L'ex-numéro deux du tennis français raconte les neuf années pendant lesquelles elle dit avoir été violée par son entraîneur de tennis. La première fois, elle avait 13 ans. Régis de Camaret comparaît depuis lundi devant la Cour d'Assises de Draguignan pour le viol de deux de ses anciennnes élèves.
Isabelle Demongeot, ancienne numéro 2 du tennis français, a longuement raconté mardi, au deuxième jour du procès en appel aux assises de Draguignan, comment son ex-entraîneur Régis de Camaret lui avait "tout enlevé" dans sa vie, en la violant durant neuf années à partir de 13 ans.
Témoin crucial, Isabelle Demongeot avait déposé plainte en 2005 à 39 ans contre Camaret, dévoilant un terrible secret. Elle déclenche une enquête de gendarmerie qui va conduire à une longue liste d'autres victimes d'agressions sexuelles ou de viols par l'entraîneur.
Condamné à 8 ans en première instance
En novembre 2012, Régis de Camaret sera condamné à huit ans de prison en première instance aux assises du Rhône pour des viols non prescrits à l'encontre de deux joueuses plus jeunes. Il encourt 20 ans de prison dans ce procès en appel. "C'est très dur de revenir, après neuf ans de procédure. J'espère que c'est la dernière fois que je viens témoigner, je suis à nouveau en thérapie, j'ai envie d'une vie plus sereine", a confié Isabelle Demongeot."Le violeur fait ce qu'il veut, il a envie de faire appel, il fait appel", déplore la jeune femme, simple témoin car les actes qu'elle a subis sont prescrits. De son enfance elle dit: "J'étais pleine de vie, j'étais sportive, je dévalais les pentes de ski, je n'avais peur de rien, tout était beau."
Il m'a tout enlevé cet homme, il m'a vidée, il m'a enfermée dans un système, c'est une forme d'emprise que j'ai subie"
analyse aujourd'hui la championne de 47 ans, qui souffre de séquelles psychologiques et physiques graves. Quand elle découvre sa passion pour le tennis, ses parents l'inscrivent au club local des Marres à Saint-Tropez (Var), où ils habitent.
La même chambre pour faire des économies
Son entraîneur Régis de Camaret se montre tout de suite possessif: "Il nous demande de ne plus avoir de vie d'adolescentes. Si on va au cinéma, c'est avec lui." En 1980, lors d'un premier déplacement d'Isabelle pour un championnat de France à Roland-Garros, Camaret qui occupe la même chambre par mesure d'économies l'agresse sexuellement à 13 ans. Elle se souvient :Je ne comprenais pas ce qu'il se passait. Je revois ses yeux, sa tête, sa moustache, j'avais un corps inerte, j'ai regardé en l'air, je ne voulais pas voir, j'ai tout verrouillé comme si j'étais déjà morte."
25 ans de plus qu'elle
Quelques semaines plus tard, lors d'une autre compétition, il la viole. "C'était assez barbare, pas de sentiment, des paroles au départ, puis pas un mot. J'avais mal, très mal, c'était la première fois, il avait 25 ans de plus que moi", confie-t-elle au jury. Régis de Camaret lui dira de n'en parler à personne. Les viols "barbares, courts, douloureux, sans plaisir" vont se répéter sur une aire d'autoroute ou dans le cagibi d'entreposage des balles du club.Il sentait fort la transpiration, il avait les mains sales, les ongles immondes"
dit-elle en évoquant des sodomies.
Elle réussit à le repousser au bout de 9 ans
A 22 ans, elle réussit enfin à le repousser malgré son obsession de réussir sa carrière. "J'avais l'impression d'avoir à peine 17-18 ans. J'étais robotisée, jepensais qu'il n'y avait que lui qui pouvait m'amener à un haut niveau." "Il m'a empêchée d'être une des meilleurs joueuses au monde", dit-elle aussi de
son ex-entraîneur qui l'isolait et se tenait à distance des instances fédérales de tennis. L' ex-président de la fédération Philippe Chatrier, qu'elle informe
dès 1993, ne fera rien, précise-t-elle. Se sent-elle soulagée d'avoir parlé au grand jour? "S'il fallait recommencer, je ne suis pas sûre que je recommencerais. Aujourd'hui, j'ai des difficultés dans le monde du travail. Les gens ont d'abord l'image de la femme violée, ensuite de la joueuse de tennis."