Le responsable de la congrégation religieuse des Frères de Saint-Gabriel a lu ce jeudi un acte de reconnaissance devant des victimes, reconnaissant des faits de pédocriminalité commis par leurs membres.
La première congrégation catholique à reconnaître des agressions pédophiles en France se situe en Vendée, à Saint-Laurent-sur-Sèvre. Ce jeudi, Claude Marsaud, le supérieur provincial de France des Frères de Saint-Gabriel, s'est exprimé devant 27 victimes, dont une partie a témoigné devant les religieux. Il a lu un "acte de reconnaissance", selon l'AFP.
Nous, Frères de Saint-Gabriel, reconnaissons et dénonçons tous les actes de violences physiques, psychologiques, morales, sexuelles commis par des frères de Saint-Gabriel, dans l'exercice de leur métier d'éducateur, d'enseignant, d'animateur, de maître spirituel qu'ils ont utilisé à des fins personnelles comme un pouvoir et non comme un service et un don d'eux-mêmes
Claude Marsaud, responsable des Frères de Saint-GabrielAFP
Une vingtaine d'agresseurs identifiés
Les frères de cette congrégation étaient envoyés en Vendée, en Loire-Atlantique, dans le Maine-et-Loire et le Finistère. Une vingtaine d'agresseurs ont été identifiés, aujourd'hui tous décédés. Les faits qui se sont déroulés de 1950 au milieu des années 70 concernent une cinquantaine d'enfants, selon le coordinateur de cet événement, frère Christian Bizon, qui figure aussi parmi les victimes.
L'un d'eux, le frère Gabriel Girard aurait agressé à lui seul au moins une vingtaine d'enfants, garçons et filles âgés de 8 à 10 ans, entre 1965 et 1972 dans deux écoles, à Issé (Loire-Atlantique) et Loctudy (Finistère), alors que les responsables de l'époque avaient été prévenus de ses agissements.
Acte symbolique : sa notice biographique a été lue à haute voix par le Frère qui l'avait rédigée, il a reconnu qu'il s'était trompé, puis a déchiré le document. L'une des victimes l'a ensuite brûlée publiquement.
"Les victimes sont en attente de sens"
Antoine Garapon, président de la Commission reconnaissance et réparation (CRR) mise en place à la suite de la publication à l'automne du rapport Sauvé sur l'ampleur de la pédocriminalité dans l'Eglise était co-organisateur de cette rencontre.
Selon lui, il s'agit d'"une grande première". Son objectif est de multiplier ce type d'initiatives. "Les victimes sont en attente de sens et d'une désapprobation morale de ce qui a été fait. Cette désapprobation est essentielle, elle s'apparente à un aveu collectif de la congrégation", explique-t-il.
"C'est une première étape, qui ensuite permettra de passer à la deuxième phase, la réparation", souligne Luc Coirier, l'une des victimes, membre du "Groupe FSG-Collectif 85" qui s'est constitué ces tout derniers mois. Il rassemble désormais une quinzaine de personnes.
Selon Luc Coirier, la plupart d'entre elles "ont l'intention de demander une réparation financière." Pour aider au processus, la CRR a établi des questionnaires et des barèmes, qui vont de 5.000 à 60.000 euros maximum.
Pour Jean-René Nicoleau, membre du "Groupe FSG-Collectif 85", c'est une étape importante pour la reconstruction des victimes : "On a un parcours de résilience à faire, nous devons essayer de vivre après ce qu’il s’est passé. Cela demande du temps, des étapes des symboles. À ce titre, la reconnaissance est très importante. L'Eglise doit reconnaître des manquements grave, cela doit lui coûter".
Les Frères de Saint-Gabriel vont par ailleurs financer une étude, menée par un historien de l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) sur les faits commis, "dans un objectif mémoriel".