Des tonnes et des tonnes de livres parties à la poubelle après la faillite de "La grande librairie" située à Saint-Laurent-du-Var. Mais pourquoi n'a-t-il pas été possible d'en faire don au lieu de les mettre au pilon ? La rédaction de France 3 Côte d'Azur vous explique pourquoi.
C'est vrai ! Il y a de quoi rager ! 60 tonnes de livres partis au pilon ! 60 tonnes de livres qui auraient pu enrichir les rayons de bibliothèques d'associations, d'écoles, ou simplement de quidam. Mais non !
Après les vives réactions sur les réseaux sociaux, après la diffusion d'un reportage sur France 3 Côte d'Azur, et un article sur notre site internet, toutes et tous se sont interrogés pour savoir pourquoi ces livres n'avaient pas été donnés après la faillite de "La grande librairie" de Saint-Laurent-du-Var, dans les Alpes-Maritimes.
La réponse est dans la loi, et aussi dans notre système de fonctionnement capitaliste.
Les livres sont la propriété du gérant de la librairie
Les livres, présents physiquement dans la librairie, n'appartenaient pas au propriétaire des murs du local commercial, mais au gérant de la librairie, en faillite depuis plus d'un an.
Le gérant de la librairie en faillite laisse derrière lui 60 tonnes de livres dans ces locaux, il revient donc au liquidateur judiciaire de procéder à l'évacuation desdits livres.
L'article L. 111-1 du Code de la propriété intellectuelle (CPI)
Selon la loi, le législateur judiciaire, dans un tel cas de figure, se doit d'informer de cette situation, chaque auteur des 60 tonnes de livres, soit quelque 8 000 personnes, pour savoir que faire des livres au nom de la loi sur la propriété intellectuelle. Ce qui demande qu'une personne du cabinet de liquidation judiciaire s'occupe de cette tâche qui peut prendre un certain temps au vu du nombre de livres concernés.
Qui paie quoi ?
Qui plus est, pour que le liquidateur judiciaire puisse faire évacuer la marchandise, il faut qu'il ait recours à une société qu'il doit lui-même payer en retour de ce service. Or, la librairie en faillite n'a plus un sou d’actif pour assumer ce coût.
Le législateur judiciaire propose donc au propriétaire, impatient de retrouver la jouissance de son bien, pour qu'il puisse enfin en tirer des revenus locatifs, de les évacuer lui-même ! Depuis 1 an, le propriétaire de ce local commercial situé à proximité de Cap 3000 assure eu un manque à gagner d'environ 200.000 euros.
"L’administrateur judiciaire est obligé de demander une subvention au Trésor pour faire évacuer les livres, mais cela met beaucoup de temps. Donc, il m’a demandé de faire l’avance si je veux vite récupérer mes locaux et c’est ce que j’ai décidé de faire" nous explique Paul Teboul, le propriétaire des murs de "La grande librairie" de Saint-Laurent-du-Var.
L’administrateur judiciaire m’a demandé de faire l’avance des frais si je veux vite récupérer mes locaux et c’est ce que j’ai décidé de faire.
Paul Teboul, propriétaire des murs de "La grande librairie" de Saint-Laurent-du-Var
Au final, le propriétaire des murs, à ses frais, a fait évacuer les livres restants dans la librairie. Ce dernier a tout de même bon espoir de se faire rembourser cette facture, soit par le liquidateur judiciaire, soit par le Trésor, c’est-à-dire l'Etat.
Si le liquidateur judiciaire n'arrive pas à récupérer le moindre sou de la société en faillite. CQFD !