de l'environnement au sein d'une organisation régulièrement accusée de défendre aveuglément le productivisme, les pesticides et les OGM.
"Il est indispensable que nous nous réformions, que nous nous adaptions, plutôt que de se mettre en résistance et de courber la tête", a-t-elle insisté lors de l'assemblée générale de son organisation, le 10 septembre.
"J'ai un profil de capitaine d'équipe de handball", se plaît-elle à dire en hommage à ses six années de pratique en compétition.
Une vie militante pour l'agriculture
Née dans le Cantal de parents agriculteurs et militants à la Jeunesse agricole chrétienne, Mme Lambert est par ailleurs animée par une "foi active", selon ses mots au journal La Croix en mars.Elle explique son parcours syndical par le fait d'avoir souffert "de l'image négative de l'agriculture", profession qu'elle affirme avoir voulu embrasser dès l'âge de huit ans.
Après son BTS agricole, elle s'est d'abord installée à 19 ans dans le Cantal, prenant très vite des responsabilités chez les Jeunes agriculteurs (JA) locaux.
Après son mariage, dont sont issus trois enfants, elle a quitté l'Auvergne à la fin des années 1980 pour reprendre avec son mari l'exploitation angevine de ses beaux-parents à Bouillé-Ménard.
Elle n'a depuis lors cessé de monter en grade aux JA, puis à la FNSEA (212.000 adhérents revendiqués), dont les présidents ont été rituellement taxés de "ministre de l'Agriculture bis".