Les producteurs de citrons de Menton sont inquiets. Le manque d’eau de cet été n’a pas permis à certains fruits d’atteindre la taille requise pour être reconnus IGP.
Elsa Mouazé se fraye un passage entre les branches chargées de citrons du verger de l’Esatitude à Menton (Alpes-Maritimes). Des fruits appétissants mais déclassés pour certains. Avec son outil de mesure, la responsable de la station de conditionnement pose le verdict sur un de ses citrons dodus.
Ce citron fait 45 millimètres de diamètre. Un citron IGP doit faire entre 53 et 90 mm de diamètre. Ceux trop petits sont déclassés.
Elsa Mouazé, responsable de la station de conditionnement Esatitude
Véritable symbole local, le citron de Menton est cultivé sur une centaine d'hectares dans la commune depuis 1341. Il a obtenu en 2015 l'Indication Géographique Protégée (IGP) afin de protéger la mention "citron de Menton" sur l’ensemble du territoire européen.
Une reconnaissance qui implique un cahier des charges exigeant.
Jusqu’à 30% de la production déclassée
La sécheresse n’a pas permis aux fruits de grandir suffisamment pour répondre à la norme IGP du citron mentonnais. Pendant la sécheresse, Elsa Mouazé a craint l'interdiction d’arrosage : "on a pu arroser notre verger tout l’été mais ça ne compense pas la sécheresse et rien ne vaut une bonne pluie qui vient du ciel”.
Il y a deux ans on avait déjà eu des soucis de sécheresse sur juillet-août, il nous a manqué de l’eau. Cette année, à partir du mois de mai, on n’a pas eu de pluie jusque fin septembre. Les arrosages ont été plus compliqués.
Antoine Mari, producteur de citrons IGP.
En temps normal, le pourcentage de fruits non certifiés avoisine les 10%. Il pourrait grimper à 30% cette année.
Une situation qui interroge les agrumiculteurs pour les récoltes à venir. “Je devais planter une cinquantaine d’arbres mais, vu les deux étés qu’on vient de passer, je me pose des questions. Est-ce que ça vaut le coup ? Comment on va arroser ces arbres ?”, s’inquiète Antoine Mari.
Révision du cahier des charges
Sans IGP, impossible pour les producteurs de vendre leurs citrons à certaines filières : pâtisserie, restauration, fabricants de confitures et de biscuits.
Stéphane Constantin dirige l’Association pour la promotion du citron de Menton (APCM). Il milite pour la révision du cahier des charges afin d’autoriser les calibres plus bas, jusqu’à 45 mm.
“Quelques années auparavant, on avait des transformateurs plus intéressés par du petit fruit que du gros fruit. On avait déjà commencé ce travail de révision pour des questions économiques. La problématique climatique vient s’ajouter à cette réflexion”, analyse Stéphane Constantin.