Les vacances de la zone C débutent pour deux semaines. Traditionnellement, cette période marque l’ouverture de la saison touristique pour les professionnels du secteur. Mais à cause du confinement national lié à l'épidémie de coronavirus, les acteurs du tourisme font grise mine.
"C’est un séisme pour le tourisme", Karen Alletru ne mâche pas ses mots pour parler de la crise économique qui secoue le monde du tourisme. Elle est en charge du développement touristique de la Vendée. Avec ses 140 kilomètres de plage, le département se hisse en première position des destinations de la région.
Le littoral vendéen a justement attiré Frédéric Puchin et sa femme. Il y a deux ans, ils vendent leur hôtel dans les Pyrénées et acquièrent l’hôtel de la Côte océane, 30 chambres avec balcon. L’établissement est installé depuis les années 1960 sur le front de mer de Saint-Jean-de Monts.
Le couple a entrepris de gros travaux de rénovation pour rafraîchir l’hôtel. Deux années de vache maigre sans salaires, pourtant cette année "on allait avoir un très bon mois d’avril. Le week-end de Pâques tombait tôt et on avait 30% de chambres occupées. Mais toutes les réservations ont été annulées".
Depuis la parution d’un décret le 25 mars, l’hôtelier aurait pu proposer un avoir à ses clients qui ont annulé. Mais il a préféré les rembourser, au risque de vider encore plus sa trésorerie. "Il faut être solidaire, beaucoup de gens sont bienveillants. Le remboursement c’est aussi être solidaire".
Pâques : la poule aux œufs d’or
Première industrie française, le tourisme représente 7,8% du PIB de la région Pays de la Loire, soit 7,6 milliards d’euros.
Alors que les vacances de printemps débutent pour la zone C, Pâques marque chaque année l’ouverture de la saison. "Avec une fermeture de parc sur avril-mai, on arriverait sur une perte de 25% de notre chiffre d’affaires", explique Céline Talineau, la directrice du Zoo de la Flèche en Sarthe. Avec 400 000 visiteurs c’est le lieu touristique le plus fréquenté du département.
Les vacances de printemps permettent souvent aux professionnels de refaire leur trésorerie. En hiver, des travaux ou aménagements sont effectués. Les caisses se remplissent à nouveau à l’arrivée des beaux jours.
Mais avec le confinement national, c’est tout un secteur qui est à l’arrêt. 44 300 employés se retrouvent au chômage technique. Pour de nombreuses PME ou très petites entreprises, le spectre de la faillite inquiète.
La région, en collaboration avec certaines banques et certaines collectivités locales, a décidé de mettre en place un "Fonds territorial résilience". L’objectif est d’accorder une avance aux entreprises de moins de 10 salariés, allant de 3 500 à 10 000 €.
"Ma banque m’a informé qu’ils gelaient tous mes prélèvements pendant 6 mois et cela pouvait aller jusqu’à un an", poursuit Frédéric Chupin. Il semble que le secteur bancaire joue aussi la carte de la solidarité. Pourtant, il existe un grand absent du secteur : le monde de l’assurance.
"On paye des assurances perte d’exploitation mais les épidémies ou pandémies ne sont pas inclues", peste l’hôtelier. "Si le gouvernement ne déclare pas l’état de catastrophe naturelle, on ne touchera jamais cette assurance".
Quand reprendre ?
Au-delà des compensations, les conditions de la reprise questionnent aussi les professionnels du tourisme.
Aujourd’hui 86% des touristes de la région sont Français, mais la région attire aussi une clientèle étrangère notamment avec de gros événements comme les 24h du Mans. Chaque année, environ 750 000 visiteurs se rendent au circuit . "On n’a aucune visibilité sur cette clientèle étrangère", précise Jean-Jacques Foignet le directeur de Sarthe Tourisme.
"On va avoir une clientèle de proximité voire d’hyper proximité", prévoit le directeur du tourisme en Sarthe. Mêmes prévisions du côté de la Loire-Atlantique. "Ce qui se laisse voir comme tendance, c’est une consommation locale de tourisme", abonde Anne-Cécile Laubion en charge de la communication.
Les professionnels anticipent alors déjà leur communication : "On va accentuer plus l’affichage sur la région, voire même sur la Loire-Atlantique". En Sarthe, une plateforme est mise à disposition pour répertorier les producteurs locaux ou les restaurateurs qui proposent de la vente à emporter.
La question reste de savoir quand l’activité reprendra.
"Là ça s’annule jusqu’au week-end de l’ascension (le 21 mai NDLR)", déplore Frédéric Chupin, l'hôtelier vendéen.
Pour établir le véritable coût de leurs pertes, les professionnels du tourisme ligériens ont entrepris une grande consultation. Les conclusions de cette enquête devraient être connues la semaine prochaine.