Covid : "Nos affaires coulent, nous allons disparaître", Laurent, gérant de salles de sport

Des patrons de salles de sport manifestent à Paris devant l'Assemblée Nationale, réclamant la réouverture de leurs clubs. Laurent Vibourel gère trois salles dans les Alpes de Haute-Provence. Après trois mois de fermeture, sa situation est critique. Il vient déjà de licencier deux salariés.

Même s'il se dit de tout coeur avec ses confrères d'altères, Laurent Vibourel n'est pas monté à la capitale fouler la place de la Concorde ce mardi.

Il n'a pas jeté, d'un geste symbolique, ses baskets, usées par des mois de fermeture, au pied du palais Bourbon. Lui, c'est le bourdon qu'il a.

Cet ancien sportif de haut niveau, judoka, qui a ouvert sa première salle en 2013, estime qu'il est déjà presque trop tard. Manifester, il fallait le faire plus tôt.

La peur s'est installée

En décembre, il appelait les autres gérants de salles de sport du département à braver l'interdiction et à ouvrir, "quoi qu'il en coute", dès la rentrée, le lundi 4 janvier. "De la dizaine de gérants des Alpes de Haute-Provence, je fus le seul à le faire. La peur s'est installée. Les gérants redoutent les amendes et les fermetures administratives.".

La manifestation parisienne, lancée à l'appel du collectif "Touche pas à ma salle de sport !", avait déjà été programmée avant les fêtes, mais fut annulée au dernier moment. "Le collectif  se réveille, pour montrer notre présence. Je suis de tout coeur avec eux, mais il aurait fallu passer à l'action plus tôt."

Laurent Vibourel a déjà du licencier deux salariés. Depuis la fermeture de ses salles à l'annonce du second confinement, il perd chaque mois 50% de son chiffre d'affaire. "La plupart de mes clients ont résilié leurs abonnements. Eux-aussi ont peur. Est-ce qu'ils vont revenir un jour ? Je n'en sais rien. Plus comme avant, ça c'est sur. Les abonnements à l'année, c'est fini.".

"Je ne me sens pas suffisamment aidé"

Laurent a réussi à négocier avec le propriétaire des locaux l'arrêt du paiement des loyers. Un simple report, il devra tôt ou tard sortir les 4 000 euros par mois et par salle dûs. "Je ne me sens pas suffisamment aidé. J'ai reçu 500 euros d'aide de la Région."

Cinq cent euros par mois ? "Non, 500 euros tout court, pour le mois de novembre. Rien depuis. Je ne sais pas comment l'on va tenir, quand bien même, un jour, nous pourrons rouvrir."

Car Laurent s'inquiète surtout pour l'après. L'après, lorsqu'il faudra faire les comptes. Lorsqu'il faudra repartir. Recommencer à zéro (mais avec toujours les mêmes charges fixes). Refidéliser les clients.

Quand on lui demande ce qu'il attend du gouvernement, Laurent nous répond "plus d'aide". "Un plan de relance sur un ou deux ans". "On est dans le brouillard, on ne sait pas où l'on va. Nos affaires coulent. On va disparaitre. On a des PGE [prêts garantis par l'Etat] mais on ne connaît pas les taux. On espère pouvoir décaler les remboursements. Le plus important, ce sont les charges. Il faut que l'on nous aide là-dessus."

"Il n'y a jamais eu de cluster dans une salle de sport !"

On revient sur la manifestation à Paris où Laurent ne sera pas. Le collectif "Touche pas à ma salle" va proposer d'utiliser un masque de sport comme garantie sanitaire. On demande à Laurent ce qu'il en pense. Il est dubitatif.

"Vous savez, mes clients, à la salle, ils viennent pour s'oxygéner. Le masque de sport, c'est réservé pour des entrainements spécifiques, pour être volontairement en difficulté respiratoire. Je ne suis pas pour." Lui, continue de clamer un argument qu'il juge imparable : "Il n'y a jamais eu de cluster dans une salle de sport !".

"Dans les supermarchés, il n'y a pas autant de mesures"

Et de lister toutes les mesures qu'il a prises durant l'été, jusqu'au reconfinement : capacité d'accueil divisée par deux, cours de sport dispersés sur la journée, gel hydroalcoolique à l'entrée, matériel nettoyé. "Dans les supermarchés, il n'y a pas autant de mesures".

On avait rencontré Laurent en décembre dernier, tentant de réunir autour de lui d'autres gérants et de lancer une dynamique de résistance. On lui demande comment il va aujourd'hui. Il nous répond qu'il se sent très isolé. "On avance comme dans le couloir de la mort. Lentement." Il y a parfois des grâces, souligne-t-on ? "Il peut y avoir un miracle, oui. On l'attend." 

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