Elle avait petit à petit disparu des poches des écoliers avant que sa fabrication ne s'arrête définitivement jusqu'à ce qu'un artisan mayennais, Gaël Mauron, ressorte de l'oubli cette petite parcelle de notre histoire.
Elles renvoient aux cours de récréation et aux culottes courtes : les billes en terre. Une madeleine de Proust qui a bien failli disparaître du paysage si Gaël Mauron ne s'était pas lancé, bille en tête, à faire vivre ce savoir-faire artisanal.
Et c'est un peu "par hasard" que le Mayennais, fabricant de jeux en bois, s'est lancé dans l'aventure. "J'avais créé un jeu du monde et pour les pions, j'avais acheté ces billes-là, dans une petite fabrique près de Limoges".
Le dernier fabricant de billes en terre
Mais lorsqu’il a voulu faire une seconde série, en 2017, il a appris que l’entreprise Billes en Brousse avait fermé et impossible d'en trouver ailleurs... c'était le dernier fabricant de billes traditionnelles en Europe.
"C'était vraiment ces billes-là que je voulais... Alors je me suis dit qu'après tout, je pouvais peut-être en fabriquer moi-même". Et c'est ainsi que Gaël Mauron a décidé de reprendre le flambeau.
Mais devenir fabricant de billes en terre ne s'improvise pas du jour au lendemain, même pour cet ingénieur de formation. "Il a déjà fallu trouver les machines, j’ai appelé le liquidateur pour connaître les noms des anciens propriétaires, et par chance, l'un d'entre eux en possédait encore deux, dans ses hangars".
Des machines des années 1930, appelées des "Coucourdes", qui ressemblent à des bétonnières, qu'il a fallu entièrement restaurer.
Mais il aura fallu attendre encore un an avant que Gaël Mauron arrive à sortir ses premières billes de terre. N'ayant ni recette, ni mode d'emploi, il s'est appuyé sur les retours d'expérience d'anciens fabricants et malgré cela, ses premiers essais furent déconcertants.
Mes premières billes ressemblaient plus à des petites patates qu'à des sphères !
Gaël MauronFabricant de billes en terre
Chaque bille est unique
Dans sa coucourde : des grains de sable, du ciment mélangé à de la chaux, un peu d'humidité... Sur le papier, rien de plus simple... "C'est pourtant l'étape la plus délicate et la plus compliquée à gérer. Il faut toujours contrôler l'humidité dans la machine, la vitesse, ajuster les proportions pour que le mélange prenne autour des grains de sable pour former un noyau, la base de la bille".
Le secret, ce n'est pas la recette, mais le coup de main !
Gaël MauronFabricant de billes en terre
Un mélange qu'il surveille comme le lait sur le feu, pendant quatre heures, jusqu'à ce que les billes prennent une forme sphérique. Elles seront ensuite séchées puis calibrées, entre 14 et 16 mm de diamètre, avant d'être recouvertes de toutes les couleurs, homogènes ou mouchetées.
"Mais pas une ne se ressemble, chaque bille est unique, c'est ce qui fait le charme des billes de terre !", sourit Gaël Mauron.
Chaque année, le Mayennais vend en moyenne 60 000 billes en terre, achetées par des créateurs de jeux, mais aussi pour des loisirs créatifs "pour faire des bijoux fantaisie, comme des pendentifs ou boucles d'oreilles".
La bille de terre de Gaël Mauron a par ailleurs été retenue pour représenter la Mayenne au Palais de l'Élysée qui accueillera ce week-end la 4e édition de la Grande Exposition du Fabriqué en France.
L'atelier JHP, fabriquant des couteaux de table en Morta, basé à Saint-André-des-Eaux en Loire-Atlantique fait également partie des 122 sélectionnés.
Sfynx Industry, basé en Vendée, présentera son robot sous-marin ARIUS. L'Atelir du Maroquinier, en Sarthe, présentera son sac à bandoulière Madeleine grand modèle.
Les Rairies de Montrieux ont été retenues pour leurs plaquettes et leurs carreaux de parement en terre cuite. Autre entreprise du Maine-et-Loire retenue : les sécateurs Pradines pour Bahco, leur modèle ergonomique.
Un reportage de S. Bourgault, Florie Cotenceau et J. Arlaud
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