Le Scrabble interdit des mots jugés offensants, les joueurs s’interrogent sur ce bannissement

Prière de revoir sa copie. Les joueurs de Scrabble ne pourront plus utiliser 400 mots discriminatoires de la langue française, suite à une décision du fabricant américain de la célèbre boîte de jeu. Tandis que les plus véhéments évoquent les conséquences du wokisme, dans les Alpes-Maritimes, on s'interroge.

"Des mots vont disparaître au Scrabble ? Vous me l’apprenez !" Une scène qui se répète ce matin quand on contacte l’un des clubs du célèbre jeu dans les Alpes-Maritimes. D’autres joueurs, le plus souvent des retraités, sont au parfum.

Tous les quatre ans, le dictionnaire qui sert de bible à ceux qui s’adonnent à la compétition, donne le la, si l’on peut dire, aux mots permis lors des parties. Un officiel qui a pignon sur rue puisque adossé à la dernière édition du dictionnaire Larousse qui a accompagné tant de générations d’écoliers.

Sauf que cette fois, il ne s’agit pas de cela. En effet, la firme américaine Mattel, qui distribue le jeu dans le monde entier, a annoncé vouloir retirer des centaines de mots du jeu. Pour les pays francophones, cela représente la bagatelle de 400 mots.

Le président du comité Côte d’Azur, Patrick Mériaux ne cache pas sa perplexité, mais tempère un peu. "Nous avons l’ouvrage de référence, l’officiel du Scrabble qui doit contenir 80 000 mots déjà. Puis s’y ajoutent les flexions et formes conjuguées. On doit alors arriver à 300 000."

Ce qu’il convient d’appeler une polémique concernerait surtout, selon lui, la version grand public du jeu. Il ajoute : "sur smartphone, c’est là qu’un certain nombre de mots pourraient tout bonnement disparaître."

Selon nos informations, le dispositif visant à bannir les 400 mots en question serait intégré, sous forme de règle, aux notices des nouvelles boîtes de jeu.

"Youpin, Chintok"

Mais de quels mots s’agit-il ? Eh bien de mots jugés à connotation racistes ou encore homophobes. Citons tarlouze ou encore pouffiasse. Il y a aussi bamboula, bicot ou encore youpin ou chintok.

Évidemment, on peut sérieusement se poser la question de faire figurer de tels mots. Certains, ils sont rares, ont pourtant un double sens. Ainsi faire la bamboula, c’est dit de façon familière, faire la fête, faire la bamboule.

"Le problème, c’est que le Larousse", explique Patrick Mériaux, "se met au diapason du temps. Des nouveaux mots entrent chaque année dans le dictionnaire, certains d’ailleurs très familiers ou franglais, quand d’autres disparaissent."

On s'intéresse peu au sens des mots en fait !

Patrick Meriaux, président du comité Scrabble Côte d'Azur

La question est peut-être davantage là. "Car", comme l’explique Anne Knopf, responsable du club de La Colle-sur-Loup, "nos membres ont une moyenne d’âge de 70 ans. C’est alors difficile pour eux parfois de s’y retrouver, un mot est-il toujours autorisé ou non ?"

Cette décision du fabricant laisse tout de même dubitatif : "on est un peu partagé, mentionne Patrick Mériaux, bien sûr des mots peuvent choquer lorsqu’ils sont offensants, mais nous, durant nos parties, on n'est pas dans cette logique."

"On s’intéresse peu au sens des mots en fait." Car l’objectif est de faire des points quand on sait que certains mots rapportent plus que d’autres en fonction des lettres qu’ils contiennent. "Et, ajoute ce spécialiste du Scrabble, cela fait bien des années que les mots racistes ont disparu du jeu, on ne s’en est même pas aperçu !"

Pour autant, les joueurs restent attachés à une certaine forme de liberté. "Le problème, c'est de savoir les limites qu’on se donne", précise le président du comité Côte d’Azur. Je peux comprendre que certains puissent se trouver heurtés par des mots.

"On va sûrement vers une société trop lisse" conclut-il.

Dans les Alpes-Maritimes, on compte entre 250 et 300 joueurs de Mandelieu à Menton. Des passionnés de lettres qui se réunissent en général une fois par semaine. Le Scrabble reste par ailleurs la star des jeux de société à Noël.

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