Une vingtaine de clichés rares, encore jamais partagés avec le public, ont trouvé leur place dans la dernière demeure de Georges Clemenceau, à Saint-Vincent-sur-Jard en Vendée. Capturés par l'entourage proche de l'homme d'Etat, mais aussi par des photographes triés sur le volet, ces photographies nous emmènent au coeur de l'intimité de celui que l'on surnommait "le Tigre".
Une fenêtre sur les secrets de Clemenceau. Voilà ce qu'offre l'exposition "Clemenceau et les photographes de l'intime", installée dans sa demeure de Saint-Vincent-sur-Jard, où "le Tigre" était venu couler ses vieux jours, entouré de ses proches.
En 1841, c'est son père, qui le premier, l'avait photographié. Alors que Georges Clemenceau n'était encore qu'un petit garçon, il a appris à poser devant l'objectif. Des décennies plus tard, ce fils de médecin, devenu lui-même médecin, deviendra l'homme politique connu de tous.
Des photographes d'exception
Dans ses fonctions d'homme d'État, d'abord maire du 18ème arrondissement de Paris, puis député, sénateur et ministre de l'Intérieur en 1906, "le premier flic de France" s'est souvent prêté à l'exercice des séances photos. Mais souvent, il a répété à qui voulait l'entendre qu'il détestait ces clichés. "Ils me font une tête de vieux crétin", râlait-il.
Quelques rares photographes d'exception ont toutefois acquis la confiance de Clemenceau. Le plus illustre d'entre eux, Félix Nadar, a signé plusieurs clichés de l'exposition. Les deux étaient devenus amis sous la Commune, dans la seconde moitié du XIXème siècle.
Sur les photos de famille, le sourire de Clemenceau
Après Nadar, et en particulier à la retraite, Clemenceau a ouvert les portes de son intimité à d'autres photographes de renom : Dornac, Jean-Baptiste Tournassoud, Henri Manuel, Jean Clair-Guyot ou encore Henri Martinie s'attireront tous la sympathie de l'écrivain, en particulier au moment de sa retraite.
Mais sur les murs de l'exposition, les plus beaux clichés ne sont pas toujours ceux de photographes expérimentés.
Cette photo ci-dessus, prise par l'un des membres de la famille du Tigre au début du XXème siècle, a particulièrement retenu l'attention de Stéphanie Lhortolary, administratrice de la maison Clemenceau. "Là on saisit un moment d'intimité. Georges Clemenceau avec ses petits enfants. Et c'est plutôt touchant je trouve, on le voit sourire sur cette photo, c'est assez rare", commente celle qui a contribué à créer l'exposition. Souvent décrit comme "un personnage bourru et bougon", l'administratrice trouve "un côté très doux" à cette photo.
Ne m’en parlez pas. C’est une chose terrible. M. Clemenceau pose comme il parle par boutades. S’il est de bonne humeur, il promettra tout ce qu’on voudra, sur ce ton sec et cassant qui lui est particulier. Et, au moment de s’exécuter, il s’éclipsera en grognant. D’autres fois, il prendra un ton bourru et aura un mouvement généreux. Avec lui, on ne sait pas. C’est l’inconnu, le caprice, l’incohérence. Quand on le tient, il faut en profiter et vivement !
François de TessanCiné Journal, 10 janvier 1914
Loin de n'être qu'un homme politique austère, Clemenceau a chéri les moments partagés avec ses petits-enfants à la retraite. "Il joue à la pétanque, il y a un repas familial, c'est vraiment des instants très privés qu'on peut montrer au public", raconte l'administratrice.
Les spectateurs qui se promènent dans les pièces de la maison Clemenceau à Saint-Vincent-sur-Jard, arborent souvent un sourire surpris. "Ça permet de rentrer dans son intimité, des photos personnelles avec sa famille... je trouve ça original, on s'imagine mieux le personnage que c'était", avance l'un deux, en vacances dans la région.
L'exposition Clemenceau et les photographes de l'intime, conçue par le musée Clemenceau de Paris, est ouverte jusqu'au 30 avril 2024. Entrée : 8 euros, gratuit pour les moins de 26 ans
Reportage de Quentin Carudel et Damien Raveleau