Témoignage. "Ça peut arriver à tout le monde !" L'histoire d'un homme guéri d'un double cancer du sein

Publié le Écrit par Jacqueline Pozzi
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À l'occasion d'Octobre rose, coup de projecteur sur un phénomène qu'on connait trop peu : le cancer du sein touche aussi les hommes. 600 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année en France. C'est arrivé à Sylvain Nuns. Aujourd'hui en rémission totale, l'Antibois nous a raconté son histoire.

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Nous l'avons rencontré à l'arrivée d'une compétition de course à pied, dans le soleil d'Antibes (Alpes-Maritimes). À 66 ans, Sylvain Nuns travaille toujours comme enseignant, avant son départ à la retraite prévu dans quelques mois. La retraite, une nouvelle existence qu'il envisage avec une joie de vivre décuplée par l'épreuve dont il vient de sortir vainqueur.

L'épreuve de sa vie a débuté une après-midi de février 2019. Sportif, Sylvain Nuns se met en tenue pour aller faire son jogging. "En enfilant mon T-shirt, je me suis aperçu que j'avais une petite amande au niveau du sein", se remémore-t-il. "Je me suis inquiété, je suis tout-de-suite allé voir mon médecin. Il m'a fait comprendre que ça pouvait être un cancer. Dès le lendemain, j'ai eu droit à une mammographie et toute la batterie d'examens. J'ai été diagnostiqué le 27 février. On m'a opéré le 20 mars".

Sylvain Nuns fait partie des 600 hommes touchés par le cancer du sein chaque année en France. Comme certainement chacun d'entre eux, il est tombé des nues. Ces cas sont rares : 1% seulement du nombre de malades. Mais le sien est rarissime : les médecins lui ont diagnostiqué un cancer différent à chaque sein.

"Regardez bien votre corps !"

"Je ne m'imaginais pas avoir un cancer du sein. Aujourd'hui, je sais que ça peut arriver à tout le monde ! Le cancer est une maladie insidieuse. On ne sent rien, il arrive sans faire de bruit. Il s'installe et un matin, il dit : "Je suis là". Quand vous le découvrez, le mal est déjà là. Donc regardez bien votre corps !"

Avec le recul, Sylvain Nuns estime qu'il a manqué d'informations. "J'ai d'abord ressenti pendant quelques mois, avant l'amande, le téton qui était un petit peu rentré dans l'aréole. Dès que vous avez ça, Messieurs -et Mesdames-, allez tout-de-suite consulter, parce que ce peut être les prémices d'un cancer ! Je ne le savais pas. Donc aujourd'hui, je me permets de le dire : faites vraiment attention à ce téton qui pourrait rentrer. Mais finalement, malgré la souffrance morale, je me suis dit : "heureusement qu'il y avait cette petite amande, parce que sinon, je ne m'en serais pas aperçu".

Ablation des deux seins et radiothérapie

Le cancer de Sylvain Nuns a pu être pris à temps. Pour lui, pas de chimiothérapie, mais tout-de-même l'ablation des deux seins et des ganglions, puis de la radiothérapie.

"Lorsque j'ai subi l'ablation des deux seins, le chirurgien est venu me voir et m'a dit : "on ne sait pas d'où vient votre cancer, c'est mystérieux", se souvient Sylvain Nuns. "Mais la médecine fait beaucoup, et la prévention joue un rôle énorme. Mais pour les hommes, elle n'est pas encore assez développée. Parce que ça arrive !"

Les cinq années qui ont suivi, Sylvain Nuns les a vécues comme un combat. "Il faut sans cesse être vigilant, il faut se palper les seins le plus possible pour savoir si ça n'évolue pas. Même si on est entourés, dans cette maladie on est seul à se battre. Il faut être fort dans sa tête et toujours positiver. C'est ce que j'ai essayé de faire après l'opération, en continuant de courir et de marcher."

Jusqu'à ce 26 juin 2024. Lorsque son médecin lui annonce qu'il est en complète rémission, "j'étais l'homme le plus heureux."

La palpation pas suffisamment pratiquée par les hommes

Interrogée sur le sujet à l'occasion du mois Octobre rose, le Docteur Anne Creisson, oncologue et sénologue au centre Antoine Lacassagne à Nice, fait le même constat : "Beaucoup d'hommes pensent qu'ils n'auront jamais le cancer du sein." Pourtant, pour eux comme pour les femmes, le dépistage précoce est primordial. "Le dépistage organisé ne prend pas les hommes en charge, mais chez eux la palpation est plus facile, parce que le volume mammaire est moins important. Pourtant cette palpation est souvent méprisée. Une petite boule... même les médecins, souvent, ne sont pas alertés sur ce risque".

L'oncologue ajoute : "Même quand il y a des enquêtes génétiques -parce qu'il y a plus de maladies familiales chez les hommes-, les hommes pensent que ce n'est pas la peine d'aller se faire dépister. Peut-être pour leur fille, mais pas pour eux. Alors qu'eux aussi peuvent développer un cancer du sein !"

Avec ses deux cancers diagnostiqués, Sylvain Nuns a tenu, pour ses filles et ses petites-filles, à réaliser les tests de détection du gène impliqué dans le cancer du sein. Soulagé par le résultat. Son cancer n'en reste que plus "mystérieux".

Sorti de cette épreuve, le bientôt retraité aime en tourner définitivement la page par ces mots empruntés à l'écrivain américain Mark Twain : "J'ai eu beaucoup de soucis dans ma vie. La plupart d'entre eux ne sont jamais arrivés."

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