Premier tour ce dimanche des élections départementales mais beaucoup des quelque 43 millions d'électeurs concernés risquent de bouder le scrutin. Pour la première fois, ces élections sont organisées en même temps sur la quasi-totalité du territoire national.
Jusqu'à présent, les conseils généraux, en charge de gérer les départements, étaient renouvelés par moitié, en principe tous les trois ans. Cette fois-ci, les conseils départementaux (leur nouveau nom) sont tous élus en même temps pour six ans, avec un mode de scrutin inédit : dans chacun des 2.054 cantons, sera élu un binôme homme-femme, alors que précédemment dans chacun des 4.035 anciens cantons, de taille plus réduite, était désigné un seul élu.
Ne sont pas concernés Paris et Lyon, où les fonctions des conseils départementaux sont exercées par d'autres organes (comme le Conseil de Paris dans la capitale), ni la plus grande partie des outre-mer, où le statut de département se fait de plus en plus rare.
Les seuls départements ultramarins appelés aux urnes sont la Réunion et Mayotte, qui, en raison du décalage horaire, voteront à partir de 5H00 et 6H00 du matin (heure de Paris), et la Martinique, où le scrutin débutera en milieu de journée.
Les bureaux de vote sont ouverts de 8H00 à 18H00. Jusqu'à 19H00 dans beaucoup de villes moyennes (Brest, Dijon, Chambéry, Toulon, Tours..), jusqu'à 20H00 à Bordeaux, Marseille, Nantes, Toulouse et en région parisienne.
Niveaux vertigineux pour l'abstention
Tout concorde pour que l'abstention atteigne ou dépasse les niveaux déjà vertigineux atteints lors des dernières élections cantonales de 2011 (55,7% au premier tour) ou des élections européennes de mai dernier (57,5%).A l'incertitude ou l'ignorance sur le rôle des départements (en charge principalement de l'action sociale et de l'équipement des collèges), que François Hollande et Manuel Valls voulaient supprimer avant de se raviser, s'ajoute le mécontentement de nombreux électeurs de gauche, tentés d'aller "voter avec leurs pieds", et un rejet grandissant envers l'ensemble de la classe politique.
Un rejet dont compte bien profiter Marine Le Pen et le Front national, qui, fort de ses 25% de voix lors des européennes, s'est retrouvé au coeur de la campagne.
Manuel Valls, qui s'est dépensé sans compter pour ce scrutin, a d'ailleurs fait le choix (contesté jusque dans son propre camp) de cibler le risque de voir le parti d'extrême droite ravir une nouvelle fois la première place.
Pour le Premier ministre, comme pour les dirigeants socialistes, cette stratégie est destinée à limiter la casse, qui ne peut qu'être importante compte tenu de la carte politique actuelle des départements : la gauche en administre actuellement 61 sur 101, et pourrait en perdre 20 ou 30, voire plus.
L'UMP et l'UDI, unis dans la grande majorité des cantons, alors que la pluralité des candidatures à gauche est de règle dans les trois quarts des cas, comptent profiter de cette hémorragie : la Corrèze, terre de François Hollande, le Val-de-Marne, seul département encore communiste avec l'Allier, la Seine-Saint-Denis, fief du président de l'Assemblée nationale Claude Bartolone (PS), la Haute-Garonne, où règne le radical de gauche Jean-Michel Baylet, constitueraient des victoires symboliques pour la droite et le centre.
Trois étapes
Le FN espère pour sa part triompher dans le Vaucluse, et dans une moindre mesure dans l'Aisne et l'Oise, ainsi que dans le Var, département actuellement tenu par l'UMP.Pour toutes les forces politiques, le scrutin de dimanche ne constitue que la première de trois étapes. L'enjeu du premier tour est d'être qualifié pour le second, un objectif que très peu de binômes arrivés en troisième position pourront atteindre, car un seuil égal à 12,5% des électeurs inscrits est alors exigé. L'enjeu est de taille pour le PS, qui risque d'être éliminé de nombreux cantons.
Le deuxième tour, dimanche prochain, qui verra sans nul doute refleurir les débats sur "le front républicain" (le PS s'y engage, l'UMP le refuse) là où où le FN livrera un duel, permettra la conquête des cantons.
Mais on ne saura vraiment combien de départements ont basculé que dans les jours suivants, lors de l'élection des présidents des conseils départementaux, qui restera incertaine partout où aucun des trois camps en présence (gauche, droite, FN) n'aura la majorité.
Enfin, un éventuel remaniement pourrait être à l'ordre du jour, même si François Hollande a déjà prévenu qu'il ne changerait "ni de ligne, ni de Premier ministre".
Bref, si les départementales ne passionnent pas les Français, elles risquent d'agiter politiques et médias pendant encore un bon moment.