Le Festival de Cannes, son tapis rouge, sa débauche de luxe et de stars attirent les touristes. Mais derrière le faste, la misère n'est pas loin. Bien visible, et pourtant peu perçue par les festivaliers.

L’autre Cannes, c’est aussi Boris. Posté au pied des marches, face au tapis, il tient sa petite tasse de la même couleur : rouge. Venu de Bulgarie, Boris est âgé de 80 ans. Sa femme est handicapée. Paralysée, elle est restée au pays. Avec les enfants ? Difficile d'en savoir plus : Boris ne maîtrise que quelques mots de français. Et la communication par gestes a ses limites. Tout juste comprend-on qu'il était facteur, et que la crise l'a chassé de chez lui.


Il a dormi du côté de la gare et transporte visiblement une bonne partie de sa vie dans une petite poussette de marché. Armé de sa tasse rouge, Boris passe la matinée devant les marches, square Mérimée.
Visiblement sans beaucoup de succès. Les festivaliers passent devant lui sans le regarder, comme s’il était transparent. Malgré tout, il tient à ne pas être pris en photo. De peur que des amis le reconnaissent.
 

Attirés par le festival

A peine quelques mètres plus loin, Battista, une Italienne de 40 ans, est assise dans le petit tunnel sur la Croisette, juste en face du palais où le Festival de Cannes bat son plein.

Les jambes croisées, le regard bleu délavé, elle attend. Le tunnel, une installation provisoire, est le passage obligé de tous les piétons de ce côté de la chaussée. Talons hauts et smoking défilent, mais pas vraiment de réactions. "Je récupère un ou deux euros par jour," confie-t-elle. "Mais les gens sont sympathiques, un peu plus généreux qu'à Nice."
Elle concède avoir été attirée par le festival, dans l'espoir de récolter quelques miettes. Elle aussi dort dans le quartier de la gare.
C'est d'ailleurs une constante : "le Festival de Cannes annonce la belle saison, et déclenche un afflux de personnes sans domicile fixe, qui viennent passer l'été dans le Sud," explique Christophe Visentin, directeur du Samu social de Cannes.
C'est le cas de Mireille, rencontrée rue des Etats-Unis, à deux pas de la Croisette. A la rue depuis 14 ans, elle a pour habitude de chercher le soleil pour la belle saison. Elle non plus ne veut pas être prise en photo. "A moins d'être payée. Comme une actrice !"
 

Sécurité renforcée

Pour le Samu social de Cannes aussi, le dispositif estival se met en place à l'occasion du festival. Les maraudes s'effectuent désormais à vélo, circulation oblige. La municipalité assure ne pas prendre de mesures particulières, mais les capacités d'hébergement sont augmentées au gré des besoins, et d'après Christophe Visentin, il n'y a pas de problèmes de place. 

Il estime la population de personnes sans domicile fixe entre 130 à 150 personnes. "Nous avons du mal à chiffrer l'afflux réel de personnes," reprend le directeur du Samu social. "Nous constatons avant tout une flambée du nombre d'appels au 115. Pendant le festival, il y a beaucoup de passage à Cannes, et des personnes étrangères nous font aussi des signalement. Mais la misère est présente toute l'année à Cannes." 
Certains SDF "locaux" sont de vrais fans du festival, collectionnent les affiches, comme Alain, que nous devions rencontrer, mais qui avait disparu le temps que l'équipe du Samu n'arrive.

Beaucoup ont pris l'habitude de prendre leur distance pendant la quinzaine. "Il y a beaucoup de sécurité, beaucoup de policiers... Nos habitués préfèrent faire profil bas, de peur qu'on leur confisque leurs affaires." Limousines et défilés prennent beaucoup de place. Trop peut-être pour permettre un autre regard sur le festival de Cannes.
 
 
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