Emmanuel Macron l’a martelé : durant le confinement aucune entreprise ne sera laissée sur le bas-côté. En généralisant le chômage partiel aux entreprises "non-essentielles", il rassure les salariés, mais asphyxie les petits patrons. Témoignage.
"On a fait une demande d’aide à titre préventif dès le matin du 17 mars. Le vendredi 20, je recevais un accord pour mettre nos salariés en chômage partiel…notre demande a été validée, car dans notre secteur, la mise en place du télétravail est indiscutablement impossible". Adrien est à la tête d’une menuiserie, dans le sud Vendée. Il emploie 20 personnes.
Aujourd’hui, seuls 5 salariés volontaires continuent à travailler pour honorer les commandes en cours. Les autres ont tous demandé à être mis en chômage partiel.
Un droit que les patrons n’ont pas d’autre choix que de respecter "mais il ne faut pas se leurrer, explique Adrien, les mesures de chômage partiel, ce sont les entreprises qui vont les avancer…pas l’état".
De fait, si l’Etat a annoncé prendre à sa charge, le temps du confinement, 100% des Smic et plus de 80% des coûts salariaux, il ne s’agit en rien d’un cadeau. Mais plutôt d’un effet de manche.
Le soutien de l’état, "une formulation trompeuse"
"Le principe du chômage partiel est simple, décrypte Adrien, tu fais, tu paies les salaires et les remboursements interviennent sous 15 jours, si ta demande a été validée par la DIRECCTE (Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence de la Consommation, du Travail et de l’Emploi)".Encore faut-il être capable de les payer les salaires, c’est-à-dire d’avoir une trésorerie suffisante.
D’ordinaire, une fois les salaires payés, beaucoup d’entreprises réinvestissent leur chiffre d’affaires dans du matériel, ou pour entretenir leur outil de travail.
Or, si l’entreprise n’a pas les fonds suffisants, elle devra contracter un emprunt auprès de sa banque.
En fait, pour nombre de structures, l’aide affichée de l’Etat, n’est pas une aide directe, ce n'est qu’un crédit, que l’entreprise s’engage à rembourser, "alors oui les charges sociales sont suspendues mais pas le paiement de la TVA, qui est un impôt indirect, poursuit le chef d’entreprise vendéen, ce qui est évident c’est qu’on pourra faire tous les reports possibles et imaginables…au final, ce sont les entreprises qui paieront".
Adrien, comme d’autres responsables de PME ou de TPI, se voit aujourd’hui contraint d’assumer les effets d’annonce d’un gouvernement qui ne tient pas compte de ce qui se passe sur le terrain. "C’est un peu facile de dire qu’on va suspendre les échéances. Mais, le discours ambiant n’est en rien le reflet de la réalité".
Un confinement hâtif et précipité pour l'économie
En enjoignant toute la population à se confiner et en mettant à l’arrêt les entreprises considérées comme non-essentielles (hors alimentation) le gouvernement n’a certainement pas mesuré les effets qu’allait induire sa décision.Adrien est dépité, selon lui, de nombreux secteurs d’activité étaient en capacité de continuer leur activité. Le sien, par exemple.
"Nous travaillons dans un atelier de 4000m² couverts, les postes de travail peuvent être répartis tous les 2 mètres et nous travaillons avec des gants et des masques FFP3, non pas pour éviter la propagation du virus mais contre la poussière, et ce, toute l’année…Franchement mes salariés risquent moins d’attraper quelque chose en venant travailler qu’en allant faire leurs courses chez Leclerc…".
Seulement voilà, la machine s’est emballée. Les gens ont pris peur. Et le manque de clarté de l’exécutif, incitant les gens à rester chez eux et «en même temps» à aller voter a entretenu le flou dans les attitudes à adopter.
"C’est dramatique, et encore, ce n’est pas fini. Ce qui me fait peur c’est après…après le confinement, comment est-ce qu’on va faire pour ramener les salariés dans les entreprises, sur quels critères ?".
Adrien a grand peur que la machine économique, une fois grippée ne reparte pas et laisse sur le carreau des dizaines de milliers de salariés. Pour lui, le mois d’avril risque d’être meurtrier.
Sans rentrée d’argent, sans approvisionnement en matière première, avec un carnet de commandes qui se vide, il lui sera impossible de continuer à faire tourner sa boite.
Un crève-cœur d’autant que, ce printemps, et les commandes qu’il apportait avant le confinement, s’annonçait historiquement bon pour les finances de sa menuiserie.
L'économie en Pays de la Loire : des chiffres et une annonce
Ce vendredi soir, 27 mars, Le Conseil Régional a annoncé qu'il allait lancer une levée de fonds publics et privés pour venir en aide aux artisans, commerçants, associations et petites entreprises de la région."Ces derniers constituent en effet le poumon économique de notre région et subissent de plein fouet les conséquences de la crise. Sans fonds propres ni grandes capacités financières, ces acteurs économiques sont les plus exposés au risque de faillite" indique le communiqué de presse.
Pour Christelle Morançais, présidente de la région des Pays de la Loire :
"Sauver les petites entreprises en difficulté est un défi que la Région ne peut pas relever seul. C’est pourquoi la Région lance aujourd’hui une vaste souscription et un appel à la générosité de tous : collectivités publiques (départements, agglomérations, intercommunalités), entreprises et particuliers. La solidarité et l’entraide sont dans l’ADN de la Région, et nous avons l’occasion unique d’en faire la plus belle démonstration à l’égard de nos petites entreprises. Abondée par des fonds publics et privés, cette initiative a vocation à recueillir toutes les contributions volontaires. Si on s’y met tous ensemble, on peut réussir à préparer le rebond, avec un seul but : sauver nos petites entreprises régionales de la faillite et sauver nos emplois ! "
Collectivités, entreprises et particuliers peuvent d’ores et déjà se manifester sur une adresse dédiée : sauvons-nos-petites-entreprises@paysdelaloire.fr
La région compte 1,606 747 million d’emplois (chiffres de 2018), répartis dans plus de 322 000 établissements. L’agriculture totalise 3,5 % des emplois en Pays de la Loire, contre 2,3 % en France métropolitaine. L’industrie, regroupe 16,3 % des emplois, contre 11,8 % au niveau national. En France, seule la Bourgogne-Franche-Comté fait un peu mieux avec 16,4 %.