Le changement de directoire de la SNCM est signe d'inquiétude pour les syndicats. En s'abstenant lors du dernier vote, les trois représentants de l'Etat ont permis à l'actionnaire principal Transdev de rejeter le plan de redressement de Marc Dufour. Les syndicats crient à la trahison.
En s'abstenant lundi lors du vote tenu au sein du conseil de surveillance de la SNCM, les trois représentants de l'Etat ont permis de ne pas reconduire le directoire présidé par Marc Dufour, dont le plan de redressement était rejeté par le principal actionnaire, Transdev, mais soutenu par les syndicats qui crient à la trahison de l'Etat.
Marc Dufour, s'est dit "inquiet sur l'avenir de la SNCM.
Pour les syndicats, qui apportaient leur soutien à son plan de redressement, cette éviction est le signe d'une volonté de "démantèlement" de la compagnie de la part de l'Etat.
"C'est un choix politique et économique du gouvernement pour faire place libre à Corsica Ferries"
a déclaré Frédéric Alpozzo, délégué CGT-Marins.
Selon lui, le conseil de surveillance n'a "pas proposé de solution de financement pour les bateaux ni de mise en oeuvre du plan industriel à long terme". Or "l'Etat a toutes les clefs en main pour respecter ses engagements".
La CGT a demandé un rendez-vous avec le Premier ministre et le secrétaire d'Etat aux Transports "dans les heures qui suivent".
"Nous mettrons tous les moyens pour qu'il n'y ait aucun licencement, a-t-il ajouté, précisant que des "actions particulières seront décidées" en fonction de la réponse du gouvernement.
"C'est du gâchis, c'est une trahison de l'Etat", a réagi Pierre Maupoint de Vandeul, pour la CFE-CGC.
Pour son confrère de la CFE-CGC, Maurice Perrin,
"Le gouvernement va devoir rendre des comptes"
"il est inconcevable qu'on soit à ce niveau d'incompétence politique", a-t-il dit. Les salariés "sont inquiets, l'Etat se déjuge au profit d'actionnaires
qui veulent envoyer la SNCM et ses salariés au tribunal de commerce. Plus que jamais on va se mobiliser autour du projet", a ajouté M. Perrin.
Transdev rejette le plan Dufour voté à l'été 2013, qui comporte notamment la commande de quatre nouveaux navires. Il souhaite même se désengager de la compagnie, opératrice historique des lignes Corse-Continent, estimant ne "pas avoir les moyens de financer" son développement, ni les risques l'accompagnant.
De fait, la SNCM est sous le coup d'une condamnation de Bruxelles à rembourser deux fois 220 millions d'aides publiques, ce que M. Janaillac considère comme "une menace létale". Antoine Frérot, PDG du coactionnaire de Transdev, Veolia, avait ainsi demandé une "mise sous protection du tribunal de commerce".
Une position, également soutenue par le président de la Collectivité territoriale de Corse Paul Giacobbi, qui conduirait l'entreprise à ne conserver que 500 salariés contre un peu plus de 2.000 actuellement.
Le désaccord entre la SNCM et son actionnaire, d'abord feutré, s'était durci ces derniers mois avec la tentative infructueuse d'éviction du président du Conseil de Surveillance Gérard Couturier, l'un des sept représentants de Transdev au conseil, mais qui a pris fait et cause pour la direction.
Entre les deux, l'Etat, actionnaire à 25%, s'est rapidement retrouvé en position d'arbitre. En janvier, après une grève de dix jours, le ministre - aujourd'hui secrétaire d'Etat - des Transports Frédéric Cuvillier avait soutenu le projet de la direction et lancé les études de financement.
M. Perrin l'a accusé lundi de "dérobade".
Par ailleurs les deux avocats de la SNCM, Jean-Pierre Mignard, proche de François Hollande, et Sébastien Mabile ont estimé lundi "ne plus être en mesure de poursuivre leur mission de conseil au-delà de la date d'expiration du mandat du président du directoire".