De Guérande à Noirmoutier, une année exceptionnelle pour les producteurs de sel "au delà des volumes produits historiquement"

Des paludiers comblés mais épuisés. La production de sel a commencé dès le mois d'avril et n'a pas cessé depuis. A Noirmoutier et vers Guérande, les tas de sel grossissent de jour en jour.

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Le mot est lâché immédiatement dans la conversation : 2022 sera une année exceptionnelle !

Joël Piau, le nouveau directeur de la coopérative des producteurs de sel (section Noirmoutier) se souviendra de sa première année à la tête de l'entreprise noirmoutrine. En septembre prochain, il est hautement probable que les volumes de production auront doublé par rapport à une année moyenne.

"On a démarré relativement tôt, rappelle Joël Piau, Fin avril, il y avait déjà les premières récoltes, même si elles étaient confidentielles en terme de volume. En mai, on a eu une production assez bonne." 

Ce début de saison était donc déjà prometteur. En juin, un épisode orageux a stoppé un temps les récoltes mais depuis... c'est le rush !

Des volumes historiques

"On va au delà des volumes produits historiquement" constate le patron de la coopérative des producteurs de Noirmoutier. Les 90 sauniers qui exploitent 2 300 œillets sur l'île vendéenne s'attendent à produire 4 000 tonnes d'or blanc cette saison. Ils en auraient espéré 2 400 dans une année normale.

Le soleil, la chaleur, oui mais pas seulement. Le vent aussi. C'est lui qui va déshydrater la couche supérieure de l'œillet et permettre la cristallisation de la fleur de sel, le nectar des salines.

Cette fleur de sel au goût plus subtil et qui se vend plus cher que le gros sel, se récolte immédiatement sinon elle tombe au fond de l'œillet. C'est elle qui met la pression aux sauniers. Depuis le printemps, il n'y a pas eu de repos.

L'épuisement guette

Il faut bien se rendre compte que la saison a commencé avant le mois d'avril, dès le mois de mars pour remettre les marais en état. Et cette saison va se poursuivre jusqu'à la mi-septembre.

Jusqu'au "coloï", cette période de une à deux semaines lors de laquelle les producteurs amènent leur sel vers le lieu de stockage, en l'occurrence pour la coopérative de Noirmoutier,  près de l'étier du Moulin au sud de la commune de Noirmoutier-en-l'île. Une sacrée saison oui. Mais l'épuisement guette déjà certains sauniers (au nord de la Loire, on dit paludier).

Pascal Donini est un ancien déjà des producteurs de sel à Batz-sur-Mer, au sud du pays guérandais, en Loire-Atlantique. Installé depuis plus de 20 ans, il y exploite 45 œillets.

"On est dans le rouge, dit-il. je me lève au plus tôt à 6h30 et je me couche au plus tôt à minuit." Et les nuits ne sont pas sereines. La météo est certes favorable, mais le diable se cache dans les détails.

Si le ciel est dégagé, on pourra récolter la fleur de sel dès midi. Mais si la journée commence sous un ciel voilé alors il faudra attendre. Il faut donc parier et prévoir au plus juste le planning des saisonniers qui viennent en renfort sur la saline. 

"On ne sait jamais à quoi s'attendre, témoigne Pascal. S'il y a de la fleur de sel, je suis débordé."

Comme beaucoup, il se ménage une sieste aux heures les plus chaudes mais il n'a pas son compte d'heures de sommeil. Et il connait des cas de burn-out chez les paludiers guérandais.

Du stock pour les années à venir

"Même les anciens disent qu'ils n'ont jamais vu autant de sel aussi tôt ! J'ai déjà l'équivalent de deux saisons en une et on n'est que le 2 août !"

Les cours du sel ne vont pas s'effondrer pour autant. L'avantage de ce produit de la mer, c'est qu'il ne se dégrade pas. Alors Pascal va faire comme tous ses collègues, il va faire du stock cette année. En prévision d'une prochaine saison qui ne ressemblera peut-être pas à ce qui est déjà une année historique.

"C'est très stratégique, confirme le directeur de la coopérative des producteurs de sel de Noirmoutier. On a besoin de stocker en prévision de l'année suivante. On peut avoir une année blanche. C'est exceptionnel mais on n'est pas à l'abri d'inondations en début de saison."

"Ça fait du sel fin qu'on a du mal à ramasser"

Gwenaël Rio quant à lui, est plus nuancé. Cette production qu'il qualifie d'excellente pourrait avoir des conséquences. "Les stocks ont un coût" dit-il.

Et puis la chaleur, selon ce fils d'une famille de paludiers depuis dix générations, peut aussi dégrader le processus en réchauffant trop le fond des œillets. "Les marais sont fatigués, dit-il, ils produisent moins parce qu'ils sont chauds. Quand il fait chaud trop longtemps, ça cristallise mal et ça fait du sel fin qu'on a du mal à ramasser." Une bonne pluie ne ferait pas de mal.

Il n'empêche, le président fondateur de la société Trad y Sel qui fédère une quarantaine de paludiers sur le bassin de Guérande, s'attend à des chiffres de production deux fois supérieurs à une année moyenne.

Quasiment pas de pluie annoncée d'ici le 15 août et de nouveaux pics de chaleur prévus, certains paludiers entament... leur troisième saison de l'année.

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