Saumur, Maine-et-Loire : la Tapinoma Magnum, une espèce de fourmi invasive, a colonisé un quartier de la ville

Des fourmis jusqu'ici plutôt cantonnées au sud de la France ont envahi un quartier de Saumur, dans le Maine-et-Loire. La mairie a saisi l'Institut de recherche sur la biologie de Tours (IRBI) pour mieux comprendre ce phénomène.

Loïc Bidault, le conseiller municipal de Saumur en charge de l'écologie, porte la fourmi écrasée à son nez.

"C'est effectivement une odeur très forte que certains rapprochent de celle du beurre rance". Le test est efficace, il identifie la Tapinoma Magnum, cette fourmi invasive qui s'est installée dans un quartier de Saumur via une butte de terre quelle a colonisée, près du musée des blindés, au sud du centre-ville.

"On a reçu la pétition début avril, se souvient Loïc Bidault, on a répondu à chacun des habitants et on a enclenché la démarche. L'intérêt, c'était d'identifier cette fourmi." Elle avait en effet été observée depuis plusieurs années mais encore fallait-il l'identifier comme n'étant pas commune dans cette région.

Environ 220 foyers touchés

Fin mai, des scientifiques de l'Institut de Recherche sur la Biologie des Insectes de Tour sont venus porter un diagnostic. C'était bien la Tapinoma Magnum, d'ordinaire plutôt présente sur le pourtour méditerranéen.

"On a fait un plan d'attaque avec trois volets, détaille l'élu. On a un gros monticule de terre très infesté, des déblais, qu'on a complètement isolé de la fréquentation du public. On a traité nos espaces publics en testant plusieurs produits et nous avons procédé à des distributions de terre de Diatomée aux habitants qui sont concernés, un peu plus de 220 ménages."

Mais comment cette fourmi est-elle remontée jusqu'à Saumur ? Peut-être par des pots de fleurs venus de la région méditerranéenne. Cela fait penser au cas du frelon asiatique. Selon Loïc Bidault, l'observation de cette fourmi à Saumur serait le seul cas dans l'ouest de la France. Une observation, pour le moment, cantonnée à ce quartier.

La Tapinoma Magnum n'a, selon les scientifiques, aucun caractère de dangerosité.

Mais elle s’installe tant à l’extérieur qu’à l’intérieur des habitations.

"On ne pouvait pas se mettre sur la terrasse"

Jacky en a trouvé en différents endroits de son logement, dans un placard, derrière le frigo et dans son jardin. Il a essayé des insecticides, des pièges, de l’eau de javel.

Il a fini par disperser de la terre de Diatomée que lui a fournie la ville, censée contenir l'invasion.

"On dirait de la farine, dit-il, je ne sais pas si c’est efficace, on verra bien par la suite."

Chantal, son épouse, dit en avoir vu la première fois en 2015. "On a traité, traité, traité, mais ça n'a rien fait, se souvient-elle. J'en avais partout. On ne pouvait pas se mettre sur la terrasse." Et cette année, elles sont toujours là. Mais moins nombreuses. Soulagement. Mais Chantal ne veut pas revivre les invasions des années précédentes.

"Se lever le matin et avoir plein de fourmis comme ça, moi je dis, faut changer de maison !" s'exclame-t-elle.

Maryse, une autre habitante du quartier, en a une grande quantité dans sa salle à manger. "C'est la première fois que je vois ça" dit-elle.

"Une grande facilité à monter sur les personnes"

L'épicentre du phénomène se situe sur le lieu d'une ancienne école qui a été rasée pour un projet immobilier. La zone est balisée par un ruban depuis deux semaines. 

"Il faut éviter de  rentrer dans cette zone parce que vous risquez d'en propager un peu plus partout dans le quartier et dans la ville, explique Damien Courant, responsable entretien des espaces publics de Saumur-sud.  Elles ont une grande facilité à monter sur les personnes."

Damien et son équipe ont essayé différents produits, des biocides utilisés en agriculture biologique, un traitement à la vapeur pour brûler les fourmilières.

"Je pense qu'une application ne sera pas suffisante, dit-il, il faut qu'on procède à plusieurs applications."

La ville va tenter de faire un traitement simultané de toutes les zones concernées, publiques ou privées. "Peut-être que dans les prochaines semaines, on aura une vue plus pertinente sur nos traitements" espère-t-il.

voir le reportage

Alain Lenoir est professeur émérite à l'Institut de Recherche sur la Biologie des Instectes de Tour. Il est venu constater ce phénomène.

"J'ai été impressionné par la quantité de fourmis, reconnaît-il. Ça fait partie de toutes les espèces invasives qu'on voit partout dans le monde avec les déplacements. Il suffit d'une plante, d'un pot de fleurs avec une reine et quelques ouvrières."

Le professeur Lenoir, se veut rassurant, la Tapinoma Magnum n'a pas de venin. Tout au plus elle mordille, ce qui peut-être effectivement désagréable.

"Elle se développe avec les hivers doux, ajoute-t-il. A l'intérieur des maisons, il faut essayer de trouver par où elles passent et boucher les trous. Et enlever les nourritures possibles ou mettre la nourriture dans des pots bien étanches."

Composer au mieux avec cette espèce

Dans un communiqué envoyé aux habitants concernés, la mairie alerte sur l'emploi abusif de traitements.

"Les insecticides, même les plus puissants, prévient-elle, vont détruire quelques Tapinoma mais également les fourmis locales et l’année suivante, l’espèce prospérera à nouveau, sans compter que les sols seront pollués et appauvris."

Bien impuissante à trouver, pour le moment, une solution efficace, elle conseille juste de "composer au mieux avec cette espèce, limiter son extension et attendre un retour de l’équilibre de la biodiversité."

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